Aller au contenu principal

Mary King

Entretiens

Soumis par iKNOW Politics le
Back
May 4, 2010

Mary King

Sénatrice indépendante de Trinidad et Tobago

“Je crois fermement à la vertu d’un travail acharné en faveur du développement national, qu’il soit économique, social ou politique.” – Mary King

iKNOW Politics: Quels sont les défis auxquels vous avez été confrontée en tant que femme dans le poste à responsabilités qui est le vôtre à votre siège de sénatrice? Comment votre formation vous a-t-elle préparée à relever ces défis?

Les défis que j’ai dû relever étaient principalement liés au fait que j’œuvre dans un parlement fonctionnant dans le cadre du système de Westminster, dans lequel le scrutin uninominal majoritaire à un tour donne tout pouvoir à la liste vainqueur. En dépit des avis que nous donnons, le parti au pouvoir réussit à faire tout ce qu’il veut. Le Sénat de Trinidad et Tobago est composé des membres suivants: 15 membres choisis par le parti au gouvernement, 6 choisis par le dirigeant de l’opposition et 9 désignés par le Président. Ces 9 derniers membres (auxquels j’appartiens) sont considérés comme des sénateurs indépendants n’ayant pas d’affiliation partisane et dont le devoir est d’œuvrer dans l’intérêt du pays en s’efforçant de faire passer les « meilleures lois » possibles pour la nation. La  façon dont le Président doit choisir ces 9 sénateurs indépendants est précisée dans la Constitution: il doit s’agir de personnalités éminentes disposant de certaines qualifications en économie, en droit, etc. Je suis économiste spécialisée dans le développement.

Ma formation en recherche économique dans les secteurs de l’énergie, des finances et de la parité a joué un rôle majeur pour me préparer à occuper les fonctions de sénatrice indépendante. Notre pays, qui dépend du pétrole et du gaz, n’a pas encore tiré les leçons des hauts et de basse caractéristiques de ce type d’économie, connu sous le nom de « système de plantation ». Lorsque le prix du pétrole est favorable, le gouvernement répartit les bénéfices entre les différents secteurs, le commerce et la distribution, le secteur social et le bâtiment. Lorsque les vaches sont plus maigres, nous nous serrons la ceinture et empruntons pour financer le budget national. Certains économistes parmi nous se sont penchés sur cette malédiction, connue sous le nom de « syndrome hollandais » et ont réfléchi aux meilleures méthodes de diversification pour les suggérer au gouvernement – en vain pour l’instant.

J’ai aussi été à l’origine de la création, au début des années 90, du Groupe national des femmes parlementaires, dont l’objectif était de préparer les femmes à occuper des rôles de dirigeantes dans la société et au parlement. Ce groupe a vivoté pendant quelques années avant de s’éteindre, peut-être en raison du fait que les femmes n’étaient pas prêtes à occuper des rôles de dirigeantes. Il en irait peut-être différemment aujourd’hui.

J’ai suivi des cours de gestion et de planification financières dans le cadre de mes études d’économie, ce qui m’a extrêmement bien préparée à tenir mon rôle au Sénat. Je crois fermement à la vertu d’un travail acharné en faveur du développement national, qu’il soit économique, social ou politique.

iKNOW Politics: A votre avis, quels sont les paramètres dont les femmes qui se présentent à des élections doivent avoir conscience? Que recommanderiez-vous plus précisément aux femmes se présentant avec des ressources limitées dans des sociétés dominées par les hommes?

Il faut que les femmes aient conscience de l’importance de l’argent dans les élections. A cette heure, à Trinidad et Tobago, le Premier ministre vient de dissoudre le parlement avant des élections qui n’interviendront pas avant une trentaine de mois. La presse a toutefois affirmé que son parti dépensera 150 millions de dollars de Trinidad et Tobago (c.-à-d. environ 25 millions de dollars des Etats-Unis) pour ces élections, qui ne concernent qu’une population de 1,2 millions de personnes. Les autres partis affirment ne pas avoir de fonds et être à la recherche d’environ 12 millions de dollars de Trinidad et Tobago, soit environ 2 millions de dollars des Etats-Unis. Avec de tels décalages sur le plan financier, il est très probable que c’est le parti le plus favorisé financièrement qui réussira à faire pencher le plus grand nombre de gens en sa faveur.

En outre, les mécènes ont toujours préféré accorder des fonds aux candidats masculins et les femmes sont donc désavantagées dans les campagnes, ce qui les oblige à dépendre financièrement de leur parti. Tout ceci ouvre bien évidemment la question de la réglementation et de la législation se rapportant au financement des campagnes électorales, inexistantes chez nous. Au cours de ma carrière, j’ai aussi été Présidente de la branche locale de Transparency International, qui a beaucoup étudié la question du financement des partis politiques. Je suis aussi secrétaire d’une institution internationale baptisée GOPAC (Organisation mondiale de parlementaires contre la corruption), au sein de laquelle nous nous occupons de questions de contrôle parlementaire, de lutte contre le blanchiment d’argent et de financement des partis politiques.

iKNOW Politics: Pouvez-vous parler à nos lecteurs d’un changement de politique bénéficiant aux femmes auquel vous avez contribué depuis votre élection?

Cela fait des années que nous sommes nombreuses à écrire, faire pression et plaider de façon véhémente en faveur de la création d’une institution chargée des enfants, car nous souffrons d’un grave problème de maltraitance des enfants. À Trinidad et Tobago, nous manquons de travailleurs sociaux, de policiers de proximité, voire de structures de prise en charge des enfants d’âge préscolaire. J’ai personnellement fait pression en faveur de l’octroi d’un soutien aux familles monoparentales ayant des difficultés financières. Notre gouvernement insiste pour mettre en place un grand nombre de programmes favorisant l’emploi, qui ont tous comme conséquence que les parents vivant seuls avec leurs enfants ne sont plus à la maison. Il me semble qu’il vaudrait mieux, pour les enfants, verser au parent unique une allocation chômage ou des allocations familiales lui permettant de rester à la maison, comme c’est le cas au Royaume-Uni.

Les petits enfants sont ainsi mieux soignés et vivent entourés de l’amour et de la protection qu’exige leur développement, tout particulièrement pendant les quatre premières années de leur vie, pendant lesquelles se développent leur sentiment d’être aimés et la confiance qu’ils ressentent à l’égard de la famille à laquelle ils appartiennent. Pour l’instant, nous avons réussi à faire adopter une loi permettant la création de cette structure de protection des enfants, ainsi que d’un tribunal familial. Je suis certaine que le prochain gouvernement  aura à cœur de reconstituer la vie de famille et de souligner à quel point il est important que les parents agissent de façon plus responsable et que les mères restent à la maison, tout particulièrement dans les foyers défavorisés financièrement.

iKNOW Politics: Avez-vous appris des leçons que vous aimeriez communiquer à d’autres femmes dirigeantes ?

Je ne peux pas dire que j’aie réellement appris des leçons, car je suis en général têtue sur les points que je considère comme importants. Je me contenterais de dire que lorsqu’on a fait son travail, qu’on a pris des informations concernant une question et que l’avis ou la proposition qu’on formule ne sont pas conforme à la réflexion d’autrui, même dans le cas d’un vote concernant un projet de loi particulier, il ne faut pas se laisser détourner du point de vue qu’on a adopté ou de la décision qu’on a prise sur la base des recherches effectuées. Il ne faut pas laisser l’avis de la majorité infléchir le nôtre, car si tel était le cas, notre avis ne pourrait pas être exprimé ni débattu et nous ne pourrions jamais savoir si nous aurions pu convaincre les autres de se rallier à notre sentiment. Procéder autrement revient à s’exposer à des doutes permanents.

iKNOW Politics: Votre style de direction a-t-il évolué avec les années?

Je ne crois pas que mon style de direction ait évolué avec les années. Je me laisse parfois convaincre de changer d’avis de temps en temps, mais uniquement face à un argument ou une discussion logiques et pour un point de vue que je n’aurais pas analysé auparavant.

iKNOW Politics: Pensez-vous avoir apporté une perspective nouvelle en tant que femme?

Il se peut que j’aie apporté une perspective nouvelle en tant que femme. Mes propres expériences m’ont amenée de la profession d’infirmière en Grande-Bretagne à celle de sage-femme, d’infirmière en pédiatrie, d’assistante en salle d’opération, puis à l’obtention d’un diplôme en économie et mathématiques à Trinidad et Tobago, avant de devenir expert-comptable, présidente et directrice de plusieurs conseils d’administration, tant dans le secteur privé que public, et présidente de commissions mixtes au parlement, ce qui m’a donné une perspective particulière assez rare chez les femmes. Je suis certaine que toutes ces expériences m’ont faite telles que je suis aujourd’hui et modelé ma façon de penser et de prendre des décisions. En fait, il m’a plusieurs fois été dit que je ne suis pas censée penser comme je le fais, car je suis une femme. Alors, oui, je dirais que j’ai effectivement apporté une perspective nouvelle liée à ma condition de femme.  

iKNOW Politics: Comment le soutien d’autres femmes vous a-t-il aidée dans votre travail?

D’autres femmes dans ma vie, ma mère, mes sœurs et des amies proches m’ont encouragée à suivre ma voie. Je me rappelle d’ailleurs très bien le moment où , à l’âge de 15 ans environ, ma mère m’a dit que je pourrais devenir tout ce que je voulais. J’ai suivi son conseil.

iKNOW Politics: Pensez-vous que le fait d’appartenir à un réseau mondial tel qu’iKNOW Politics puisse aider les femmes à tous les échelons de la politique, et leurs partisans, à réussir leur carrière et à mobiliser le public autour de questions d’intérêt commun?

Appartenir à iKNOW Politics doit aider les femmes à tous les échelons de la politique. Malheureusement, ce réseau est de création récente, mais chaque chose vient en son temps. Dans le monde d’aujourd’hui, la majeure partie des représentants et des dirigeants politiques a accès à Internet et si nous faisons tous le nécessaire à l’échelon national, de plus en plus de femmes en entendront parler. Je voudrais féliciter le GOPAC et ses dirigeants d’avoir proposé cette initiative à ses membres et suis convaincue que les hommes membres du GOPAC proposeront aussi à leurs collègues parlementaires femmes de leurs pays respectifs d’y participer. Des groupes de personnes éclairées verront alors le jour et se développeront, ce qui donnera davantage de forces aux parlementaires et nous donnera une vision plus vaste des perspectives qui s’offrent aux femmes dans le monde entier.

iKNOW Politics: Si vous deviez émettre une recommandation, quel conseil donneriez-vous aux membres d’iKNOW Politics, particulièrement les femmes candidates, faisant une carrière politique?

S’informer des modèles parlementaires en usage dans le monde. Les comparer au modèle dans lequel on s’inscrit. Se poser la question de savoir si le modèle dans lequel on agit nous offre à nous et à nos concitoyens le système démocratique le plus favorable possible à la participation populaire, à la discussion ouverte et franche, à la transparence et au sens de responsabilités, au contrôle de l’exécutif et à la mise en œuvre des lois que l’on contribue à faire adopter. Si votre système ne va pas dans le sens du renforcement de la démocratie, n’ayez pas peur de vous engager en ce sens, car vous serez alors certaine d’avoir fait de votre mieux pour veiller à ce que votre gouvernement n’agisse pas dans son propre intérêt, mais dans l’intérêt du pays. Nous devons œuvrer en faveur de l’ouverture du gouvernement, de la transparence, du sens des responsabilités, de l’équité dans la répartition, du rendement de nos investissements et d’une application efficace de la loi.

Le peuple élit le gouvernement et les parlementaires. Le parlement approuve le budget, adopte de nouvelles lois ou modifie les anciennes et sa troisième fonction importante consiste à contrôler le travail réalisé par le gouvernement au nom des électeurs. Le rôle que joue le parlement à l’égard du peuple est important et il est donc essentiel que seules des personnes intègres passionnées par l’amélioration de la vie de leurs concitoyens puissent briguer des responsabilités aussi importantes.

 

Date de l'entretien
Sénatrice indépendante de Trinidad et Tobago

“Je crois fermement à la vertu d’un travail acharné en faveur du développement national, qu’il soit économique, social ou politique.” – Mary King

iKNOW Politics: Quels sont les défis auxquels vous avez été confrontée en tant que femme dans le poste à responsabilités qui est le vôtre à votre siège de sénatrice? Comment votre formation vous a-t-elle préparée à relever ces défis?

Les défis que j’ai dû relever étaient principalement liés au fait que j’œuvre dans un parlement fonctionnant dans le cadre du système de Westminster, dans lequel le scrutin uninominal majoritaire à un tour donne tout pouvoir à la liste vainqueur. En dépit des avis que nous donnons, le parti au pouvoir réussit à faire tout ce qu’il veut. Le Sénat de Trinidad et Tobago est composé des membres suivants: 15 membres choisis par le parti au gouvernement, 6 choisis par le dirigeant de l’opposition et 9 désignés par le Président. Ces 9 derniers membres (auxquels j’appartiens) sont considérés comme des sénateurs indépendants n’ayant pas d’affiliation partisane et dont le devoir est d’œuvrer dans l’intérêt du pays en s’efforçant de faire passer les « meilleures lois » possibles pour la nation. La  façon dont le Président doit choisir ces 9 sénateurs indépendants est précisée dans la Constitution: il doit s’agir de personnalités éminentes disposant de certaines qualifications en économie, en droit, etc. Je suis économiste spécialisée dans le développement.

Ma formation en recherche économique dans les secteurs de l’énergie, des finances et de la parité a joué un rôle majeur pour me préparer à occuper les fonctions de sénatrice indépendante. Notre pays, qui dépend du pétrole et du gaz, n’a pas encore tiré les leçons des hauts et de basse caractéristiques de ce type d’économie, connu sous le nom de « système de plantation ». Lorsque le prix du pétrole est favorable, le gouvernement répartit les bénéfices entre les différents secteurs, le commerce et la distribution, le secteur social et le bâtiment. Lorsque les vaches sont plus maigres, nous nous serrons la ceinture et empruntons pour financer le budget national. Certains économistes parmi nous se sont penchés sur cette malédiction, connue sous le nom de « syndrome hollandais » et ont réfléchi aux meilleures méthodes de diversification pour les suggérer au gouvernement – en vain pour l’instant.

J’ai aussi été à l’origine de la création, au début des années 90, du Groupe national des femmes parlementaires, dont l’objectif était de préparer les femmes à occuper des rôles de dirigeantes dans la société et au parlement. Ce groupe a vivoté pendant quelques années avant de s’éteindre, peut-être en raison du fait que les femmes n’étaient pas prêtes à occuper des rôles de dirigeantes. Il en irait peut-être différemment aujourd’hui.

J’ai suivi des cours de gestion et de planification financières dans le cadre de mes études d’économie, ce qui m’a extrêmement bien préparée à tenir mon rôle au Sénat. Je crois fermement à la vertu d’un travail acharné en faveur du développement national, qu’il soit économique, social ou politique.

iKNOW Politics: A votre avis, quels sont les paramètres dont les femmes qui se présentent à des élections doivent avoir conscience? Que recommanderiez-vous plus précisément aux femmes se présentant avec des ressources limitées dans des sociétés dominées par les hommes?

Il faut que les femmes aient conscience de l’importance de l’argent dans les élections. A cette heure, à Trinidad et Tobago, le Premier ministre vient de dissoudre le parlement avant des élections qui n’interviendront pas avant une trentaine de mois. La presse a toutefois affirmé que son parti dépensera 150 millions de dollars de Trinidad et Tobago (c.-à-d. environ 25 millions de dollars des Etats-Unis) pour ces élections, qui ne concernent qu’une population de 1,2 millions de personnes. Les autres partis affirment ne pas avoir de fonds et être à la recherche d’environ 12 millions de dollars de Trinidad et Tobago, soit environ 2 millions de dollars des Etats-Unis. Avec de tels décalages sur le plan financier, il est très probable que c’est le parti le plus favorisé financièrement qui réussira à faire pencher le plus grand nombre de gens en sa faveur.

En outre, les mécènes ont toujours préféré accorder des fonds aux candidats masculins et les femmes sont donc désavantagées dans les campagnes, ce qui les oblige à dépendre financièrement de leur parti. Tout ceci ouvre bien évidemment la question de la réglementation et de la législation se rapportant au financement des campagnes électorales, inexistantes chez nous. Au cours de ma carrière, j’ai aussi été Présidente de la branche locale de Transparency International, qui a beaucoup étudié la question du financement des partis politiques. Je suis aussi secrétaire d’une institution internationale baptisée GOPAC (Organisation mondiale de parlementaires contre la corruption), au sein de laquelle nous nous occupons de questions de contrôle parlementaire, de lutte contre le blanchiment d’argent et de financement des partis politiques.

iKNOW Politics: Pouvez-vous parler à nos lecteurs d’un changement de politique bénéficiant aux femmes auquel vous avez contribué depuis votre élection?

Cela fait des années que nous sommes nombreuses à écrire, faire pression et plaider de façon véhémente en faveur de la création d’une institution chargée des enfants, car nous souffrons d’un grave problème de maltraitance des enfants. À Trinidad et Tobago, nous manquons de travailleurs sociaux, de policiers de proximité, voire de structures de prise en charge des enfants d’âge préscolaire. J’ai personnellement fait pression en faveur de l’octroi d’un soutien aux familles monoparentales ayant des difficultés financières. Notre gouvernement insiste pour mettre en place un grand nombre de programmes favorisant l’emploi, qui ont tous comme conséquence que les parents vivant seuls avec leurs enfants ne sont plus à la maison. Il me semble qu’il vaudrait mieux, pour les enfants, verser au parent unique une allocation chômage ou des allocations familiales lui permettant de rester à la maison, comme c’est le cas au Royaume-Uni.

Les petits enfants sont ainsi mieux soignés et vivent entourés de l’amour et de la protection qu’exige leur développement, tout particulièrement pendant les quatre premières années de leur vie, pendant lesquelles se développent leur sentiment d’être aimés et la confiance qu’ils ressentent à l’égard de la famille à laquelle ils appartiennent. Pour l’instant, nous avons réussi à faire adopter une loi permettant la création de cette structure de protection des enfants, ainsi que d’un tribunal familial. Je suis certaine que le prochain gouvernement  aura à cœur de reconstituer la vie de famille et de souligner à quel point il est important que les parents agissent de façon plus responsable et que les mères restent à la maison, tout particulièrement dans les foyers défavorisés financièrement.

iKNOW Politics: Avez-vous appris des leçons que vous aimeriez communiquer à d’autres femmes dirigeantes ?

Je ne peux pas dire que j’aie réellement appris des leçons, car je suis en général têtue sur les points que je considère comme importants. Je me contenterais de dire que lorsqu’on a fait son travail, qu’on a pris des informations concernant une question et que l’avis ou la proposition qu’on formule ne sont pas conforme à la réflexion d’autrui, même dans le cas d’un vote concernant un projet de loi particulier, il ne faut pas se laisser détourner du point de vue qu’on a adopté ou de la décision qu’on a prise sur la base des recherches effectuées. Il ne faut pas laisser l’avis de la majorité infléchir le nôtre, car si tel était le cas, notre avis ne pourrait pas être exprimé ni débattu et nous ne pourrions jamais savoir si nous aurions pu convaincre les autres de se rallier à notre sentiment. Procéder autrement revient à s’exposer à des doutes permanents.

iKNOW Politics: Votre style de direction a-t-il évolué avec les années?

Je ne crois pas que mon style de direction ait évolué avec les années. Je me laisse parfois convaincre de changer d’avis de temps en temps, mais uniquement face à un argument ou une discussion logiques et pour un point de vue que je n’aurais pas analysé auparavant.

iKNOW Politics: Pensez-vous avoir apporté une perspective nouvelle en tant que femme?

Il se peut que j’aie apporté une perspective nouvelle en tant que femme. Mes propres expériences m’ont amenée de la profession d’infirmière en Grande-Bretagne à celle de sage-femme, d’infirmière en pédiatrie, d’assistante en salle d’opération, puis à l’obtention d’un diplôme en économie et mathématiques à Trinidad et Tobago, avant de devenir expert-comptable, présidente et directrice de plusieurs conseils d’administration, tant dans le secteur privé que public, et présidente de commissions mixtes au parlement, ce qui m’a donné une perspective particulière assez rare chez les femmes. Je suis certaine que toutes ces expériences m’ont faite telles que je suis aujourd’hui et modelé ma façon de penser et de prendre des décisions. En fait, il m’a plusieurs fois été dit que je ne suis pas censée penser comme je le fais, car je suis une femme. Alors, oui, je dirais que j’ai effectivement apporté une perspective nouvelle liée à ma condition de femme.  

iKNOW Politics: Comment le soutien d’autres femmes vous a-t-il aidée dans votre travail?

D’autres femmes dans ma vie, ma mère, mes sœurs et des amies proches m’ont encouragée à suivre ma voie. Je me rappelle d’ailleurs très bien le moment où , à l’âge de 15 ans environ, ma mère m’a dit que je pourrais devenir tout ce que je voulais. J’ai suivi son conseil.

iKNOW Politics: Pensez-vous que le fait d’appartenir à un réseau mondial tel qu’iKNOW Politics puisse aider les femmes à tous les échelons de la politique, et leurs partisans, à réussir leur carrière et à mobiliser le public autour de questions d’intérêt commun?

Appartenir à iKNOW Politics doit aider les femmes à tous les échelons de la politique. Malheureusement, ce réseau est de création récente, mais chaque chose vient en son temps. Dans le monde d’aujourd’hui, la majeure partie des représentants et des dirigeants politiques a accès à Internet et si nous faisons tous le nécessaire à l’échelon national, de plus en plus de femmes en entendront parler. Je voudrais féliciter le GOPAC et ses dirigeants d’avoir proposé cette initiative à ses membres et suis convaincue que les hommes membres du GOPAC proposeront aussi à leurs collègues parlementaires femmes de leurs pays respectifs d’y participer. Des groupes de personnes éclairées verront alors le jour et se développeront, ce qui donnera davantage de forces aux parlementaires et nous donnera une vision plus vaste des perspectives qui s’offrent aux femmes dans le monde entier.

iKNOW Politics: Si vous deviez émettre une recommandation, quel conseil donneriez-vous aux membres d’iKNOW Politics, particulièrement les femmes candidates, faisant une carrière politique?

S’informer des modèles parlementaires en usage dans le monde. Les comparer au modèle dans lequel on s’inscrit. Se poser la question de savoir si le modèle dans lequel on agit nous offre à nous et à nos concitoyens le système démocratique le plus favorable possible à la participation populaire, à la discussion ouverte et franche, à la transparence et au sens de responsabilités, au contrôle de l’exécutif et à la mise en œuvre des lois que l’on contribue à faire adopter. Si votre système ne va pas dans le sens du renforcement de la démocratie, n’ayez pas peur de vous engager en ce sens, car vous serez alors certaine d’avoir fait de votre mieux pour veiller à ce que votre gouvernement n’agisse pas dans son propre intérêt, mais dans l’intérêt du pays. Nous devons œuvrer en faveur de l’ouverture du gouvernement, de la transparence, du sens des responsabilités, de l’équité dans la répartition, du rendement de nos investissements et d’une application efficace de la loi.

Le peuple élit le gouvernement et les parlementaires. Le parlement approuve le budget, adopte de nouvelles lois ou modifie les anciennes et sa troisième fonction importante consiste à contrôler le travail réalisé par le gouvernement au nom des électeurs. Le rôle que joue le parlement à l’égard du peuple est important et il est donc essentiel que seules des personnes intègres passionnées par l’amélioration de la vie de leurs concitoyens puissent briguer des responsabilités aussi importantes.

 

Date de l'entretien
Sénatrice indépendante de Trinidad et Tobago