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Sexisme sous la Coupole? Quatre élues suisses témoignent

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Sexisme sous la Coupole? Quatre élues suisses témoignent

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Alors que Donald Trump tente encore de minimiser ses propos crus sur les femmes, l’indignation s’étend jusque sous la Coupole fédérale. Il n’y a pas qu’aux Etats-Unis que certaines femmes sont traitées comme des proies sexuelles. Dans la presse dominicale, de SonntagsBlick à la NZZ am Sonntag, la parole était donnée hier aux politiciennes, qui racontent la face cachée d’une vie publique pas toujours très rose. «A quand des photos de toi nue?» Voilà le genre de commentaires qu’a déjà reçus Mattea Meyer (PS/ZH), jeune conseillère nationale. Sa collègue Yvonne Feri (PS/AG) rapporte, quant à elle, les propos d’un journaliste lui ayant demandé si elle voulait coucher avec lui. «Des avances, j’en ai eu de conseillers nationaux mais aussi de sénateurs», admet Claudine Esseiva (PLR/BE). A ces exemples de sexisme évident, il en existe bien davantage de sibyllins. Les remarques sur les tenues vestimentaires, les commentaires sur le fait d’être en couple ou la garde des enfants. C’est en permanence que les femmes politiques doivent se justifier.

Deux événements expliquent cette levée de boucliers. Les élections américaines d’abord. Les propos sexistes du candidat à la présidentielle Donald Trump ont donné lieu à une avalanche de réactions sur les réseaux sociaux américains sous le hashtag #not­okay. Des réactions de femmes mais aussi d’hommes choqués par la légèreté avec laquelle l’homme d’affaires s’est dédouané.

En Suisse, ce sont les déclarations d’Andrea Geissbühler (UDC/BE) qui suscitent l’indignation. Après que la conseillère nationale a laissé entendre que les victimes de viol étaient coresponsables, des vagues de témoignages de femmes confrontées à des agressions sexistes ont aussi vu le jour sur les réseaux sociaux sous le hashtag #schweizeraufschrei. Des témoignages avant tout d’élues alémaniques. Quatre politiciennes romandes ont cependant accepté de nous raconter leur vécu.

 

Des politiciennes de tous les partis racontent leurs expériences du sexisme

Lisa Mazzone (Les Verts)

«Le sexisme? Il est hyperprésent en politique.» Lisa Mazzone (Les Verts/GE) n’a aucune peine à parler de ce fléau qu’elle définit comme insidieux. «Il y a parfois des allusions, des gestes, des effleurements ou des attitudes pseudo-affectueuses qui mettent mal à l’aise.» Et la conseillère nationale de raconter qu’il est parfois difficile de se promener dans la salle des pas perdus sans se faire «reluquer».

Lorsqu’elle s’exprime à la tribune, elle ressent aussi une forme d’intimidation. «On cherche à vous déstabiliser. Lorsque j’étais au Grand Conseil genevois, je me souviens d’un collègue qui m’avait dit que je ferais mieux de me taire puisque je ne comprenais rien.»

Cette attitude est, selon elle, davantage liée à son sexe qu’à son jeune âge. «Quand j’en parle avec Mathias Reynard (PS/VS), qui était lui aussi le plus jeune élu sous la Coupole, j’ai l’impression que les choses ont été plus faciles pour lui.» Lisa Mazzone tacle aussi les médias: «Ils ont une responsabilité lorsqu’ils dissertent sur leurs tenues et remettent systématiquement en cause le charisme des élues féminines. Elles sont tout autant légitimes que les hommes.»

Liliane Maury Pasquier (PS)

«Ça fait tellement longtemps que je fais de la politique que j’ai fini par faire le dos rond.» La sénatrice Liliane Maury Pasquier (PS/GE) s’excuse presque de ne plus avoir en tête d’exemples précis de sexisme. «Les remarques ont souvent porté sur mon métier. Une sage-femme est-elle capable de présider le Conseil national? Comme si cela faisait de moi quelqu’un de moins capable.

Il s’agit pourtant d’une formation supérieure. Mais, comme c’est une profession typiquement féminine, elle est sous-évaluée.» Les commentaires aussi sur le physique. «Ce sont souvent des remarques positives, mais vous ne direz jamais à un homme: «Tiens, ce costume vous va mieux en vrai qu’à la télé.» Celle qui avait poussé un coup de gueule sur la place des femmes dans les médias note-t-elle une amélioration? Pas vraiment.

«Ouvrez un journal, allumez votre poste de télévision. Les femmes sont clairement sous-représentées. Il y a 30% d’élues sous la Coupole. Ce pourcentage, vous ne le retrouvez jamais dans les médias. D’ailleurs, quand on interroge des femmes, c’est toujours sur les mêmes thèmes: social, santé, inégalité. C’est ça aussi le sexisme ordinaire.»

Isabelle Moret (PLR)

«Au parlement, c’est une ambiance de caserne.» Isabelle Moret (PLR/VD) plante le décor. «Quand la plaisanterie est générale, c’est de l’humour. Quand elle vise une femme en particulier, c’est du sexisme.» En a-t-elle été victime? La Vaudoise raconte un débat politique où son adversaire – président d’un parti de gauche – avait balayé l’un de ses arguments politiques par un condescendant: «Ah, mais quand c’est dit de manière si charmante.»

«Je n’ai rien dit sur le moment, mais c’était purement sexiste.» D’un point de vue général, elle note qu’il est plus difficile pour une politicienne de se faire reconnaître. «Lorsque vous êtes un élu masculin, vous accédez plus facilement à la présidence d’organisations ou d’associations.» Elle note toutefois une amélioration dans les médias: «Les commentaires sur le physique sont moins nombreux, mais il a fallu des réactions.»

Tel n’est pas le cas des réseaux sociaux. «Il y a une telle violence à l’égard des femmes que je ne comprends pas ceux qui gèrent ces sites. Ne pas intervenir, c’est cosigner ce qui est dit. C’est grave quand il s’agit de plates-formes officielles pour des campagnes ou des partis.»

Céline Amaudruz (UDC)

«Je n’ai jamais ressenti de sexisme au sein de l’UDC.» On présente souvent son parti comme un repaire de machos, pourtant Céline Amaudruz (UDC/GE) affirme s’y sentir respectée. «Il n’y a jamais eu de propos déplacés ni de soucis pour rentrer le soir après une assemblée.» Et le sexisme en politique en général? «Lors de débats, les gens sont assez malins pour ne pas vous attaquer sur votre physique. Dans les couloirs, hors caméras, je ne suis pas dupe. Je sais qu’il y a des remarques de type «la blonde qui ne comprend rien». Il y a parfois quelque chose d’hypocrite, aussi de la part de journalistes qui minimisent vos propos.»

Au sexisme, elle ajoute un autre fléau: la jalousie. «Souvenez-vous de Karin Keller-Sutter. Si elle n’a pas été élue, c’est parce que les femmes socialistes ne l’ont pas soutenue. Ce n’est pas ainsi qu’on fait avancer la cause féminine.» Dans la polémique liée aux propos de sa collègue Andrea Geissbühler, elle rétorque: «Celles qui se disent outrées sont les mêmes qui refusent de durcir les sanctions contre les violeurs.» (TDG)

Source: TDG Suisse

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Alors que Donald Trump tente encore de minimiser ses propos crus sur les femmes, l’indignation s’étend jusque sous la Coupole fédérale. Il n’y a pas qu’aux Etats-Unis que certaines femmes sont traitées comme des proies sexuelles. Dans la presse dominicale, de SonntagsBlick à la NZZ am Sonntag, la parole était donnée hier aux politiciennes, qui racontent la face cachée d’une vie publique pas toujours très rose. «A quand des photos de toi nue?» Voilà le genre de commentaires qu’a déjà reçus Mattea Meyer (PS/ZH), jeune conseillère nationale. Sa collègue Yvonne Feri (PS/AG) rapporte, quant à elle, les propos d’un journaliste lui ayant demandé si elle voulait coucher avec lui. «Des avances, j’en ai eu de conseillers nationaux mais aussi de sénateurs», admet Claudine Esseiva (PLR/BE). A ces exemples de sexisme évident, il en existe bien davantage de sibyllins. Les remarques sur les tenues vestimentaires, les commentaires sur le fait d’être en couple ou la garde des enfants. C’est en permanence que les femmes politiques doivent se justifier.

Deux événements expliquent cette levée de boucliers. Les élections américaines d’abord. Les propos sexistes du candidat à la présidentielle Donald Trump ont donné lieu à une avalanche de réactions sur les réseaux sociaux américains sous le hashtag #not­okay. Des réactions de femmes mais aussi d’hommes choqués par la légèreté avec laquelle l’homme d’affaires s’est dédouané.

En Suisse, ce sont les déclarations d’Andrea Geissbühler (UDC/BE) qui suscitent l’indignation. Après que la conseillère nationale a laissé entendre que les victimes de viol étaient coresponsables, des vagues de témoignages de femmes confrontées à des agressions sexistes ont aussi vu le jour sur les réseaux sociaux sous le hashtag #schweizeraufschrei. Des témoignages avant tout d’élues alémaniques. Quatre politiciennes romandes ont cependant accepté de nous raconter leur vécu.

 

Des politiciennes de tous les partis racontent leurs expériences du sexisme

Lisa Mazzone (Les Verts)

«Le sexisme? Il est hyperprésent en politique.» Lisa Mazzone (Les Verts/GE) n’a aucune peine à parler de ce fléau qu’elle définit comme insidieux. «Il y a parfois des allusions, des gestes, des effleurements ou des attitudes pseudo-affectueuses qui mettent mal à l’aise.» Et la conseillère nationale de raconter qu’il est parfois difficile de se promener dans la salle des pas perdus sans se faire «reluquer».

Lorsqu’elle s’exprime à la tribune, elle ressent aussi une forme d’intimidation. «On cherche à vous déstabiliser. Lorsque j’étais au Grand Conseil genevois, je me souviens d’un collègue qui m’avait dit que je ferais mieux de me taire puisque je ne comprenais rien.»

Cette attitude est, selon elle, davantage liée à son sexe qu’à son jeune âge. «Quand j’en parle avec Mathias Reynard (PS/VS), qui était lui aussi le plus jeune élu sous la Coupole, j’ai l’impression que les choses ont été plus faciles pour lui.» Lisa Mazzone tacle aussi les médias: «Ils ont une responsabilité lorsqu’ils dissertent sur leurs tenues et remettent systématiquement en cause le charisme des élues féminines. Elles sont tout autant légitimes que les hommes.»

Liliane Maury Pasquier (PS)

«Ça fait tellement longtemps que je fais de la politique que j’ai fini par faire le dos rond.» La sénatrice Liliane Maury Pasquier (PS/GE) s’excuse presque de ne plus avoir en tête d’exemples précis de sexisme. «Les remarques ont souvent porté sur mon métier. Une sage-femme est-elle capable de présider le Conseil national? Comme si cela faisait de moi quelqu’un de moins capable.

Il s’agit pourtant d’une formation supérieure. Mais, comme c’est une profession typiquement féminine, elle est sous-évaluée.» Les commentaires aussi sur le physique. «Ce sont souvent des remarques positives, mais vous ne direz jamais à un homme: «Tiens, ce costume vous va mieux en vrai qu’à la télé.» Celle qui avait poussé un coup de gueule sur la place des femmes dans les médias note-t-elle une amélioration? Pas vraiment.

«Ouvrez un journal, allumez votre poste de télévision. Les femmes sont clairement sous-représentées. Il y a 30% d’élues sous la Coupole. Ce pourcentage, vous ne le retrouvez jamais dans les médias. D’ailleurs, quand on interroge des femmes, c’est toujours sur les mêmes thèmes: social, santé, inégalité. C’est ça aussi le sexisme ordinaire.»

Isabelle Moret (PLR)

«Au parlement, c’est une ambiance de caserne.» Isabelle Moret (PLR/VD) plante le décor. «Quand la plaisanterie est générale, c’est de l’humour. Quand elle vise une femme en particulier, c’est du sexisme.» En a-t-elle été victime? La Vaudoise raconte un débat politique où son adversaire – président d’un parti de gauche – avait balayé l’un de ses arguments politiques par un condescendant: «Ah, mais quand c’est dit de manière si charmante.»

«Je n’ai rien dit sur le moment, mais c’était purement sexiste.» D’un point de vue général, elle note qu’il est plus difficile pour une politicienne de se faire reconnaître. «Lorsque vous êtes un élu masculin, vous accédez plus facilement à la présidence d’organisations ou d’associations.» Elle note toutefois une amélioration dans les médias: «Les commentaires sur le physique sont moins nombreux, mais il a fallu des réactions.»

Tel n’est pas le cas des réseaux sociaux. «Il y a une telle violence à l’égard des femmes que je ne comprends pas ceux qui gèrent ces sites. Ne pas intervenir, c’est cosigner ce qui est dit. C’est grave quand il s’agit de plates-formes officielles pour des campagnes ou des partis.»

Céline Amaudruz (UDC)

«Je n’ai jamais ressenti de sexisme au sein de l’UDC.» On présente souvent son parti comme un repaire de machos, pourtant Céline Amaudruz (UDC/GE) affirme s’y sentir respectée. «Il n’y a jamais eu de propos déplacés ni de soucis pour rentrer le soir après une assemblée.» Et le sexisme en politique en général? «Lors de débats, les gens sont assez malins pour ne pas vous attaquer sur votre physique. Dans les couloirs, hors caméras, je ne suis pas dupe. Je sais qu’il y a des remarques de type «la blonde qui ne comprend rien». Il y a parfois quelque chose d’hypocrite, aussi de la part de journalistes qui minimisent vos propos.»

Au sexisme, elle ajoute un autre fléau: la jalousie. «Souvenez-vous de Karin Keller-Sutter. Si elle n’a pas été élue, c’est parce que les femmes socialistes ne l’ont pas soutenue. Ce n’est pas ainsi qu’on fait avancer la cause féminine.» Dans la polémique liée aux propos de sa collègue Andrea Geissbühler, elle rétorque: «Celles qui se disent outrées sont les mêmes qui refusent de durcir les sanctions contre les violeurs.» (TDG)

Source: TDG Suisse

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