LA SANTé ET Les femmes La réaLiTé d’aujourd’hui LE programmE dE dEmain LA SANTéET Les femmes La réaLiTé d’aujourd’hui LE programmE dE dEmain Catalogage à la source: Bibliothèque de l’OMS Les femmes et la santé : la réalité d’aujourd’hui le programme de demain. 1.Santé féminine. 2.Service santé réservé aux femmes. 3.Evénement biographique. 4.Indicateur état sanitaire. 5.Justice sociale. 6.Identité masculin féminin. 7.Politique gouvernementale. 8.Santé mondiale. 9.Pays en développement. I.Organisation mondiale de la Santé. ISBN 978 92 4 256385 6 (NLM classification: WA 309) © Organisation mondiale de la Santé 2009 Tous droits réservés. Il est possible de se procurer les publications de l’Organisation mondiale de la Santé auprès des Editions de l’OMS, Organisation mondiale de la Santé, 20 avenue Appia, 1211 Genève 27 (Suisse) (téléphone : +41 22 791 3264 ; télécopie : +41 22 791 4857 ; adresse électronique : bookorders@who.int). 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Sauf erreur ou omission, une majuscule initiale indique qu’il s’agit d’un nom déposé. L’Organisation mondiale de la Santé a pris toutes les précautions raisonnables pour vérifier les informations contenues dans la présente publication. Toutefois, le matériel publié est diffusé sans aucune garantie, expresse ou implicite. La responsabilité de l’interprétation et de l’utilisation dudit matériel incombe au lecteur. En aucun cas, l’Organisation mondiale de la Santé ne saurait être tenue responsable des préjudices subis du fait de son utilisation. Remerciements Ce rapport a été rédigé sous la direction des Sous-Directeurs généraux Tim Evans et Daisy Mafubelu. L’équipe de rédaction était composée, par ordre alphabétique, de Carla AbouZahr, Isabelle de Zoysa et Claudia García Moreno. Ties Boerma, Andrew Cassels, Susan Holck, Colin Mathers et Thomson Prentice ont apporté de précieuses contributions. Jonathan Abrahams, Fiona Adshead, Adelio Antunes, Timothy Armstrong, Gini Arnold, Parijat Baijal, Anand Balachandran, John Beard, Douglas Bettcher, Michel Beusenberg, Paul Bloem, Monika Blössner, Sophie Bonjour, Cynthia Boschi-Pinto, Francesco Branca, Nathalie Broutet, Marie- Noel Brune, Tony Burton, Alexander Butchart, Txema Calleja, Diarmid Campbell- Lundrum, Guy Carrin, Andrew Cassels, Somnath Chatterji, Rudi Coninx, Melanie Cowan, Catherine d’Arcanques, Mercedes de Onis, Bruce Dick, Tarun Dua, Varatharajan Durairaj, David Evans, Jane Ferguson, Daniela Fuhr, Lisa Garbus, Peter Ghys, Philip Glaziou, Fiona Gore, Rifat Hossein, Ahmadreza Hosseinpoor, Mie Inoue, Véronique Joseph, Mary Kay Kindhauser, Evelyn Kortum, Tanya Kuchenmuller, Jennifer Lee, Sun Goo Lee, Wim Van Lerberghe, Doris Ma Fat, José Martines, Elizabeth Mason, Pamela Sabina Mbabazi, Christopher Mikton, Charles Mock, Nirmala Naidoo, Francis Ndowa, Joerdis Ott, Heather Papowitz, Razia Pendse, Judy Polsky, Yongyuth Pongsupap, Vladimir Poznyak, Annette Prüss-Ustün, Eva Rehfuess, Chen Reis, Leanne Riley, Lisa Rogers, Ritu Sadana, Shekhar Saxena, Lale Say, George Schmid, Archana Narendra Shah, Iqbal Shah, Ferid Shannoun, Kurup Anand Sivasankara, Amani Siyam, Yves Souteyrand, Marcus Stalhofer, Claudia Stein, Gretchen Stevens, Joanna Tempowski, Shyam Thapa, Andreas Ullrich, Constanza Vallenas, Annette Verster, Susan Wilburn, Sachiyo Yoshida et Dongbao Yu ont apporté leur concours à ce rapport. Mahmoud Fatallah, Sharon Fonn, Adrienne Germain, Piroska Ostlin, Sundari Ravindran, Sheila Tlou et Tomris Türmen ont formulé des observations utiles. Nous remercions chaleureusement le département des politiques de santé de la faculté de médecine de Harvard (Robert Jin, Ronald C. Kessler et Nancy Sampson) pour son analyse des données sur les femmes et les troubles mentaux. Gary Humphries et Diane Summers ont également collaboré à la rédaction de ce rapport. Le présent document a été révisé par David Bramley et Diana Hopkins a assuré la relecture des épreuves. Steve Ewart et Christophe Grangier étaient chargés de la conception graphique. Gael Kernen a préparé le version électronique. Sue Piccolo a apporté un appui administratif. L’OMS tient à remercier l’Aspen Institute pour le soutien financier donné à la production et à la diffusion de ce rapport dans le cadre de l’Initiative Realizing Rights: Ethical Globalization. Imprimé en Suisse Avant-propos v LES fEmmES Introduction vii ET Résumé d’orientation ix La SanTé Chapitre 1 Comprendre la santé des femmes dans le monde actuel 1 Les femmes dans le monde 4 Augmenter l’espérance de vie 5 La transition sanitaire 6 Les inégalités socio-économiques nuisent à la santé 9 Les inégalités entre les sexes affectent la santé des femmes 10 Les femmes au coeur des conflits et des crises 11 Les femmes et le système de santé 12 Conclusion 13 Chapitre 2 La fillette 17 Des décès d’enfants et de nourrissons toujours trop nombreux 19 Les disparités sanitaires entre les sexes 21 Mutilations sexuelles féminines 23 Abus et maltraitance 23 Conclusion 23 Chapitre 3 L’adolescente 27 Une période synonyme de bonne santé mais aussi de risques 29 Puberté et début de la vie sexuelle 30 Grossesse adolescente 31 Infections sexuellement transmissibles 31 Consommation de substances 32 Mauvaise alimentation et sédentarité 32 La santé mentale pendant l’adolescence 33 Conclusion 33 Chapitre 4 La femme adulte : les années de procréation 37 La santé des femmes au cours des années de procréation 39 La santé maternelle 40 Les femmes et le VIH/sida 44 Infections sexuellement transmissibles 45 Cancer du col de l’utérus 46 Stérilité 46 Conclusion 47 Chapitre 5 La femme adulte 49 Mortalité et charge de morbidité 51 Les femmes, la dépression et le suicide 53 Facteurs de risque et maladies chroniques 54 Violences 55 Maladies et utilisation des services de santé 56 Conclusion 57 Chapitre 6 La femme âgée 59 Les femmes et le vieillissement 61 L’influence des facteurs socio-économiques sur la santé de la femme âgée 62 À quels problèmes de santé la femme âgée est-elle confrontée ? 62 Prise en charge des incapacités : une question de prévention et de soins 65 Prise en charge de la femme âgée 67 Conclusion 68 Chapitre 7 Implications en matière de politiques 71 Leadership 73 Des services de santé réactifs 75 Couverture universelle 77 Politiques publiques 79 Suivre les progrès 81 Conclusion 85 iii Avant-propos Lorsque j’ai pris mes fonctions en 2007, j’ai demandé à être jugée en fonction des résultats que j’obtiendrais, mesurés en termes de santé des femmes et des populations africaines. Mon engagement enversces populationss’inscrit dansla continuité del’actionmenée depuis longtemps par l’OMS pour répondre aux besoins des plus démunis et corriger les inégalités de santé et leurs déterminants. Les objectifs du Millénaire pour le développement et les autres engagements internationaux se sont principalement concentrés sur les droits et besoins des femmes. Avec la crise financière et le ralentissement économique actuels, il apparaît encore plus urgent de traiter ces questions ; protéger et promouvoir la santé des femmes est essentiel à la santé et au développement, pour les citoyens d’aujourd’hui comme pour ceux des générations futures. Ce rapport examine les données disponibles sur les problèmes sanitaires qui touchent plus particulièrement les filles et les femmes au fil de leur existence. Malgré les importants progrès réalisés au cours des deux dernières décennies, les sociétés continuent de délaisser les femmes à des moments décisifs de leurs vies. Ce manque de soutien est plus notable encore dans les pays pauvres et chez les femmes les plus pauvres, tous pays confondus. Les avancées récentes n’ont pas profité à tous dans la même mesure et de trop nombreuses filles et femmes ne parviennent toujours pas à leur plein potentiel, du fait d’inégalités persistantes entre les sexes et aux niveaux social et sanitaire et de déficiences du système de santé. Ce rapport ne présente pas une analyse exhaustive de l’état de la santé des femmes dans le monde car les données et les informations disponibles sont trop fragmentaires. S’il constate le manque de statistiques sur certaines questions de santé déterminantes pour les filles et les femmes, le présent document rassemble néanmoins les connaissances actuelles. Il précise également les domaines où il apparaît nécessaire de recueillir de nouvelles données, de collecter et d’analyser celles disponibles et de mener des recherches pour combler les principales lacunes. J’espère que le rapport que je présente ici permettra d’accélérer les concertations aux niveaux national, régional et mondial, servira de base aux actions menées par les pays, les institutions et les partenaires de développement et mettra en évidence des stratégies innovantes qui aboutiront à de réelles améliorations pour la santé et la vie des filles et des femmes à travers le monde. Dr Margaret Chan Directeur général Organisation mondiale de la Santé Introduction Ce rapport utilise les données actuellement disponibles pour dresser le bilan de la santé des filles et des femmes à travers le monde et attirer l’attention sur les conséquences et les coûts d’une mauvaise prise en charge de leurs problèmes sanitaires au moment où elles en ont besoin. Il est organisé selon les étapes de la vie particulièrement importantes du point de vue de la santé : petite enfance (de la naissance à neuf ans), adolescence (de 10 à 19 ans), âge adulte (20 à 59 ans et femmes en âge de procréer de 15 à 44 ans) et personnes âgées (à partir de 60 ans)a. Même si de nombreux facteurs influençant la santé de la petite fille, de l’adolescente, de l’adulte et de la femme âgée ne coïncident pas exactement avec ces différentes phases, cet angle d’analyse permet une compréhension approfondie de la façon dont les interventions menées lors de l’enfance, de l’adolescence, de la période de procréation et au-delà, influent sur la santé ultérieure des femmes concernées et sur celle des générations suivantes. Ce rapport se fonde en grande partie sur les bases de données et les publications de l’OMS et d’autres institutions des Nations Unies. Les lecteurs souhaitant davantage d’informations sur la collecte des données et les méthodes d’analyse sont invités à les consulter. Les principales sources sont précisées dans le texte. Même si ce rapport réunit une masse considérable d’informations, il ne prétend pas être exhaustif, soulignant au contraire combien les connaissances sont lacunaires en matière de santé des femmes. Le présent document compare parfois la situation des hommes et les femmes, mais il cherche essentiellement à mettre en avant les disparités liées aux contextes dont souffrent les filles et les femmes sur le plan de la santé et des soins. Il met en évidence l’interaction entre les déterminants biologiques et sociaux de la santé des femmes et note que l’inégalité entre les sexes augmente l’exposition et la vulnérabilité aux risques, limite l’accès aux soins et aux informations, et influence les résultats sur le plan de l’état de santé. Le rapport rappelle que les femmes apportent de multiples contributions à la société par leur rôle de production et de procréation, de consommatrices, et celui, tout aussi important, de prestataire de soins. Compte tenu de ces éléments, il appelle à des réformes des soins de santé primaires visant à ce que les systèmes de santé répondent mieux aux besoins des filles et des femmes. a Ces catégories ont été établies sur la base de problématiques et de besoins sanitaires et ne correspondent pas forcément aux définitions utilisées par les Nations Unies. résumé d’orientation réSumé d’oriEnTaTion Tableau d’ensemble Ce rapport concerne les femmes et la santé, c’est-à-dire les besoins des femmes en matière de santé mais aussi leur contribution à la santé des sociétés. La santé des femmes fait partie depuis longtemps des préoccupations de l’OMS mais, aujourd’hui, elle est devenue une priorité. Ce rapport explique pourquoi. Sur la base des données actuellement disponibles, il dresse un inventaire de ce que nous savons maintenant sur la santé des femmes tout au long de la vie et dans les différentes régions du monde. Mettant en évidence des questions essentielles, dont certaines nous sont familières mais d’autres devraient beaucoup plus retenir l’attention, ce texte recense les occasions qui s’offrent de marquer des progrès plus rapides. Il indique dans quels domaines des informations plus fournies, combinées à un dialogue politique aux échelons national, régional et international, pourraient conduire à des démarches plus efficaces. Il démontre l’intérêt des réformes des soins de santé primaires évoquées dans le Rapport sur la santé dans le monde, 2008 – Les soins de santé primaires : maintenant plus que jamais, mettant en particulier l’accent sur le besoin urgent d’un leadership politique et institutionnel plus cohérent et sur la nécessité de parler davantage de la santé des femmes et de mobiliser des res- sources suffisantes si nous voulons, au cours des années à venir, sauver davantage de vies et améliorer la santé des fillettes et des femmes. Ce rapport expose enfin les incidences à prévoir du point de vue de la collecte, de l’analyse et de la diffusion de données. Le choix, fait dans ce rapport, d’envisager les problèmes de santé des femmes sur toute la durée de la vie permet de mieux comprendre comment des interventions dans l’enfance, au cours de l’adolescence, pendant les années où la femme est en âge de procréer et ensuite peuvent avoir un impact plus tard et d’une génération sur l’autre. Il met aussi en évidence les interactions entre les déterminants biologiques et sociaux de la santé des femmes et montre comment les inégalités entre les sexes expo- sent davantage les femmes et les rendent plus vulnérables aux facteurs de risque, limitent leur accès aux soins et aux informations sanitaires et ont un impact sur leur santé. Si ce rapport demande que l’on accorde davantage d’attention aux problèmes de santé propres aux femmes, tels le cancer du col de l’utérus et les risques associés à la grossesse et à l’accouchement, il montre aussi que les besoins des femmes en matière de santé ne concernent pas simplement la sexualité et la reproduction. Le rapport expose également les conséquences à attendre et ce qu’il en coûte si les problèmes de santé des femmes ne sont pas pris en charge au bon moment. Dans un monde dont la population vieillit, il s’agit de prévenir et gérer les facteurs de risque d’aujourd’hui pour empêcher qu’ils conduisent aux pathologies chroniques de demain. Le fait d’envisager la santé des femmes sur toute la durée de la vie révèle l’importance de leurs contributions multiples à la société – au travail et en tant que mères, en tant que consommatrices et, tout aussi important, que dispensatrices de soins de santé. Face à cette évidence, les auteurs du rapport demandent que soient engagées des réformes garantissant que les femmes deviennent des agents essentiels de la fourniture de soins de santé et participent de l’intérieur à la conception, à la gestion et à la fourniture des soins. Principales conclusions 1. Des inégalités répandues et persistantes Disparités entre femmes et hommes Alors que les femmes et les hommes sont confrontés à des problèmes similaires dans le domaine de la santé, les différences entre eux sont telles qu’il faut accorder une attention toute particulière à la santé des femmes. Les femmes vivent généralement plus longtemps que les hommes en raison d’avantages biologiques et comportementaux. Dans certains contextes toutefois, et notamment dans certaines parties de l’Asie, ces avantages sont annulés par les discriminations sexistes dont les femmes sont victimes, à un point tel que leur espérance de vie à la naissance est inférieure ou égale à celle des hommes. LES fEmmES ET La SanTé Par ailleurs, si les femmes vivent plus longtemps, ce n’est pas nécessairement en bonne santé. Il y a des états dont seules les femmes font l’expérience et dont elles seules supportent les conséquences potentiellement négatives. Certains de ces états, comme la grossesse et l’accouchement, ne sont pas des maladies, mais des processus biologiques et sociaux qui comportent des risques pour la santé et exigent des soins particuliers. Certains problèmes de santé touchent les femmes comme les hommes mais ont un impact plus grand ou différent sur les femmes et demandent de ce fait des réponses adaptées aux besoins des femmes. D’autres encore touchent les femmes et les hommes plus ou moins à égalité, mais les femmes ont plus de difficultés à accéder aux soins dont elles ont besoin. De plus, les inégalités liées au sexe, par exemple en matière d’éducation, de revenu et d’emploi, privent les filles et les femmes de moyens de protéger leur santé. Différences entre les pays riches et les pays pauvres Si les problèmes de santé des femmes présentent bien des points communs partout dans le monde, on relève aussi des différences marquées liées aux conditions dans lesquelles elles vivent. A tout âge, les femmes des pays à revenu élevé ont une espérance de vie plus longue et un risque moins grand de maladie et de mortalité prématurée que les femmes des pays à faible revenu. Dans les pays riches, les taux de mortalité chez les enfants et les jeunes femmes sont très bas et les décès surviennent pour la plupart après 60 ans. Dans les pays pauvres, la situation est toute différente : la population est en moyenne plus jeune, les taux de mortalité chez les enfants sont plus élevés et la plupart des décès féminins frappent des fillettes, des adolescentes et de jeunes adultes. La différence la plus frappante entre les pays riches et les pays pauvres concerne la mortalité maternelle : 99 % des plus des 500 000 décès maternels enregistrés chaque année surviennent dans des pays en développement. Naturellement, les taux les plus élevés de morbidité et de mortalité, en particulier chez les femmes en âge de procréer, sont observés dans les pays les plus pauvres et souvent institutionnellement les plus démunis, notamment dans ceux en proie à des crises humanitaires. Inégalités à l’intérieur des pays Dans un même pays, la santé des fillettes et des femmes est fortement influencée par des facteurs sociaux et économiques comme l’accès à l’éducation, le degré de prospérité de la famille et le lieu de résidence. Dans presque tous les pays, les fillettes et les femmes qui vivent dans des familles prospères sont moins exposées au risque de mortalité et ont un meilleur accès aux services de santé que celles qui vivent dans les familles les plus pauvres. Ces différences ne concernent pas uniquement les pays en développement, mais s’observent aussi dans le monde développé. 2. La sexualité et la procréation jouent un rôle essentiel dans la santé des femmes La santé des femmes pendant leurs années fécondes (entre 15 et 49 ans) est importante non seulement pour les intéressées, mais aussi pour la génération suivante. Les problèmes de santé observés à ces âges sont pour beaucoup propres aux fillettes et aux femmes. Ainsi, les complications de la grossesse et de l’accouchement sont la première cause de mortalité chez les jeunes femmes entre 15 et 19 ans dans les pays en développement. Au niveau mondial, le VIH/sida est la première cause de mortalité chez les femmes en âge de procréer. Les fillettes et les femmes sont particulièrement vulnérables à l’infection par le VIH en raison d’une combinaison de facteurs biologiques et d’inégalités liées au sexe, en particulier dans les sociétés où les femmes n’ont guère de possibilités de s’informer sur le VIH, de se protéger et d’obtenir de leurs partenaires d’être moins exposées. Dans les pays à revenu faible ou intermédiaire et dans ce groupe d’âge, les principaux facteurs de risque de décès et d’incapacités sont l’absence de contraception et les rapports sexuels non protégés. Ces conditions ont pour réSumé d’oriEnTaTion résultat des grossesses non désirées, des avortements à risque, des complications de la grossesse et de l’accouchement et des maladies sexuellement transmissibles, dont l’infection à VIH. La violence fait aussi peser un risque supplémentaire important sur la santé sexuelle et génésique des femmes et peut aussi provoquer des cas de maladies mentales et d’autres affections chroniques. 3. Tribut prélevé par les maladies chroniques, les traumatismes et les cas de maladies mentales Si l’on sait généralement que les femmes ont des besoins spécifiques dans le domaine de la santé sexuelle et génésique, elles sont aussi confrontées à d’autres problèmes importants. Les accidents de la circulation figurent parmi les cinq premières causes de mortalité chez les adolescentes et les femmes en âge de procréer dans toutes les Régions de l’OMS, à l’exception de celle de l’Asie du Sud-Est, où les brûlures sont la troisième cause de mortalité féminine. Si beaucoup sont dues à des accidents lors de la cuisson des aliments, certaines sont le résultat d’homicides ou de suicides, souvent associés aux violences infligées par un partenaire intime. Il faudrait multiplier les études pour tenter de mieux comprendre les causes de ces décès et élaborer des stratégies efficaces de prévention. Le suicide est l’une des principales causes de décès chez les femmes âgées de 20 à 59 ans par- tout dans le monde et la deuxième cause de décès dans les pays à revenu faible ou intermédiaire de la Région OMS du Pacifique occidental. Les comportements suicidaires représentent un problème majeur de santé publique chez les fillettes et les femmes dans le monde entier. Les problèmes de santé mentale, en particulier la dépression, sont des causes importantes d’incapacité chez les femmes de tous âges. Si une santé mentale précaire a des causes variables selon les individus, le statut inférieur de la femme dans la société, la charge de travail et les violences qu’elle subit sont certainement des facteurs aggravants. Dans les pays à revenu faible et intermédiaire comme dans les pays à revenu élevé, les maladies cardio-vasculaires et les accidents vasculaires cérébraux sont une cause majeure de décès et d’affections chroniques chez les femmes de plus de 60 ans. Autre cause majeure de mortalité et d’incapacité, la bronchopneumonie chronique obstructive frappe les femmes exposées à la fumée et à la pollution de l’air à l’intérieur des habitations du fait de leurs tâches ménagères. Chez de nombreuses femmes, le vieillissement s’accompagne d’une perte de la vision et, chaque année, plus de 2.5 millions de femmes âgées deviennent aveugles. Ces incapacités pourraient en grande partie leur être évitées si elles avaient accès aux soins nécessaires et notamment au traitement chirurgical de la cataracte. Dans les pays à faible revenu, le trachome est une cause importante mais évitable de cécité qui touche en particulier les femmes. 4. Un bon départ pour toutes les filles est essentiel pour la santé des femmes Beaucoup des problèmes de santé qui frappent les femmes adultes ont leur origine dans l’enfance Une bonne alimentation est un déterminant essentiel de la santé au cours de l’enfance et après. Elle est particulièrement importante chez les fillettes à cause de leur futur rôle de mère et des répercussions intergénérationnelles que peut avoir un mauvais état nutritionnel chez la femme. Le fait de prévenir les cas de mauvais traitements et de négligence et de veiller à ce que le jeune enfant bénéficie d’un environnement favorable permettra aux enfants de bénéficier d’un développement physique, social et émotionnel optimal. Cela contribuera également à éviter les comportements à risque, ainsi qu’une charge de morbidité importante, et notamment des troubles mentaux et de la consommation de substances à un stade ultérieur. LES fEmmES ET La SanTé Une modification des comportements maintenant est garante d’importants bénéfices sanitaires plus tard Il est essentiel de répondre aux besoins des adolescents en matière de santé et de développement pour que leur passage à l’âge adulte se fasse dans les meilleures conditions. Il faut que les sociétés s’attaquent aux éléments qui favorisent des comportements potentiellement nocifs par rapport à la sexualité, à la consommation de tabac et d’alcool, à l’alimentation et à l’activité physique et qu’elles apportent aux adolescents l’aide dont ils ont besoin pour éviter de tels comportements. Dans de nombreux pays à revenu élevé, les adolescentes sont de plus en plus nombreuses à boire de l’alcool et à fumer et les cas d’obésité sont en augmentation. Aider les adolescents à prendre d’emblée des habitudes saines ne peut que se traduire par des bénéfices importants plus tard et notamment par une baisse des cas de décès et d’incapacités liés aux maladies cardio-vasculaires, aux accidents vasculaires cérébraux et aux cancers. La prise en compte des besoins des femmes plus âgées sera un défi de taille pour les systèmes de santé Parce qu’elles vivent généralement plus longtemps que les hommes, les femmes représentent une proportion croissante des personnes âgées. La société doit se préparer dès à présent à prévenir ou prendre en charge les problèmes de santé chroniques qui accompagnent souvent la vieillesse. L’adoption d’habitudes favorables à la santé pendant la jeunesse peut aider les femmes à vivre de façon active et saine, même quand elles ont atteint un certain âge. La société doit d’autre part se préparer à assumer les coûts de la prise en charge sanitaire des femmes âgées. De nombreux pays à revenu élevé consacrent actuellement un pourcentage important de leur budget sanitaire et social à la prise en charge des personnes âgées. Dans les pays plus démunis, c’est souvent la famille et généralement les femmes de la famille qui s’acquittent de cette responsabilité. Il faut élaborer des politiques concernant le financement de la santé, la réforme des retraites et des impôts, l’accès à l’emploi structuré ainsi que les prestations de retraite et la protection sociale qui lui est associée et, enfin, la prestation de soins en établissement et dans la communauté. 5. La société et les systèmes de santé ne répondent pas à l’attente des femmes A cause de leurs lacunes, les systèmes de santé privent les femmes de soins de santé Les raisons pour lesquelles les systèmes de santé ne répondent pas à l’attente des femmes sont souvent complexes et elles ont à voir avec les discriminations dont elles sont victimes dans la société. Elles peuvent toutefois être appréhendées et on peut et on doit les contester et changer les choses. Ainsi, les femmes sont confrontées à des dépenses de santé plus élevées que les hommes parce qu’elles font plus appel aux soins de santé ; or elles risquent davantage que les hommes d’être pauvres, au chômage ou, sinon, employées à temps partiel ou dans le secteur informel qui ne leur offre aucune protection sanitaire. C’est pourquoi l’un des principaux moyens d’améliorer la santé des femmes est d’éliminer les obstacles financiers aux soins de santé. Ainsi, là où les services de santé maternelle sont payants, les ménages supportent une part importante du coût des services dispensés en établissement, et les accouchements suivis de complications entraînent souvent des dépenses catastrophiques. Les données factuelles recueillies dans plusieurs pays montrent que l’instauration de la gratuité des soins de santé maternelle, en particulier des accouchements, peut à la fois stimuler la demande et accroître l’utilisation des services essentiels. L’élimination des obstacles financiers aux soins doit s’accompagner d’efforts pour veiller à ce que les services de santé soient adaptés, acceptables, de bonne qualité et répondent aux besoins des jeunes filles et des femmes. réSumé d’oriEnTaTion Les systèmes de santé dépendent des femmes en tant que dispensatrices de soins Paradoxalement, les systèmes de santé sont rarement adaptés aux besoins des femmes alors même que celles-ci contribuent tout particulièrement à l’action de santé, de par leur rôle de soignante dans la famille et aussi de dispensatrice de soins dans les secteurs tant formel qu’informel de la santé. Les femmes, bien qu’elles soient le pilier du système de santé, sont rarement présentes au niveau de direction ou de gestion et sont généralement cantonnées dans des postes mal rémunérés, tout en étant exposées à des risques professionnels plus importants. En tant que soignantes dans leur famille ou dans la communauté, les femmes sont la plupart du temps très peu aidées et peu ou pas reconnues ni rémunérées. Les carences de la société nuisent à la santé des femmes Le traitement réservé aux femmes et le statut qui leur est réservé dans la société conditionnent énormément leur santé. Là où les femmes sont encore victimes de discrimination ou d’actes de violence, leur santé s’en ressent. Là où la loi les empêche de posséder des terres ou des biens, ou de divorcer, leur vulnérabilité civique et sociale n’en est que plus grande. Au pire, la discrimination sociale ou culturelle liée au sexe peut conduire à une mort violente ou à l’infanticide parmi les petites filles. Même lorsque des progrès sont réalisés, il y a des raisons de vouloir aller plus loin encore. Ainsi, si l’accès des petites filles à l’éducation a beaucoup progressé, on note encore un déséquilibre entre hommes et femmes pour ce qui est de l’enseignement secondaire, de l’accès à l’emploi et de l’égalité des rémunérations. Dans l’intervalle, l’indépendance économique croissante dont jouissent certaines femmes du fait que le travail féminin se généralise peut avoir des effets positifs sur la santé, mais, d’une façon générale, les femmes sont moins bien protégées au travail, qu’il s’agisse de la sécurité ou des conditions de travail. Mise au point d’un programme d’action commun pour la santé des femmes Pour l’OMS, l’objectif de la publication du présent rapport est de déterminer les principaux domaines qui devront faire l’objet de réformes, aussi bien dans le secteur de la santé qu’à l’extérieur. Les soins de santé primaires, qui privilégient l’équité, la solidarité et la justice sociale, offrent la possibilité de changer les choses grâce à une action dans les quatre domaines suivants. Mise en place d’un leadership fort et d’une réponse institutionnelle cohérente Face aux problèmes de santé des femmes, les réponses nationales et internationales sont généralement cloisonnées et d’ampleur limitée. Pour progresser, il sera déterminant de trouver les moyens d’encourager un leadership participatif audacieux s’articulant sur un programme d’action clair et cohérent. L’engagement et la participation pleine et entière des femmes et des organisations de femmes seront essentiels. Les progrès notables réalisés dans certains pays en ce qui concerne la santé des femmes montrent que la chose est possible. Les interventions sont connues et les ressources peuvent être trouvées. Les objectifs du Millénaire pour le développement ont joué un rôle vital pour continuer à diriger les projecteurs sur le développement et à fixer des points de repère face aux nombreuses revendications concurrentes susceptibles de retenir l’attention de la communauté internationale. Le fait qu’il existe un objectif distinct pour la santé maternelle permet d’appeler l’attention sur l’absence de progrès dans ce domaine et d’attirer un appui à la fois politique et financier en faveur de l’accélération des changements. L’adjonction de la cible relative à l’accès universel à la santé génésique a contribué à en élargir la portée. Il faut maintenant s’intéresser aux nombreux autres défis et déterminants de la LES fEmmES ET La SanTé santé des femmes exposés dans le présent rapport. Ce faisant, il faudra veiller à promouvoir l’égalité entre les sexes et l’autonomisation des femmes (OMD3). La situation est complexe vu la façon dont les problèmes des femmes sont abordés par les différents gouvernements et organisations internationales, dans le cadre d’initiatives multiples rivalisant pour l’obtention de ressources. Il faut intensifier la collaboration afin de mettre sur pied des structures d’appui, des incitations et des dispositifs liés à l’obligation de résultats dans le but d’améliorer la santé des femmes. Orientation de l’action des systèmes de santé en faveur des femmes Le rapport souligne la nécessité de renforcer les systèmes de santé afin qu’ils soient mieux équipés pour répondre aux besoins des femmes – au niveau de l’accès, de la gamme des services et de la réactivité. Il ne s’agit pas seulement de la santé sexuelle et génésique : cela doit s’appliquer tout au long de la vie. Dans l’action entreprise pour développer l’accès aux services et améliorer la santé des femmes, les progrès sont disparates et inégaux. Certains services, comme les soins prénatals, ont plus de chances d’être offerts que d’autres, par exemple ceux qui s’occupent de la santé mentale, de la violence faite aux femmes ou du dépistage et de la prise en charge du cancer du col utérin. Dans plusieurs pays, et pas seulement ceux qui connaissent une crise humanitaire, les taux de couverture d’interventions de base telles que la vaccination ou les soins qualifiés à l’accouchement sont dramatiquement bas. Il n’est pas rare que les démunis, en particulier les pauvres et les personnes vulnérables, soient exclus des soins, et les inégalités se creusent dans de nombreux pays. Si l’on veut améliorer la couverture, il faut examiner la teneur des enveloppes de prestations et inclure une plus large gamme de services pour les filles et les femmes de tout âge. Il faut aussi aborder la question de la protection financière, en abandonnant le paiement par l’usager au profit de systèmes de paiement préalable et de mise en commun des ressources. Promotion de sociétés plus saines : favoriser des changements des politiques publiques Le rapport montre comment les femmes subissent les effets des déterminants économiques et sociaux de la santé. Bon nombre des causes principales de morbidité et de mortalité chez les femmes – dans les pays riches comme dans les pays pauvres – proviennent de l’attitude de la société vis-à-vis des femmes, attitude qui se retrouve dans les structures et systèmes qui élaborent les politiques, déterminent la nature des services et créent des chances. Même si des solutions techniques peuvent atténuer les conséquences dans l’immédiat, les progrès à long terme dépendront de changements plus fondamentaux. Les politiques publiques peuvent influencer l’exposition aux risques, l’accès aux soins et les conséquences d’une mauvaise santé pour les femmes et les filles. Le rapport donne des exemples de ces politiques – depuis les mesures ciblées pour encourager les filles à entrer dans le système scolaire et poursuivre leurs études (en garantissant la sécurité de l’environnement scolaire et en favorisant les mariages plus tardifs) aux mesures visant à mettre en place des environnements adaptés aux personnes âgées et donner aux femmes plus âgées la possibilité de contribuer de façon productive à la vie de la société. Une collaboration intersectorielle s’impose pour dégager et promouvoir en dehors du secteur de la santé les mesures qui permettront d’améliorer les résultats sanitaires pour les femmes. Les stratégies générales telles que la réduction de la pauvreté, le développement de l’accès à la lecture et l’instruction élémentaire, à la formation et à l’éducation, ainsi que le développement des possibilités de participation des femmes aux activités économiques contribuent elles aussi à des progrès durables dans le domaine de la santé des femmes. L’expérience donne à penser qu’il faudra pour cela une approche fondée sur l’égalité entre les sexes et les droits capable de mobiliser les énergies de la société civile et de reconnaître la nécessité d’un engagement politique. réSumé d’oriEnTaTion Mise en place de la base de savoirs et suivi des progrès Le rapport fait ressortir les principales lacunes au niveau des connaissances qui empêchent vraiment de parler avec autorité de la santé des femmes dans différentes parties du monde. On sait bien sûr beaucoup de choses dans ce domaine mais nous connaissons encore mal l’ampleur et la nature des défis particuliers auxquels elles sont confrontées et la façon de les relever. Il nous faut d’autre part être à même de mesurer les progrès – et il nous faut le faire dès à présent. Les bases sur lesquelles repose une meilleure information concernant les femmes et la santé doivent être renforcées, en commençant par les systèmes d’enregistrement des faits d’état civil qui livrent les statistiques essentielles – notamment la cause de décès par âge et par sexe – ainsi que la collecte et l’utilisation de données ventilées par âge et par sexe sur les problèmes les plus fréquents. Ces données sont indispensables pour la planification et la gestion des programmes et, faute de tels systèmes, les efforts pour suivre les changements, par exemple au niveau de la mortalité maternelle, resteront vains. Dans la recherche, il faut s’intéresser systématiquement à la distinction entre sexe biologique et sexe social lors de la conception des travaux tout comme de l’analyse et de l’interprétation des résultats. Il faut s’intéresser davantage à l’évaluation des progrès de la couverture des interventions essentielles tout en suivant l’évolution des politiques pertinentes, des mesures de la performance des systèmes de santé et de la réduction des inégalités. Conclusion En faisant un bilan des données factuelles et en esquissant un programme d’action pour l’avenir, le présent rapport donne une idée des mesures nécessaires pour améliorer la santé des filles et des femmes dans le monde entier. Il a pour but de livrer les informations nécessaires au dialogue politique et d’encourager les pays, les institutions et les partenaires du développement à agir. Bien qu’il mette en avant les différences entre hommes et femmes, ce n’est pas un rapport uniquement sur les femmes et pour les femmes. S’occuper de la santé des femmes est une approche nécessaire et utile pour renforcer les systèmes de santé d’une façon générale, dans l’intérêt de tous. L’amélioration de la santé des femmes est importante pour les femmes, pour leur famille, pour leur communauté et pour l’ensemble de la société. Améliorer la santé des femmes, c’est rendre le monde meilleur. 1 COMPRENDRE LA SANTÉ DES FEMMES DANS LE MONDE ACTUEL chapitre Figure 1 Mortalité et charge de morbidité (AVCI) de la population féminine par Régions, groupes d’âge et grandes causes (2004) 0–9 ans 0 10 20 30 40 50 6001002003004005006007008009001000 Pays à revenu élevé Amériques* Pacifique occidental* Europe* Méditerranée orientale* Asie du Sud-Est Afrique Pays à revenu élevé Amériques* Pacifique occidental* Europe* Méditerranée orientale* Asie du Sud-Est Afrique Pays à revenu élevé Amériques* Pacifique occidental* Europe* Méditerranée orientale* Asie du Sud-Est Afrique Pays à revenu élevé Amériques* Pacifique occidental* Europe* Méditerranée orientale* Asie du Sud-Est Afrique 10–19 ans 0 10 20 30 40 50 6001002003004005006007008009001000 20–59 ans 0 10 20 30 40 50 6001002003004005006007008009001000 60 ans et plus 0 10 20 30 40 50 6001002003004005006007008009001000 VIH Tuberculose et paludisme Affections maternelles Affections périnatales Maladies diarrhéiques Maladies respiratoires Autres maladies transmissibles et carences nutritionnelles Maladies cardio-vasculaires et diabète Cancers Troubles mentaux Troubles sensoriels Autres maladies non transmissibles Traumatismes AVCI pour 1 000 sujets féminins Nombre de décès pour 1 000 sujets féminins * Les pays à revenu élevé ne sont pas pris en compte dans les groupes régionaux. Source : Organisation mondiale de la Santé1. ComprEndrE La SanTé dES fEmmES danS LE mondE aCTuEL Pourquoi une étude spéciale sur les femmes et la santé ? Parce que, comme l’explique ce rapport, les femmes et les filles ont des besoins de santé particuliers et que les systèmes de santé les délaissent. Quels sont ces besoins ? Les femmes sont les seules à connaître certaines situations et leurs effets négatifs sur la santé. La grossesse et l’accouchement, par exemple, ne sont pas des maladies à proprement parler mais des processus biologiques et sociaux normaux qui impliquent des risques et nécessitent des soins. Certains problèmes de santé touchent hommes et femmes indifféremment, mais comme les conséquences peuvent être différentes ou plus marquées pour les femmes, il faut adapter les solutions à leurs besoins particuliers. D’autres affections touchent les deux sexes de manière plus ou moins équivalente, mais les femmes ont plus difficilement accès aux soins requis. Par ailleurs, les inégalités fondées sur le sexe, par exemple en matière d’instruction, de revenus et d’emploi, restreignent la capacité des filles et des femmes à protéger leur santé et à parvenir à un état de santé optimal. La santé revêt une importance centrale pour les femmes mais aussi pour les enfants qu’elles seront amenées à porter. Ainsi, il importe de souligner que se préoccuper de la santé des filles et des femmes aujourd’hui représente un investissement pour le présent mais également pour les générations futures. Cela implique de s’intéresser aux déterminants sociaux et économiques de la santé des femmes et notamment à leur niveau d’instruction, qui leur profite directement et qui est crucial pour la survie, la croissance et le développement de leurs enfants. Nous reviendrons sur cette question plus loin dans ce chapitre ainsi que dans le chapitre 7. Les études sur la santé des femmes s’intéressent ou se limitent souvent à des périodes particulières de la vie d’une femme (les années de procréation par exemple) ou à des problèmes donnés, tels le virus de l’immunodéficience humaine (VIH), la santé maternelle, la violence ou les troubles mentaux. Ce rapport fournit au contraire des données sur la santé des femmes tout au long de leur vie et couvre l’ensemble des causes de décès et d’incapacité dans les principales régions du monde. Le rapport se base sur les données dont dispose actuellement l’OMS. Cependant, l’analyse révèle que les systèmes souffrent de sérieuses lacunes les empêchant de fournir au moment opportun des données fiables sur les principaux problèmes de santé auxquels sont confrontés les filles et les femmes, en particulier dans les pays à faible revenu. De nombreuses conclusions se fondent sur des extrapolations à partir de données incomplètes. Néanmoins, les informations disponibles mettent clairement en évidence des problèmes et enjeux sanitaires auxquels il convient de répondre de toute urgence pour que les filles et les femmes concrétisent pleinement leur droit fondamental à la santé, et partant, leurs droits économiques et sociaux. L’analyse épidémiologique détaillée des prochains chapitres a pour but de permettre une compréhension approfondie des problèmes de santé que rencontre la population féminine mondiale tout au long de sa vie. Quatre grands thèmes (Figure 1) se dégagent de cette présentation générale de la charge de morbidité pesant sur les femmes à différents âges (charge qui englobe les décès mais aussi les affections non mortelles, souvent chroniques). Nous reviendrons plus précisément sur ces thèmes au cours des prochains chapitres. Encadré 1 Charge de morbidité et AVCI Les maladies qui causent de nombreux décès représentent clairement des priorités de santé publique. Toutefois, les statistiques de mortalité à elles seules ne rendent pas compte de la perte de santé due, chez les filles et les femmes, aux maladies chroniques, aux traumatismes et aux troubles sensoriels et mentaux. Les années de vie corrigées de l’incapacité (AVCI) intègrent aux mesures de la charge de morbidité des populations1, les années en bonne santé perdues en raison de la mortalité prématurée et des affections chroniques non mortelles, et donnent plus de poids aux décès survenus plus tôt dans la vie. L’AVCI élargit la notion d’années de vie potentielles perdues en raison d’un décès prématuré en incluant les années en bonne santé équivalentes perdues du fait d’un mauvais état de santé ou d’une incapacité. Une AVCI peut se définir comme la perte d’une année de vie en bonne santé, et la charge de morbidité comme la mesure de l’écart entre l’état de santé actuel et une situation idéale où tout le monde vivrait vieux, sans aucune maladie ou incapacité. LES fEmmES ET La SanTé Premièrement, à l’échelle mondiale, les principales causes de la charge globale de morbidité chez les femmes sont les infections des voies respiratoires inférieures, la dépression et les maladies diarrhéiques. L’encadré 1 explique comment la charge de morbidité chez les femmes est calculée en années de vie corrigées de l’incapacité, ou AVCI. Les troubles neuropsychiatriques et les troubles sensoriels, liés par exemple à la vue et à l’ouïe, représentent également d’importantes causes d’AVCI dans le monde. Dans la Région africaine, les maladies infectieuses continuent d’être responsables d’environ la moitié des AVCI mais leur impact reste limité dans les autres Régions1. Deuxièmement, dans tous les groupes d’âge et dans toutes les Régions, les taux de mortalité et la charge de morbidité des filles et des femmes sont moins élevés dans les pays à fort revenu que dans ceux à faible revenu. Tous âges confondus, l’Afrique présente les taux les plus hauts de mortalité et d’incapacité. Troisièmement, les causes de décès et d’incapacité chez les filles et les femmes varient au fil de l’existence. Au cours de l’enfance, la plupart des décès et des incapacités sont dus aux maladies transmissibles comme l’infection à VIH, les maladies diarrhéiques et respiratoires, le paludisme et les affections maternelles et périnatales. À des stades plus avancés de la vie, les décès et les incapacités s’expliquent plus souvent par les maladies chroniques non transmissibles comme les maladies car- dio-vasculaires, les accidents vasculaires cérébraux et les cancers. L’Afrique reste le seul pays où les maladies transmissibles sont les principales causes de décès des femmes jusqu’à l’âge de 60 ans. Quatrièmement, s’agissant de la composition de la charge globale de morbidité et d’incapacité, d’importants écarts existent entre les Régions. En Afrique et en Asie du Sud-Est, les maladies transmissibles constituent d’importantes causes de décès et d’incapacité, tous âges confondus. Cependant, chez les femmes de 60 ans et plus, et dans toutes les Régions, la plupart des décès sont imputables aux maladies non transmissibles. Les prochains chapitres examinent plus en détail les principales caractéristiques de la mortalité et de l’incapacité et indiquent quelles conséquences tirer de l’analyse des données sur le plan des politiques et des programmes. Ce premier chapitre propose un résumé général de l’état de santé des filles et des femmes. Il décrit également les grands facteurs qui influencent celui-ci, notamment les inégalités basées sur le sexe et les facteurs économiques et sociaux, et montre que les femmes ne sont pas simplement des utilisatrices potentielles de soins de santé mais jouent également un rôle indispensable de prestataires de soins dans les secteurs formel et informel. Les femmes dans le monde La plupart des femmes vivent dans des pays à revenu faible ou intermédiaire, et environ la moitié dans les Régions de l’Asie du Sud-Est et du Pacifique occidental. Elles sont 3,3 milliards, et seulement 15 % d’entre elles habitent dans des pays à revenu élevé (Tableau 1). Plus d’une femme sur trois vit dans un pays à faible revenu et, comme Tableau 1 Nombre de femmes et de filles dans le monde et répartition par groupe d’âge la population est géné et groupe de revenu du pays (2007) Pays à faible revenu Pays à revenu intermédiaire Pays à revenu élevé Total général Groupe d’âge en milliers % en milliers % en milliers % en milliers ralement plus jeune dans ces pays que dans ceux à revenu élevé, c’est également le cas d’un enfant 0–9 ans 300 768 50 241 317 40 57 456 10 599 541 de moins de neuf ans 10–19 ans 267 935 45 263 464 44 61 577 10 592 975 sur deux. Au contraire, 20–59 ans 580 014 34 875 052 51 276 140 16 1 731 206 une femme sur trois âgée 60 ans et plus 86 171 22 183 099 48 115 681 30 384 952 de 60 ans ou plus habite Total 1 234 888 37 1 562 932 47 510 854 15 3 308 673 dans un pays à revenu élevé Ainsi, ces pays Source: Division de la population des Nations Unies2. ComprEndrE La SanTé dES fEmmES danS LE mondE aCTuEL comptent les proportions les plus importantes de femmes âgées de 60 ans ou plus (Figure 2) et les Régions d’Afrique et d’Asie du Sud-Est la part la plus importante d’enfants et de jeunes de moins de 20 ans. Actuellement, l’existence des femmes du monde entier, tous âges confondus, est déterminée par une série de facteurs épidémiologiques, démographiques, sociaux, culturels, économiques et environnementaux. Ces facteurs influencent également la vie des hommes mais certaines difficultés touchent en particulier les filles et les femmes. Par exemple, le fait que le rapport de masculinité à la naissance penche légèrement en faveur des garçons est un phénomène biologique naturel. Ainsi, pour 100 garçons nés, on compte entre 94 (Afrique) et 98 filles (autres parties du monde). Cependant, dans certaines Europe* Méditerranée orientale* Amériques* Afrique Pays à revenu élevé Pacifique occidental* Asie du Sud-Est Figure 2 Répartition des femmes par Régions et grand groupe d’âge (2007) < 10 ans 10–19 ans 20–59 ans 60 ans et plus 0 100 200 300 400 500 600 700 800 900 Millions de femmes *Les pays à revenu élevé ne sont pas pris en compte dans les groupes régionaux. Source : Division de la population des Nations Unies2. situations, la discrimination sociétale envers les femmes et la préférence des parents pour les garçons faussent les rapports de masculinité. En Inde, par exemple, le recensement de 2001 n’a enregistré que 93 filles pour 100 garçons, un net recul par rapport à 1961, où l’on atteignait presque le chiffre de 98 filles. Dans certaines parties du pays, on compte moins de 80 filles pour 100 garçons. De faibles rapports de masculinité ont également été enregistrés dans d’autres pays asiatiques, notamment en Chine, où, d’après une étude de 2005, on comptait seulement 84 naissances de filles pour 100 garçons. C’était légèrement plus que pour la période 2001 2004, où ce chiffre atteignait 81, mais bien moins que le rapport de 93 filles pour 100 garçons parmi les enfants nés à la fin des années 19803. Augmenter l’espérance de vie Les femmes vivent généralement plus âgées que les hommes, avec un écart moyen de six à huit ans. Cette différence s’explique en partie par un avantage biologique inhérent, mais également par des différences comportementales entre les deux sexes. Comme l’explique le chapitre 2, les nouveau nés de sexe féminin ont plus de chances de vivre au-delà d’un an que les garçons4. Les femmes conservent cet avantage tout au long de leur existence : tous âges confondus, elles enregistrent généralement des taux de mortalité plus faibles, probablement en raison d’une combinaison de facteurs génétiques et comportementaux qui seront expliqués en détail dans les prochains chapitres1. L’avantage des femmes sur le plan de la longévité apparaît plus nettement lors de la vieillesse, ce sur quoi nous reviendrons plus en détail au chapitre 6. Il peut s’expliquer par le fait qu’elles développent durant leur existence moins de comportements à risque, tels la consommation de tabac et d’alcool, mais aussi par des avantages biologiques plus difficiles à déterminer, à l’origine des taux relativement plus faibles de maladies cardio-vasculaires et de cancers. L’écart de l’espérance de vie entre les hommes et les femmes se réduit dans une certaine mesure dans certains pays développés. La hausse de la consommation du tabac chez les femmes et la baisse des taux de maladies cardio-vasculaires chez les hommes pourraient expliquer ce phénomène, mais cette question n’est toujours pas tranchée5,6. Il est possible que l’avantage des femmes sur le plan de l’espérance de vie soit un phénomène assez récent. Les données historiques précises sont rares, mais on sait de manière certaine qu’au XVIIe siècle, en Angleterre et au Pays de Galles, l’espérance de vie des hommes dépassait celles des femmes7,8. Cela pourrait en partie s’expliquer par le faible statut social des femmes à cette époque, LES fEmmES ET La SanTé Figure 3 Espérance de vie à la naissance des sujets féminins associé aux taux élevés de mortalité souvent selon le groupe de revenu du pays et de la Région liés à la grossesse et à la maternité. (1950–2005) D’une manière générale, l’espérance de 85 vie des femmes à la naissance a progressé 80 75 d’environ 20 ans depuis le début des années 70 1950, où elle n’était que de 51 ans (Figure 3). 65 En 2007, elle s’établissait à 70 ans contre 65 60 ans pour les hommes. Aujourd’hui, l’espé 55 rance de vie des femmes est supérieure à 80 50 45 ans dans au moins 35 pays, mais la situation n’est pas partout aussi encourageante. Par 40 35 exemple, l’espérance de vie à la naissance 1950– 1955– 1960– 1965– 1970– 1975– 1980– 1985– 1990– 1995– 2000– des femmes de la Région africaine était 55606570758085909500 05 estimée à seulement 54 ans en 2007, soit le * Hors pays d’Afrique de l’Est et d’Afrique australe. niveau le plus faible de toutes les Régions. Source : Division de la population des Nations Unies2. Dans certains pays d’Afrique, en particulier en Afrique orientale et australe, l’absence d’amélioration de l’espérance de vie est principalement due au VIH/sida et à la mortalité maternelle, même s’ils ne sont pas les seuls facteurs. Dans quelques pays, l’espérance de vie des femmes est équivalente ou inférieure à celle des hommes en raison des inégalités sociales dont elles souffrent4. Néanmoins, l’espérance de vie ne constitue pas un indicateur exhaustif : les années supplémentaires que vivent les femmes ne sont pas toujours vécues en bonne santé. Dans les pays à faible revenu en particulier, l’écart d’espérance de vie entre les deux sexes est faible (un an seulement) et dans plusieurs pays, l’espérance de vie en bonne santé est moins élevée pour les femmes que pour les hommes4. Espérance de vie (en années) Pays à revenu élevé Pays à revenu intermédiaire* Pays à faible revenu* Pays d’Afrique de l’Est et d’Afrique australe La transition sanitaire La modification des causes sous-jacentes de la mortalité et des maladies à travers le monde a constitué l’un des phénomènes les plus marquants des dernières décennies. Cette « transition sanitaire » touche hommes, femmes et enfants de tous pays. Elle procède de l’évolution de trois éléments interdépendants qui se renforcent mutuellement : les structures démographiques, le tableau des maladies et les facteurs de risque. La transition démographique se caractérise par des taux de mortalité plus faibles chez les enfants de moins de cinq ans et par la baisse des taux de fécondité, entraînant un vieillissement de la population. Le nombre moyen d’enfants par femme a chuté dans le monde, passant de 4,3 au début des années 1970 à 2,6 en 2005-2010 (Tableau 2). Ce recul s’explique principalement par le recours plus fréquent à la contraception (voir le chapitre Tableau 2 Fécondité totale (nombre moyen d’enfants par femme) 4). par grande région (1970-2005) Zone 1970 75 2005–2010 Monde 4.32 2.56 La transition épidémiologique renvoie à un changement des principales causes de mortalité et de maladie : les maladies infec- Afrique 6.69 4.61 tieuses comme la diarrhée et la pneumonie Asie 4.76 2.35 reculent (affections habituellement associées aux pays les plus pauvres) pour être rempla- Europe 2.19 1.50 cées par des affections non transmissibles Amérique latine et Caraïbes 5.01 2.26 comme les maladies cardio-vasculaires, les Amérique du Nord 2.07 2.04 accidents vasculaires cérébraux et le cancer Océanie 3.29 2.44 Source: Division de la population des Nations Unies2. ComprEndrE La SanTé dES fEmmES danS LE mondE aCTuEL (longtemps considéré comme le fléau des Figure 4 La transition sanitaire chez les femmes mexicaines : pays riches). taux de mortalité par grande cause de décès La transition du risque correspond à une diminution des facteurs de risque des mala dies infectieuses (dénutrition, eau non pota ble et mauvaise qualité de l’assainissement par exemple) et à une hausse des facteurs de risque des maladies chroniques (tels que la surcharge pondérale et la consommation d’alcool et de tabac). Cette transition sanitaire est plus ou moins rapide selon les pays. Dans de nom breux pays à revenu intermédiaire, dont une grande partie de l’Amérique latine et de la (standardisé sur l’âge, pour 1000 femmes) (1955–2005) 16 14 12 10 Nombre de décès pour 1000 sujets féminins Maladies transmissibles, maternelles, périnatales et nutritionnelles Maladies non transmissibles Traumatismes 8 6 4 2 0 1955– 1960– 1965– 1970– 1975– 1980– 1985– 1990– 1995– 2000– 606570758085909500 05 Chine, ce processus est déjà bien avancé. Par exemple au Mexique, en 2006, seuls 13 % Source : Organisation mondiale de la Santé9. Division de la population des Nations Unies2 . des décès (hommes et femmes confondus) étaient dus à des facteurs transmissibles, nutritionnels et maternels, contre 60 % en 1955. Même si les taux de mortalité dus aux maladies non transmissibles ont diminué au Mexique, ces maladies représentent une part croissante du nombre total de décès, s’établissant à 80 % en 2006 (Figure 4). Dans ce pays comme dans beaucoup d’autres, le risque de décéder de traumatismes était beaucoup moins élevé pour les hommes que pour les femmes. Au cours des années 1980, 23 % des décès de la population masculine étaient imputables aux traumatismes contre seulement 7 % pour la population féminine. La transition sanitaire est plus lente en Afrique où la mortalité chez les filles et les femmes se caractérise toujours par la prédominance des maladies infectieuses (Figure 5). Figure 5 Nombre de décès de sujets féminins dus à des affections transmissibles, maternelles, périnatales et nutritionnelles, en pourcentage du nombre total (2004) 1–9 ans 10–19 ans 20–39 ans 40–59 ans 60 ans et plus En pourcentage du nombre total de décès de sujets féminins Données non disponibles Source : Organisation mondiale de la Santé1. LES fEmmES ET La SanTé Au début de la transition sanitaire, les femmes et les enfants souffrent de taux de mortalité élevés, le plus souvent dus à des carences nutritionnelles, à l’insalubrité de l’eau, aux mauvaises conditions d’assainissement, à la fumée provenant des combustibles solides utilisés pour la cuisine et le chauffage et à l’absence de soins durant l’enfance, la grossesse et la maternité. Ces risques fréquents sont dommageables pour la santé des femmes et des enfants d’aujourd’hui mais aussi pour celle de la génération suivante. Les femmes souffrant d’une mauvaise alimentation, de maladies infectieuses et d’un accès inadéquat aux soins donnent généralement naissance à des nourrissons de faible poids de naissance dont les chances de survie et de bonne santé sont compromises10,11. Les actions de santé publique ont depuis longtemps cherché à résoudre ces problèmes en améliorant la nutrition, en offrant aux ménages des environnements plus sains et en renforçant la qualité des soins de santé. Cependant, de nouveaux problèmes apparaissent tandis que d’autres, ignorés jusqu’alors, sont reconnus : surcharge pondérale et obésité, sédentarité, consommation de tabac et d’alcool, violence à l’égard des femmes et risques environnementaux (par exemple, mauvaise qualité de l’air urbain et effets du changement climatique). Les conséquences de ces risques émergents varient en fonction du développement socio-économique. La pollution de l’air urbain, par exemple, représente souvent un risque plus important pour la santé dans les pays à revenu intermédiaire que dans les pays à fort revenu, car ces derniers sont plus avancés en matière de politique environnementale et de santé publique. La transition du risque rend compte des différences de comportement entre les hommes et les femmes. Par exemple, la consommation d’alcool et de tabac était souvent plus élevée chez les hommes que chez les femmes. Récemment toutefois, les taux de tabagisme des femmes ont commencé à se rapprocher de ceux des hommes. Les conséquences sur la santé apparaîtront dans le futur (par exemple augmentation des maladies cardio-vasculaires et des cancers). Dans les pays à revenu faible et intermédiaire, la consommation d’alcool est généralement plus importante chez les hommes. Cependant, dans de nombreux pays à fort revenu, les tendances de la consommation d’alcool commencent à converger entre les deux sexes. Figure 6 Nombre de décès de sujets féminins par groupe d’âge et groupe de revenu de pays (2007) Pays à revenu intermédiaire Pays à faible revenu 10–19 ans Pays à revenu élevé 10–19 ans <10 ans 60 ans et plus <10 ans 20–59 ans 20–59 ans 60 ans et plus Nombre de décès : 4,1 millions Population : 511 millions Nombre de décès : 10,8 millions Population : 1 563 millions Source : Organisation mondiale de la Santé.4 60 ans et plus 20–59 ans 10–19 ans <10 ans Nombre de décès : 11,9 millions Population : 1 235 millions ComprEndrE La SanTé dES fEmmES danS LE mondE aCTuEL Les inégalités socio-économiques nuisent à la santé Le statut socio-économique est un déterminant majeur de la santé pour les deux sexes. D’une manière générale, les femmes des pays à revenu élevé vivent plus longtemps et sont moins susceptibles de souffrir d’une mauvaise santé que celles des pays à faible revenu. Dans les pays à revenu élevé, les taux de mortalité des enfants et des jeunes femmes adultes sont très faibles et la plupart des décès surviennent après 60 ans (Figure 6). Dans les pays à faible revenu, la situation est très différente : la population est moins âgée et les taux de mortalité sont plus élevés chez les jeunes. De plus, la plupart des décès sont observés chez les fillettes, les adolescentes et les jeunes femmes. Dans les pays à revenu élevé, les maladies non transmissibles telles que les maladies cardio vasculaires, les accidents vasculaires cérébraux, la démence et les cancers comptent parmi les dix principales causes de décès, représentant plus de quatre décès de femmes sur dix. Au contraire, dans les pays à faible revenu, les affections maternelles et périnatales et les maladies transmissibles (par exemple les infections des voies respiratoires inférieures, les maladies diarrhéiques et le VIH/sida) occupent une place importante et sont à l’origine de 38 % du total des décès des sujets féminins (Tableau 3). Tableau 3 Dix principales causes de mortalité de la population féminine selon le groupe de revenu du pays (2004) Monde Rang Cause Décès (milliers) % Pays à faible revenu Rang Cause Décès (milliers) % 1 Cardiopathies ischémiques 3371 12.2 1 Infections des voies respiratoires inférieures 1397 11.4 2 Accidents vasculaires cérébraux 3051 11.1 2 Cardiopathies ischémiques 1061 8.7 3 Infections des voies respiratoires inférieures 2014 7.3 3 Maladies diarrhéiques 851 7.0 4 BPCO* 1405 5.1 4 Accidents vasculaires cérébraux 749 6.1 5 Maladies diarrhéiques 1037 3.8 5 VIH/sida 742 6.1 6 VIH/sida 1013 3.7 6 Affections maternelles 442 3.6 7 Diabète sucré 633 2.3 7 Infections néonatales** 426 3.5 8 Prématurité et faible poids de naissance 567 2.1 8 Prématurité et faible poids de naissance 405 3.3 9 Infections néonatales** 546 2.0 9 Paludisme 404 3.3 10 Cardiopathies hypertensives 530 1.9 10 BPCO* 404 3.3 Pays à revenu intermédiaire Rang Cause Décès (milliers) % Pays à revenu élevé Rang Cause Décès (milliers) % 1 Accidents vasculaires cérébraux 1842 16.4 1 Cardiopathies ischémiques 650 15.8 2 Cardiopathies ischémiques 1659 14.8 2 Accidents vasculaires cérébraux 459 11.2 3 BPCO* 875 7.8 3 Maladie d’Alzheimer et autres démences 195 4.7 4 Infections des voies respiratoires inférieures 451 4.0 4 Infections des voies respiratoires inférieures 165 4.0 5 Cardiopathies hypertensives 319 2.8 5 Cancer du sein 163 4.0 6 Diabète sucré 309 2.8 6 Cancers de la trachée, des bronches 159 3.9 et du poumon 7 VIH/sida 264 2.4 7 Cancer du côlon et du rectum 130 3.2 8 Cancer du sein 231 2.1 8 BPCO* 126 3.1 9 Cancer de l’estomac 201 1.8 9 Diabète sucré 123 3.0 10 Cancers de la trachée, des bronches 191 1.7 10 Cardiopathies hypertensives 91 2.2 et du poumon *Bronchopneumopathie chronique obstructive. **Comprend les infections néonatales graves et d’autres causes non infectieuses survenant au cours de la période périnatale. Source: Organisation mondiale de la Santé1. LES fEmmES ET La SanTé La pauvreté et le faible statut socio-économique sont associés à de mauvais résultats sur le plan de l’état de santé. Des données provenant de 66 pays en développement indiquent que les taux de mortalité infanto-juvénile sont presque deux fois plus élevés chez les 20 % de ménages les plus pauvres que chez les 20 % de ménages les plus riches4. Au sein des pays à revenu élevé et faible, les niveaux de mortalité maternelle peuvent être jusqu’à trois fois plus élevés chez les groupes ethniques défavorisés que chez les autres femmes12,13. S’agissant du recours aux services de soins de santé, on observe le même type d’écart. Par exemple, au cours de la grossesse, les femmes des ménages les plus pauvres ne bénéficient généralement pas d’une accoucheuse qualifiée (voir ci dessous). Les inégalités entre les sexes affectent la santé des femmes Pour les femmes, les inégalités liées au sexe accentuent encore l’incidence du statut socio économique sur la santé. Dans de nombreux pays et sociétés, les femmes et les filles sont traitées comme socialement inférieures. Des normes comportementales et d’autres normes sociales, des codes de conduite et des lois perpétuent la soumission et tolèrent la violence à leur encontre. Les déséquilibres dans les relations de pouvoir, et l’existence de normes et valeurs différentes selon le sexe, se traduisent par des inégalités sur le plan de l’accès et du contrôle des ressources, au sein et à l’extérieur des familles. Il existe une étroite corrélation entre la mauvaise santé et la perte de bien être et les inégalités sexuelles de répartition des ressources (revenus, instruction, soins de santé, nutrition et influence politique, notamment). Ainsi, les filles et les femmes sont davantage exposées et vulnérables à tout un éventail de problèmes de santé, ce qui est souvent peu reconnu. Même si les femmes participent de plus en plus au champ politique, les hommes continuent de le contrôler dans la plupart des sociétés, et partant, exercent également un contrôle social et économique14. Il n’existe pas de données fiables sur la proportion de femmes pauvres, mais les femmes sont particulièrement vulnérables à la pauvreté de revenu car, contrairement aux hommes, elles ne travaillent généralement pas dans le secteur formel et l’essentiel de leur travail est non rémunéré15. Dans de nombreux pays en développement, elles représentent une part importante des travailleurs agricoles et beaucoup ne sont pas rémunérées puisqu’il s’agit de leur rôle au sein de la famille15. Le travail rémunéré des femmes hors secteur agricole a augmenté depuis 1990, de sorte qu’en 2005, elles représentaient presque 40 % des salariés14. Néanmoins, les taux d’emploi (c’est-à-dire le nombre de personnes employées en pourcentage de la population en âge de travailler) sont largement plus élevés chez les hommes que chez les femmes, l’écart se montant à 15 % dans des régions développées et à plus de 40 % en Asie du Sud, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord16. Même lorsqu’elles travaillent dans le secteur formel, les femmes sont généralement moins rémunérées que les hommes. Le rapport entre les rémunérations hommes-femmes est largement en leur défaveur dans tous les pays où des données sont disponibles17. Comme elles sont moins susceptibles de participer au marché du travail formel, elles n’ont pas accès à la sécurité de l’emploi et aux avantages de la protection sociale, tels que l’accès aux soins de santé. Au sein de la main-d’oeuvre formelle, elles rencontrent souvent des problèmes associés à leur statut inférieur18. De même, elles souffrent de discrimination et de harcèlement sexuel19 et doivent concilier les contraintes du travail rémunéré et de la vie familiale, ce qui entraîne fatigue professionnelle, infections, troubles mentaux et autres difficultés20. Les données provenant d’environ 50 études démographiques et sanitaires indiquent qu’en moyenne, une femme dirige un ménage sur cinq et que ces derniers sont particulièrement exposés à la pauvreté.21 Le problème ne concerne pas que les pays en développement. D’après le Bureau du recensement des États-Unis, plus de 28 % des femmes et des enfants vivant dans des foyers dirigés par une femme vivent en-dessous du seuil de pauvreté fédéral, contre moins de 14 % pour les familles dirigées par un homme et 5 % pour les familles dirigées par un couple marié.22 ComprEndrE La SanTé dES fEmmES danS LE mondE aCTuEL Les responsabilités familiales traditionnelles des femmes les exposent également à des risques. Par exemple, ce sont elles qui préparent la plupart des repas et lorsque des combustibles solides sont utilisés pour la cuisine, les filles et les femmes sont souvent exposées à la pollution de l’air intérieur. On estime que, chaque année, sur 1,3 million de décès féminins dus à la bronchopneumopathie chronique obstructive dans le monde, 641 000 sont imputables à l’air pollué par des combustibles solides1. La charge de la bronchopneumopathie chronique obstructive due à l’exposition à la fumée intérieure est environ deux fois plus élevée chez les femmes que chez les hommes. Les femmes assument une part beaucoup plus importante de la collecte de combustibles et d’eau pour le foyer (Figure 7). Le temps passé à ces opérations pourrait être consacré à des activités rémunératrices, à l’éducation ou aux soins des membres de la famille, tous ces éléments étant liés à l’état de santé des femmes et de leurs familles. Parvenir à la parité hommes-femmes en matière d’instruction, à l’école primaire et au-delà, est primordial si les femmes veulent réussir à s’intégrer pleinement à la société à l’économie. L’éducation des femmes leur profite directement, mais elle est également importante pour la survie, la croissance et le développement de leurs enfants. Dans tous les pays disposant de données pertinentes, les taux de mortalité infanto-juvénile sont les plus élevés dans les foyers où la mère a le plus faible niveau d’instruction.4 Malgré une hausse remarquable entre 2000 et 2006 du nombre de sujets féminins bénéficiant d’une instruction primaire, les filles représentent toujours 55 % de la population non scolarisée. Environ 580 millions de femmes sont illettrées (deux fois plus que les hommes) et plus de 70 millions de filles ne sont pas scolarisées.24 Dans certaines situations, l’inégalité entre les sexes est liée à des formes particulières de violence, dont la violence infligée par un partenaire intime, la violence sexuelle infligée par des connaissances et des étrangers, les sévices sexuels à enfant, l’initiation sexuelle forcée et les mutilations sexuelles féminines. Les filles et les femmes sont également vulnérables à d’autres formes d’abus ou d’exploitation moins souvent attestées, comme le trafic Figure 7 Répartition des personnes habituellement d’êtres humains ou « les crimes d’honneur » chargées de la collecte de l’eau dans 35 pays lorsqu’elles transgressent leur rôle social. Ces en développement (2005–2006) actes sont souvent associés chez les femmes à de nombreux problèmes de santé comme les traumatismes, les grossesses non désirées, les avortements, la dépression, les troubles anxieux et du comportement alimentaire, la consommation de substances, les infections sexuellement transmissibles et, évidemment, Hommes les décès prématurés.25,26 25% Les femmes au coeur des conflits et des crises Garçons Femmes 4 % Lors des catastrophes et des situations d’ur-64% gence, les femmes sont confrontées à des pro- Filles blèmes spécifiques liés à leur appartenance 7% sexuelle. Les données disponibles indiquent que des différences selon le sexe sont observées durant toutes les étapes d’une catastrophe : l’exposition au risque, la perception des risques, la préparation, la réponse, l’impact physique et psychologique, le rétablissement et la reconstruction.27 Source : UNICEF et Organisation mondiale de la Santé23. LES fEmmES ET La SanTé Les études portant sur plusieurs catastrophes récentes survenues en Asie du Sud-Est, montrent qu’elles ont fait plus de victimes de sexe féminin.28 Dans les situations de conflits et les crises, les femmes sont plus souvent exposées à la coercition sexuelle et au viol.29 Au coeur des catastrophes naturelles et des conflits armés, l’accès aux services de santé peut être encore plus difficile qu’en temps normal, ce qui entraîne des problèmes de santé physique et mentale, comme des grossesses non désirées ainsi que des décès maternels et périnatals. Même lorsqu’une offre de soins est disponible, il se peut que les femmes ne puissent pas y accéder en raison de restrictions culturelles ou de leurs responsabilités au sein du ménage.30 Les femmes et le système de santé Les inégalités socio-économiques et basées sur le sexe dont souffrent les femmes se retrouvent dans leur accès et leur utilisation des services de santé. Comme nous l’avons déjà indiqué, les femmes les plus pauvres sont généralement les moins susceptibles de recourir aux services de santé. Nous reviendrons sur ce point ultérieurement. Les raisons sont complexes : ces services sont peut-être indisponibles ou inaccessibles, ou les femmes ne trouvent pas de moyen de transport bon marché. Les normes socioculturelles limitent également souvent la mobilité des femmes et leur contact avec des prestataires de soins de sexe masculin. Pour formuler des programmes et des politiques plus efficaces, il convient de prendre en compte l’influence qu’exercent selon les contextes les inégalités socio-économiques. Dans certaines régions, tous les ménages rencontrent des obstacles pour accéder aux soins sauf les ménages les plus riches (Figure 8). Au Tchad et au Népal par exemple, seuls les ménages les plus riches font appel à une accoucheuse qualifiée lorsqu’un enfant vient au monde. En Inde, en Indonésie et au Pakistan, même si l’accès aux services de santé est meilleur pour toutes les catégories de revenu, les plus riches en profitent davantage tandis que les ménages les plus pauvres sont délaissés. En Colombie et au Gabon, le recours à un personnel qualifié est relativement fréquent dans la plupart des catégories de revenu sauf pour les plus pauvres. Il convient donc de mener des actions différentes selon la nature des inégalités, qui vont de mesures ciblées en faveur des plus pauvres à un renforcement du système sanitaire, ces deux stratégies pouvant parfois se combiner31. Il est paradoxal que les services de santé soient si souvent inaccessibles aux femmes ou non adaptés à leurs besoins alors que ces services dépendent tant d’elles. Elles sont les principaux prestataires de soins de la famille et constituent le pilier du personnel de santé du secteur formel et des prestataires de soins du secteur informel. Dans de nombreux pays, elles représentent la majorité du personnel du secteur formel de la santé (Figure 9). Les Figure 8 Présence de personnel de santé qualifié au moment données disponibles sont d’une qualité variade l’accouchement, par quintile de richesse ble et proviennent de différentes sources, des ménages, dans certains pays mais elles montrent que dans de nombreux 100 Présence de personnel de santé qualifié Quintile le plus pauvre Source : études démographiques et de santé dans certains pays (2000-2007). Tchad 2004 Népal 2006Pakistan 2006–07 Inde 2005–06 Indonésie 2002–03 Gabon 2000 Colombie 2005 pays, plus de 50 % du personnel du secteur formel de la santé est de sexe féminin34,35. au moment de l’accouchement (%) Cela signifie que sur les 59 millions d’agents de santé environ travaillant à temps plein dans le monde36, quelque 30 millions sont des femmes. Plusieurs autres millions jouent un rôle de prestataire de soins informels. Les femmes occupent des positions généralement considéréescommeinférieures,tels les soins infirmiers, obstétricaux et les servi- Quintile le plus riche ces de santé communautaires, et sont mino- Quintile de richesse du ménage ritaires dans les professions demandant un ComprEndrE La SanTé dES fEmmES danS LE mondE aCTuEL niveau de formation élevé35. Les infirmières, les sages-femmes, les agents de santé communautaires et les autres prestataires intervenant en première ligne sont principalement des femmes dans presque toutes les régions tandis que les hommes continuent d’occuper majoritairement les professions de médecin ou de dentiste. Il existe cependant des exceptions notables. Par exemple, on trouve davantage de femmes que d’hommes médecins en Estonie, en Mongolie, en Fédération de Russie et au Soudan. Généralement, plus de 70 % des médecins sont des hommes tandis que plus de 70 % des infirmières sont des femmes, un déséquilibre marqué. Dans les zones rurales de nombreux pays, les dispensateurs de services de santé sont rarement des femmes, ce qui peut s’expliquer en partie par l’insécurité que représente pour elles la vie dans des zones isolées. La tendance serait différente si les calculs intégraient les accoucheuses traditionnelles et les volontaires des villages, puisque dans de nombreux pays, ce sont les femmes qui jouent ces rôles. Toutefois, les informations à ce sujet sontrarement disponibles. On observe également quelques exceptions notables. Par exemple, l’Éthiopie et le Pakistan font partie des pays qui ont cherché activement à recruter et à former des agents de santé de sexe féminin dans les zones rurales. Les agents de santé de sexe féminin font face à plusieurs problèmes sanitaires en lien avec leur travail. Comme les femmes sont plus nombreuses parmi les travailleurs de santé et utilisent alors souvent des objets pointus et tranchants, elles représentent les deux tiers des cas d’hépatites B et C et des infections à VIH dues à des piqûres d’aiguille37. Elles sont également sujettes aux troubles musculo-squelettiques (résultant du port de lourdes charges) et à l’épuisement au travail37–41. Le personnel de santé féminin est également en contact avec des médicaments dangereux, mutagènes et éventuellement cancérigènes, et exposé à des risques chimiques comme les désinfec- Figure 9 Part des femmes dans le personnel de santé de certains pays tants et les stérilisants, qui peuvent entraî (1989-1997) ner de l’asthme, ainsi qu’à des problèmes Viet Nam reproductifs tels les avortements sponta États-Unis nés et les malformations congénitales. Les Royaume-Uni agents sanitaires communautaires de sexe Ouganda féminin risquent également d’être victimes Thaïlande de violence34. Suisse Espagne Afrique du SudConclusion Rwanda Fédération de Russie Ce chapitre d’introduction a résumé quel- Roumanie ques-uns des problèmes sanitaires rencon- Philippines trés par les femmes au cours de leur vie Pays-Bas et donné une vue d’ensemble de certains Hongrie déterminants de leur santé. Il apparaît que Allemagne les femmes du monde sont confrontées à Équateur des problèmes de santé à toutes les étapes Danemark de leur vie, depuis la petite enfance jusqu’à Chili la vieillesse, chez elles, sur leur lieu de tra-Canada vail ou dans la société dans son ensemble. Cambodge Les prochains chapitres vont s’intéresser de Brésil manière plus approfondie à ces problèmes, Autriche puisqu’ils se manifestentà différentesphases Argentine de l’existence, et montrer pourquoi les systè-0 25 50 75 100 mes de santé ne parviennent pas à répondre Femmes (%) correctement aux besoins des femmes. Sources : Gupta N et al.32 Lavallée R, Hanvoravongchai P, Gupta N.33 LES fEmmES ET La SanTé Résumé des conclusions et implications L’espérance de vie féminine a beaucoup progressé au cours de la deuxième moitié du siècle dernier, sans que ¦¦ cela ne profite cependant à toutes les femmes. De fortes différences subsistent ainsi s’agissant de l’espérance de vie et de la santé des femmes dans les différentes parties du globe. Une femme née dans un pays à fort revenu peut espérer vivre jusqu’à plus de 80 ans, contre 50 ans seulement pour une femme née en Afrique orientale ou australe. Une transition sanitaire est en marche à travers le monde, entraînant une évolution des principales causes de ¦¦ mortalité et de maladie : les maladies infectieuses comme la diarrhée et les affections maternelles sont en recul et se voient remplacées par les maladies non transmissibles et les maladies chroniques. Cette transition est toutefois plus ou moins rapide selon les régions du monde. Souvent, les femmes supportent un double fardeau, les risques sanitaires habituels liés aux maladies infectieuses et aux affections maternelles se couplant aux problèmes émergents liés aux maladies chroniques non transmissibles. Les femmes prodiguent l’essentiel des soins de santé dans le monde, à la fois dans les secteurs sanitaires ¦¦ formel et informel et à la maison. Néanmoins, les réponses apportées aux propres besoins de soins des femmes sont trop souvent insuffisantes, en particulier parmi les communautés rurales et pauvres. Le sexe et la sexospécificité ont de grandes répercussions sur la santé des femmes et doivent être pris en ¦¦ compte pour élaborer des stratégies appropriées pour la promotion de la santé et pour la prévention et le traitement des problèmes de santé. L’inégalité entre les sexes, seule ou combinée aux différences biologiques, peut accroître pour les femmes la vulnérabilité ou l’exposition à certains risques, d’où des différences parfois non reconnues dans la manifestation, la gravité et les conséquences des maladies, ou des réponses distinctes de services de santé. L’accès des femmes aux ressources et aux informations et services sanitaires peut également s’en trouver limité. Les sociétés et leurs systèmes de santé doivent mieux répondre aux besoins de santé des femmes, tant sur ¦¦ le plan de l’accès aux services et de leur exhaustivité que de la réactivité. Les politiques et programmes doivent s’assurer que ni les normes qui régissent les relations entre les sexes, ni les inégalités socio-économiques ne limitent la capacité des femmes à accéder aux informations sanitaires et aux services de soins. Des actions de plus grande envergure tels la réduction de la pauvreté, un meilleur accès à l’instruction, à la formation et à l’éducation et la multiplication des possibilités pour les femmes de participer aux activités économiques, sociales et politiques contribueront également à réaliser des progrès à long terme pour la santé féminine. ComprEndrE La SanTé dES fEmmES danS LE mondE aCTuEL Références 1. Charge mondiale de morbidité, mise à jour 2004. Genève, Organisation mondiale de la Santé, 2008. 2. Perspectives démographiques mondiales: la révision de 2006. New York, Division de la population de l’ONU, 2007. 3. Zhu WX, Lu L, Hesketh T. China’s excess males, sex selective abortion and one child policy: analysis of data from 2005 national intercensus survey. BMJ (Clinical Research Ed.), 2009, 338:b1211. PMID:19359290 doi:10.1136/bmj.b1211. 4. Statistiques sanitaires mondiales 2009. Genève, Organisation mondiale de la Santé, 2009. 5. Meslé F. 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Les familles sont moins nombreuses qu’il y a 30 ou 40 ans, le nombre moyen d’enfants par femme ayant considérablement chuté (voir le chapitre 1). Aujourd’hui, la santé et le développement de ces enfants constituent une préoccupation majeure de toutes les sociétés. La santé et le bien-être des petites filles est particulièrement important car elles assumeront un rôle procréateur et parce que la mauvaise santé des mères a des répercussions intergénérationnelles évidentes qui affectent la santé et les perspectives de développement de leurs enfants. Des décès d’enfants et de nourrissons toujours trop nombreux La mortalité des enfants a fortement reculé au cours des 50 dernières années. Toutefois, des millions d’enfants meurent prématurément et l’enfance reste une période de vulnérabilité à un large éventail de risques sanitaires. La charge de morbidité est particulièrement élevée en Afrique, mais elle est également forte dans les Régions de la Méditerranée orientale et de l’Asie du Sud-Est (Figure 1). À l’échelle mondiale, les principales causes de décès et d’incapacité chez les filles de moins de 10 ans sont les maladies transmissibles (infections des voies respiratoires et diarrhées) et les affections néonatales (faible poids de naissance, hypoxie et traumatisme à la naissance) qui, ensemble, représentent environ 60 % de l’ensemble des décès (Tableau 1)a. La plupart des décès des enfants de moins de 10 ans surviennent avant l’âge de 5 ans. Malgré les progrès considérables réalisés ces vingt dernières années sur le plan de la survie des enfants, quelque neuf millions d’enfants de moins de cinq ans, dont 4,3 millions de filles2, meurent chaque année d’affections qui sont en grande partie évitables et soignables. Les principales causes de ces décès sont la prématurité et le faible poids de naissance (11 %), les infections néonatales (11 %), les maladies diarrhéiques (17 %) et les infections respiratoires aiguës, principalement la pneumonie (18 %) (Figure 2). On estime que 200 millions d’enfants de moins de cinq ans ne développent pas leur plein potentiel en raison d’une mauvaise santé4. La malnutrition est directement responsable de décès d’enfants mais constitue également une cause sous-jacente de nombreux autres décès (voir ci-dessous et la figure 2). Outre la malnutrition (dénutrition), les autres principaux facteurs de risque de mortalité et de morbidité infanto-juvéniles Figure 1 Mortalité et charge de morbidité (AVCI) des filles de moins de 10 ans par Régions et grandes causes (2004) VIH Maladies cardio-vasculaires Tuberculose et paludisme et diabète Pays à Cancers Affections maternelles revenu élevé Troubles mentaux Affections périnatales Amériques* Troubles sensoriels Maladies diarrhétiques Pacifique Autres maladies Maladies respiratoires occidental* non transmissibles Autres maladies transmissibles Europe* Traumatismes et carences nutritionnelles Méditerranée orientale* Asie du Sud-Est Afrique 900 800 700 600 500 400 300 200 100 0 0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 22 AVCI pour 1 000 filles Nombre de décès pour 1 000 filles * Les pays à revenu élevé ne sont pas pris en compte dans les groupes régionaux. Source : Organisation mondiale de la Santé1 . a Les problèmes de santé survenant au cours des 28 premiers jours de vie (la période néonatale) comprennent la prématurité et le faible poids de naissance, l’hypoxie et le traumatisme à la naissance ainsi que d’autres affections périnatales. LES fEmmES ET La SanTé Tableau 1 Dix principales causes de mortalité de la population féminine âgée de 0 à 9 ans selon le groupe de revenu du pays (2004) Monde Rang Cause Décès (milliers) % Pays à faible revenu Rang Cause Décès (milliers) % 1 Infections des voies respiratoires inférieures 948 17.6 1 Infections des voies respiratoires inférieures 807 18.8 2 Maladies diarrhéiques 858 15.9 2 Maladies diarrhéiques 720 16.8 3 Prématurité et faible poids de naissance 567 10.5 3 Infections néonatales* 426 9.9 4 Infections néonatales* 545 10.1 4 Prématurité et faible poids de naissance 405 9.4 5 Hypoxie et traumatisme à la naissance 411 7.6 5 Paludisme 372 8.7 6 Paludisme 397 7.4 6 Hypoxie et traumatisme à la naissance 312 7.3 7 Rougeole 201 3.7 7 Rougeole 187 4.4 8 Déformations congénitales 188 3.5 8 Coqueluche 118 2.8 9 VIH/sida 138 2.5 9 Déformations congénitales 115 2.7 10 Coqueluche 125 2.3 10 VIH/sida 107 2.5 Pays à revenu intermédiaire Rang Cause Décès (milliers) % Pays à revenu élevé Rang Cause Décès (milliers) % 1 Prématurité et faible poids de naissance 155 14.6 1 Déformations congénitales 9 21.7 2 Infections des voies respiratoires inférieures 139 13.1 2 Prématurité et faible poids de naissance 7 17.3 3 Maladies diarrhéiques 137 12.9 3 Infections néonatales* 6 14.6 4 Infections néonatales* 113 10.7 4 Hypoxie et traumatisme à la naissance 3 7.6 5 Hypoxie et traumatisme à la naissance 96 9.0 5 Infections des voies respiratoires inférieures 2 4.2 6 Déformations congénitales 63 6.0 6 Maladies diarrhéiques 1 3.4 7 VIH/sida 30 2.8 7 Accidents de la circulation 1 3.3 8 Paludisme 25 2.3 8 Troubles endocriniens 1 2.8 9 Méningite 21 2.0 9 Violence 1 1.6 10 Noyades 19 1.8 10 Noyades 1 1.2 *Comprend les infections néonatales graves et d’autres causes non infectieuses survenant au cours de la période périnatale. Source : Organisation mondiale de la Santé1. sont l’insalubrité de l’eau, la mauvaise qualité de l’assainissement, la mauvaise hygiène, l’allaitement non optimal et la fumée provenant des combustibles solides à l’intérieur des habitations (Tableau 2). Le changement climatique pourrait empêcher de réunir les conditions élémentaires pour préserver la santé des enfants, à savoir une eau et un air sains, de la nourriture en quantité suffisante et un abri adéquat. La plupart des maladies mortelles varient en fonction des conditions climatiques. Le paludisme, la diarrhée et la malnutrition protéino-énergétique sont responsables chaque année de plus de trois millions de décès5. Une part très importante des décès d’enfants survient très tôt, en général au cours du premier mois de vie. Les décès intervenant au cours de la période néonatalea représentent environ la moitié des décès, toutes Régions confondues à l’exception de la Région africaine. Tandis que les taux de mortalité infanto-juvénile diminuent, la part totale des décès survenant durant la période néonatale tend à augmenter. Une des principales raisons en est que les interventions décisives réalisées durant cette période sont tributaires du bon fonctionnement du système de santé, qui doit pouvoir fournir des soins de bonne qualité aux femmes enceintes et à leurs nouveau-nés, et que bien souvent ces soins ne sont pas accessibles6. Les inégalités sur le plan de la mortalité infanto-juvénile s’expliquent principalement par les revenus : les enfants vivant dans des pays pauvres risquent bien plus de décéder prématurément que ceux vivant dans des pays plus riches et, au sein d’un même pays, les enfants des ménages pauvres risquent davantage de décéder que ceux des ménages plus aisés. La fiLLETTE Les disparités sanitaires entre les sexes D’une manière générale, les filles ne risquent pas plus que les garçons de décéder avant l’âge de cinq ans. En réalité, elles pourraient même êtreavantagées(Figure 3). Cependant, dans quelques pays (dont la Chine et l’Inde) les taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans sont plus élevés chez les filles que les garçons2. Les enquêtes menées dans les ménages indiquent qu’au cours des vingt dernières années, ce désavantage féminin a généralementperduréenIndeetqu’ilseserait aggravé dans certains autres pays comme le Népal et le Pakistan. Au contraire, des données récentes indiquent qu’au Bangladesh, l’écart s’est considérablement réduit au fil du temps et que les filles de moins de cinq ans Tableau 2 Principaux facteurs de risque de mortalité chez les filles de moins de cinq ans (2004) Risque Pays à faible revenu Pays à revenu intermédiaire Pays à revenu élevé Nombre de décès pour 100 000 enfants Insuffisance pondérale de l’enfant 641 71 2 Eau non potable, mauvaise qualité de l’assainissement et de l’hygiène 410 98 4 Allaitement sous-optimal 302 111 17 Fumée intérieure provenant de combustibles solides 248 32 0 31 1 Carence en vitamine A 180 Carence en zinc 119 21 1 Source : Organisation mondiale de la Santé3. ont des taux de mortalité plus faible que les garçons7. Si, durant l’enfance, il existe entre les filles et les garçons des disparités d’accès aux principaux soins, elles ne sont généralement pas systématiques et leur ampleur diffère à l’intérieur des régions et pays et entre eux et selon les interventions. Par exemple, les données disponibles sur la couverture vaccinale indiquent que, globalement, ni les garçons ni les filles ne sont systématiquement favorisés, même si, dans différents pays, on observe dans ce domaine une différence importante entre les sexes (Figure 3). Dans certains pays, la couverture vaccinale est plus élevée chez les garçons, et l’inverse est vrai dans d’autres. Cependant, il apparaît que les garçons souffrent généralement plus souvent que les filles de malnutrition sévère (retard de croissance). La dénutrition constitue la cause initiale de décès de 3,5 millions d’enfants et représente 35 % de la charge de morbidité chez les enfants de moins de cinq ans (Figure 2)8. La malnutrition est souvent aiguë chez les populations touchées par les crises humanitaires9. L’insuffisance d’accès aux aliments nutritifs, en particulier dans le contexte actuel de hausse des prix alimentaires, est une cause directe courante de malnutrition. Les mauvaises pratiques alimentaires, comme un allaitement inapproprié et des aliments moins ou insuffisamment nutritifs, y contribuent également fortement. Les causes indirectes de la malnutrition comptent actuellement pour une part plus importante de la mortalité et de la charge de Figure 2 Répartition des principales causes de décès chez les filles de moins de cinq ans, y compris la part imputable à la dénutrition (2004) Traumatismes 4% Pneumonie Diarrhée 18% 86% 69% 59% 66% 17% Rougeole 4% Paludisme 7%Autres infections 11% Carences nutritionnelles 2% Infections néonatales graves 11% Hypoxie et traumatisme à la naissance 8 % Maladies non transmissibles 7% Prematuritée 11% 66% 33% 32% Les zones grisées représentent la part imputable à la dénutrition pour chaque cause de décès. Source : Organisation mondiale de la Santé3. LES fEmmES ET La SanTé Figure 3 Différences entre les sexes selon les principaux indicateurs de santé de l’enfant, dans certains pays (2002-2007) 30 Différences entre les filles et les garçons en taux de mortalité Pas de Les filles sont avantagées par rapport aux garçons différence Les garçons sont avantagés par rapport aux filles 20 Différences entre les filles et les garçonsen pourcentage de couverture 10 -10 -10 -20 0 -20 -30 -30 Nombre Couverture DTC Utilisation Traitement Retard Taux de de cas (3e dose) d’une contre de mortalité des d’IRA moustiquaire la diarrhée (3) croissance (4) enfants de dirigés vers un moins de établissement de santé cinq ans Afrique Amériques Méditerranée orientale Europe Asie du Sud-Est Pacifique occidental Médiane Chaque point correspond aux données d’un pays. (1) Infections respiratoires aiguës (2) Diphtérie, tétanos, coqueluche. 3e dose. (3) Sels de réhydratation orale (SRO) ou préparations maison recommandées. (4) Rapport poids/taille inférieur à deux écarts-types par rapport à la médiane de la population de référence. Source: études démographiques et de santé réalisées dans 43 pays (des données étaient disponibles dans 31 pays pour le retard de croissance et dans 14 pour l’utilisation d’une moustiquaire) [2002-2007]. morbidité que ses causes directes10. L’infection (notamment la diarrhée fréquente ou continue, la pneumonie, la rougeole et le paludisme) représente une cause indirecte importante affectant l’état nutritionnel de l’enfant11. La diarrhée aiguë, en particulier, entraîne des pertes hydriques et peut mettre en danger la vie, notamment celles des jeunes enfants et des personnes souffrant de malnutrition ou de déficiences immunitaires. Les enfants présentant une insuffisance pondérale sont également plus vulnérables à presque toutes les maladies infectieuses et le pronostic de rétablissement complet est moins bon. Les facteurs de risque pour ces infections sont notamment l’eau non potable et la mauvaise qualité de l’assainissement et de l’hygiène. Selon les estimations, 88 % des cas de diarrhée dans le monde seraient dus à ces facteurs10. Chaque année, environ 860 000 décès d’enfants de moins de cinq ans sont directement et indirectement imputables à la malnutrition en résultant10. Les enfants de femmes souffrant de malnutrition peuvent naître prématurément ou avec un faible poids, et risquent ensuite d’avoir une moins bonne santé et de souffrir de troubles d’apprentissage, voire de mourir prématurément12,13. La dénutrition n’est qu’un aspect de la malnutrition. Parallèlement à ce phénomène, la hausse des taux d’obésité et de surcharge pondérale chez les enfants du monde entier représente un risque majeur pour leur santé une fois qu’ils seront devenus adultes. Dans certains pays, jusqu’à 20 % des enfants de moins de cinq ans sont en surpoids (par exemple en Albanie, au Lesotho, en Ukraine)14 et dans quelques pays (Albanie, Bosnie-Herzégovine, Ukraine) plus de 10 % d’entre eux sont obèses. Dans les pays développés et en développement, les filles de moins de cinq ans et les adolescentes risquent davantage de souffrir de surpoids que les garçons (voir également le prochain chapitre)15–17. La fiLLETTE Mutilations sexuelles féminines Les filles et les femmes sont exposées à des risques de santé particuliers liés à des pratiques dommageables telles que les mutilations sexuelles féminines (MSF). On estime que des millions de filles et de femmes ont subi des MSF, c’est-à-dire l’ablation d’une partie ou de la totalité des organes génitaux externes féminins ou d’autres lésions des organes génitaux pour des raisons non médicales18. En Afrique, selon les estimations, 92,5 millions de filles âgées de plus de 10 ans vivent avec les séquelles des MSF, dont 12,5 millions ont entre 10 et 14 ans19. Sur ce continent, quelque trois millions de filles subissent chaque année ces pratiques20. Bien que les données disponibles soient lacunaires, il semblerait que ces mutilations aient perdu un peu de terrain ces dernières années. Cependant, les données disponibles montrent qu’elles sont de plus en plus fréquemment pratiquées par des professionnels de santé, que l’âge moyen des victimes a diminué et que la proportion de filles qui les subissent avant l’âge de cinq ans est en forte augmentation. Abus et maltraitance De nombreux enfants, filles ou garçons, subissent des maltraitances physiques et psychologiques, sont victimes d’abus sexuels, de négligence et d’exploitation, notamment commerciale. Même s’il existe peu de données fiables et complètes, il semble que les filles soient bien davantage victimes d’abus sexuel. Des estimations fondées sur des données factuelles ont été établies sur la prévalence des différents types d’abus sexuels chez les enfants et les jeunes jusqu’à 18 ans : ¦¦ abus sexuel sans contact physique (3,1 % chez les garçons et 6,8 % chez les filles) ; ¦¦ abus sexuel avec contact physique (3,7 % et 13,2 %) ; ¦¦ abus sexuel avec pénétration (1,9 % et 5,3 %) ; 21 ¦¦ toutes formes d’abus sexuel (8,7 % et 25,3 %) . Les mauvais traitements infligés aux enfants ont des conséquences immédiates et à long terme sur la santé de la femme et concourent beaucoup à la dépression, à la consommation d’alcool et de drogue et à la dépendance à ces produits, au trouble panique, au stress post-traumatique et aux tentatives de suicide21. Dans les situations d’urgence et d’exil, les filles peuvent être particulièrement exposées à la violence sexuelle, à l’exploitation et aux mauvais traitements de la part des soldats, des membres des forces de sécurité, des membres de leur communauté, des travailleurs humanitaires ou d’autres personnes22. Conclusion La santé des adultes de demain dépend largement de la santé des enfants d’aujourd’hui. Même si la petite fille bénéficie d’un certain nombre d’avantages biologiques favorisant sa survie et sa santé, elle doit également faire face à des désavantages sociaux, culturels et liés à l’appartenance sexuelle qui mettent en péril son état sanitaire. De nombreux problèmes de santé rencontrés par les femmes adultes trouvent leur origine dans l’enfance, notamment la mauvaise alimentation, qui revêt une importance particulière du fait de ses répercussions intergénérationnelles. Empêcher la maltraitance et la négligence à l’égard des petites filles et garantir un environnement favorable durant la petite enfance contribuera à ce qu’elles atteignent un niveau optimal de développement physique, social et affectif. Cela permettra également d’éviter une charge de morbidité importante liée aux maladies chroniques, dont, plus tard dans la vie, des problèmes de santé mentale et des troubles liés à la consommation de substances. LES fEmmES ET La SanTé Résumé des conclusions et implications Des progrès considérables ont été réalisés s’agissant de la santé de l’enfant, et, aujourd’hui, les filles ont bien ¦¦ plus de chances de continuer à vivre après leur enfance qu’il y a quelques décennies. Cependant, ces avancées sont disparates, en particulier dans les pays les plus pauvres. Elles ont été les moins rapides dans les pays caractérisés par de nombreux conflits et une forte incidence du VIH/sida. La pneumonie et la diarrhée, des affections largement évitables et soignables, continuent de tuer chaque année plus de trois millions de filles de moins de cinq ans. La malnutrition est un déterminant essentiel de la santé, durant l’enfance et après. L’état nutritionnel des filles ¦¦ est particulièrement important en raison de leur rôle procréateur et des répercussions intergénérationnelles d’une mauvaise nutrition. Les filles et les femmes peuvent être exposées à des risques de santé spécifiques liés à des pratiques domma ¦¦ geables. Environ 100 millions de filles et de femmes ont subi des mutilations sexuelles féminines. Il apparaît que, malgré une baisse de leur prévalence globale, ces mutilations sont de plus en plus médicalisées et pratiquées sur des sujets encore plus jeunes. Les filles sont beaucoup plus souvent victimes d’abus sexuel que les garçons, une fille sur quatre se déclarant ¦¦ victime d’abus au cours de sa vie. Pour résoudre ces problèmes, il faut se concentrer sur les actions prioritaires : maternité sans risque, amé ¦¦ lioration de l’état nutritionnel, accès à la vaccination et aux soins de santé pour les maladies de l’enfant, approches coordonnées de lutte contre les abus et la maltraitance à l’égard des enfants. Il faut également garantir un environnement favorable durant la petite enfance, qui aiderait les petites filles à atteindre un niveau optimal de développement physique, social et affectif. Des actions aux niveaux politique, juridique et social sont également nécessaires pour éliminer les MSF ainsi que d’autres pratiques dommageables. Il faut de surcroît se préoccuper des besoins physiques et psychosociaux des enfants qui grandissent dans un contexte de crise humanitaire. Références 1. The global burden of disease: 2004 update. Genève, Organisation mondiale de la Santé, 2008. 2. Statistiques sanitaires mondiales 2009. Genève, Organisation mondiale de la Santé, 2009. 3. 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(http://www.who.int/child_adolescent_health/topics/prevention_care/child/nutrition/ malnutrition/fr/index.html, consulté le 8 juin 2009). 12. Berkman DS et al. Effects of stunting, diarrhoeal disease, and parasitic infection during infancy on cognition in late childhood: a follow-up study. Lancet, 2002, 359:564–571. PMID:11867110 doi:10.1016/ S0140-6736(02)07744-9 13. Mendez MA, Adair LS. Serverity and timing of stunting in the first two years of life affect performance on cognitive tests in late childhood. The Journal of Nutrition, 1999, 129:1555–1562. PMID:10419990 14. Base de données mondiale de l’OMS sur la croissance et la malnutrition de l’enfant, Genève, 2009 (http://www.who.int/nutgrowthdb). 15. Kelishadi R et al. Obesity and associated modifiable environmental factors in Iranian adolescents: Isfahan Healthy Heart Program - Heart Health Promotion from Childhood. Pediatrics International, 2003, 45:435–442. PMID:12911481 doi:10.1046/j.1442-200X.2003.01738.x 16. Al-Nuaim AR, Bamgboye EA, al-Herbish A. The pattern of growth and obesity in Saudi Arabian male school children. International Journal of Obesity and Related Metabolic Disorders, 1996, 20:1000–1005. PMID:8923156 17. McCarthy HD, Ellis SM, Cole TJ. Central overweight and obesity in British youth aged 11-16 years: cross sectional surveys of waist circumference. BMJ (Clinical Research Ed.), 2003, 326:624. PMID:12649234 doi:10.1136/bmj.326.7390.624 18. Éliminer les mutilations sexuelles féminines : déclaration interinstitutions. Genève, Organisation mondiale de la Santé, 2008 (http://whqlibdoc.who.int/publications/2008/9789242596441_fre.pdf, consulté le 18 juillet 2009). 19. Yoder PS, Khan S. Numbers of women circumcised in Africa: the production of a total. Calverton, MD, Macro International Inc., 2007. 20. Changing a harmful social convention: female genital mutilation/cutting. Innocenti Digest, Numéro 12. Florence, UNICEF, 2005. 21. Andrews G et al. Child sexual abuse. 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On compte 1,2 milliard d’adolescents âgés de 10 à 19 ans à travers le monde. Environ 90 % d’entre eux vivent dans des pays en développement et environ 600 millions sont de sexe féminin1. La santé et le développement de ces jeunes filles revêtent une grande importance pour aujourd’hui comme pour quand elles passeront à l’âge adulte. La situation sanitaire des adolescents détermine leur santé et leur bien-être futurs, mais aussi la santé de leurs enfants et le développement de leurs sociétés. Une période synonyme de bonne santé mais aussi de risques L’adolescence se caractérise habituellement par des taux de maladie et de décès peu élevés et c’est là où les taux de mortalité sont les plus bas. Néanmoins, cette période est également synonyme de profonds changements sur les plans physique, social et affectif. Dans de nombreux cas, les filles ne bénéficient pas du soutien nécessaire pour les affronter. Leurs sociétés ne fournissent pas les conditions optimales pour qu’elles se développent en bonne santé. Par conséquent, le passage à l’âge adulte risque de ne pas se passer dans de bonnes conditions, les jeunes filles étant devenues vulnérables à des comportements dangereux pour leur santé. C’est en Afrique et en Asie du Sud-Est que l’on observe la charge de morbidité et les taux de mortalité les plus importants chez les adolescentes (Figure 1). Les suicides et traumatismes résultant d’accidents de la route et de brûlures figurent parmi les principales causes de décès à travers le monde2. Les maladies transmissibles, dont le VIH/sida, sont également des facteurs de mortalité importants, en particulier en Afrique. Toutes Régions confondues, les adolescentes supportent de surcroît de fortes charges de morbidité liées aux problèmes mentaux2. Dans les pays à revenu élevé des Régions Amériques, Europe et Pacifique occidental, les troubles neuropsychiatriques, comme la dépression unipolaire majeure, la schizophrénie et les troubles bipolaires2 sont ainsi responsables d’une part importante de la charge de morbidité parmi les adolescentes. Dans les Régions de la Méditerranée orientale et de l’Asie du Sud-Est, les traumatismes se classent au même rang que les problèmes d’ordre neuropsychiatrique s’agissant des répercussions sur la charge de morbidité. Dans les pays à revenu élevé et intermédiaire en général, les accidents de la route représentent la principale Figure 1 Mortalité et charge de morbidité (AVCI) des adolescentes âgées de 10 à 19 ans par Régions et grandes causes (2004) VIH Maladies cardio-vasculaires Tuberculose et paludisme et diabète Pays à revenu élevé Cancers Affections maternelles Troubles mentaux Amériques* Troubles sensoriels Pacifique Autres maladies occidental* non transmissibles Traumatismes Europe* Méditerranée orientale* Asie du Sud-Est Afrique Affections périnatales Maladies diarrhétiques Maladies respiratoires Autres maladies transmissibles et carences nutritionnelles 200 180 160 140 120 100 80 60 40 20 0 0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0 AVCI pour 1 000 filles Nombre de décès pour 1 000 filles * Les pays à revenu élevé ne sont pas pris en compte dans les groupes régionaux. Source : Organisation mondiale de la Santé2. LES fEmmES ET La SanTé cause de décès chez les adolescentes tandis que dans les pays à faible revenu, les infections des voies respiratoires et d’autres maladies transmissibles prédominent (Tableau 1). Puberté et début de la vie sexuelle Pour les filles, le début de la puberté correspond au commencement de leur vie sexuelle et reproductrice. Les expériences vécues durant cette période ainsi que les opportunités et la protection offertes par leurs cultures et sociétés peuvent déterminer si elles vivront en bonne santé, en participant pleinement à la société, ou si elles ne sauront exploiter leur potentiel et adopteront des comportements néfastes à l’origine de problèmes de santé et de souffrances. De nombreuses adolescentes font face à des difficultés et sont marginalisées du fait de la pauvreté, de traditions sociales et culturelles dommageables, de crises humanitaires et de l’isolement géographique. Ces facteurs les empêchent d’accéder à l’information, à l’instruction et aux soins de santé et de profiter d’opportunités économiques3. Dans certaines régions, on force les adolescentes à se marier et à avoir des enfants précocement, alors qu’il s’agit justement de la période où, pour se protéger des risques pesant sur leur santé, elles ont le plus besoin d’être accompagnées. Dans les pays en développement, en particulier en Asie, 38 % des filles se marient avant l’âge de 18 ans et 14 % avant l’âge de 15 ans3. Tableau 1 Dix principales causes de mortalité de la population féminine âgée de 10 à 19 ans selon le groupe de revenu du pays (2004) Monde Rang Cause Décès (milliers) % Pays à faible revenu Rang Cause Décès (milliers) % 1 Infections respiratoires des voies inférieures 57 8.9 1 Infections respiratoires des voies inférieures 49 10.6 2 Accidents de la circulation 37 5.6 2 Suicide et automutilations 24 5.2 3 Suicide et automutilations 36 5.5 3 Incendies 21 4.6 4 Tuberculose 29 4.5 4 Tuberculose 21 4.5 5 Incendies 24 3.8 5 Méningite 18 3.9 6 Noyades 23 3.5 6 VIH/sida 17 3.7 7 Méningite 21 3.3 7 Paludisme 16 3.4 8 VIH/sida 20 3.0 8 Accidents de la circulation 16 3.4 9 Paludisme 17 2.7 9 Maladies diarrhéiques 12 2.6 10 Maladies diarrhéiques 14 2.2 10 Noyades 11 2.4 Pays à revenu intermédiaire Rang Cause Décès (milliers) % Pays à revenu élevé Rang Cause Décès (milliers) % 1 Accidents de la circulation 17 9.9 1 Accidents de la circulation 4 28.9 2 Noyades 11 6.8 2 Suicide et automutilations 1 9.5 3 Suicide et automutilations 10 6.2 3 Violence 1 5.0 4 Tuberculose 8 4.7 4 Leucémie 1 4.2 5 Infections respiratoires des voies inférieures 8 4.5 5 Déformations congénitales 1 4.2 6 Leucémie 6 3.8 6 Troubles endocriniens 0 3.1 7 Violence 5 3.0 7 Intoxications 0 2.0 8 Déformations congénitales 4 2.6 8 Infections respiratoires des voies inférieures 0 1.5 9 Intoxications 4 2.4 9 Accidents vasculaires cérébraux 0 1.5 10 Incendies 3 1.8 10 Épilepsie 0 1.3 Source : Organisation mondiale de la Santé2. L’adoLESCEnTE Contrairement aux idées reçues, il ne semble pas qu’au niveau mondial, les filles aient aujourd’hui leur première relation sexuelle plus tôt que par le passé. Dans presque toutes les régions du monde, elle a lieu vers la fin de l’adolescence, entre 15 et 19 ans4. Malheureusement, pour beaucoup, une activité sexuelle précoce est synonyme de coercition ou même de violence5. Plus tôt une jeune femme aura un rapport sexuel, plus il risquera de se passer sous la contrainte5. Les adolescentes sont exposées aux grossesses non désirées et aux infections sexuellement transmissibles, dont l’infection à VIH, et en subissent à long terme les séquelles sur leur santé mentale et physique. Peu de jeunes femmes utilisent un moyen de contraception lors de leur premier rapport6. Le recours à la contraception est limité par leur propre manque d’informations et de connaissances pratiques, et par le fait que la plupart des services de soins de santé génésique des pays en développement sont conçus pour répondre aux besoins des femmes mariées en âge de procréer7. Grossesse adolescente De manière générale, les taux de natalité ont diminué chez les adolescentes mais ils restent élevés dans certaines parties d’Afrique et d’Asie8. La grossesse adolescente est plus fréquente dans les zones pauvres et rurales, et chez les populations les moins instruites (Figure 2). Pour différentes raisons, la grossesse et l’accouchement sont plus risqués chez les très jeunes adolescentes. Dans les pays en développement, les complications qui leur sont associées représentent la première cause de mortalité chez les jeunes femmes âgées de 15 à 19 ans. Dans le monde, environ 15 % du total des décès liés à la maternité surviennent lors de l’adolescence. En Afrique, ce chiffre est de 26 %9. La mauvaise santé des nourrissons issus d’une maternité adolescente en illustre les conséquences sanitaires indésirables : les décès périnatals sont deux fois plus importants lorsque la mère est âgée de moins de 20 ans que lorsqu’elle a de 20 à 29 ans. Par ailleurs, les bébés nés d’une mère adolescente risquent davantage d’avoir un faible poids de naissance, qui est un facteur de risque de mauvaise santé durant le premier âge10. Comme de nombreuses adolescentes connaissent des grossesses non désirées, les taux d’avortement à risque sont élevés dans cette population, en particulier en Afrique où un sur quatre concerne une jeune fille âgée de 15 à 19 ans11. Les séquelles immédiates et à long terme de telles interventions (notamment les hémorragies, les infections de l’appareil reproducteur et la stérilité) même lorsqu’elles n’aboutissent pas au décès de la jeune fille, peuvent être très graves. Infections sexuellement transmissibles Les jeunes femmes sont particulièrement vulnérables à l’infection à VIH, du fait d’un ensemble de facteurs biologiques, de leur manque d’accès aux informations et aux services ainsi que de normes et de valeurs sociales restreignant leur capacité à se pro téger. Leur vulnérabilité peut être encore aggravée lors des crises humanitaires et des situations d’urgence. En effet, les difficultés économiques en résultant accentuent les Femmes âgées de 15 à 19 ans ayant déjà été enceintes (%) Figure 2 Taux de grossesse des adolescentes en fonction du niveau d’instruction, dans certains pays (1990-2005) 70 60 50 40 30 20 10 Maximum Minimum 0 Médiane Aucune instruction Enseignement Enseignement secondaire primaire uniquement ou supérieur risques d’exploitation, par exemple sous la forme de trafic humain, ainsi que les risques pour la santé génésique associés à la prosti tution contre de l’argent et des produits de Source : études démographiques et de santé réalisées dans 55 pays (1990-2005). première nécessité. LES fEmmES ET La SanTé Figure 3 Prévalence du VIH parmi les adolescents âgés de 15 à 19 ans, par sexe, dans certains pays de l’Afrique subsaharienne (2001-2007) 12 Sujets masculins Sujets féminins 10 8 6 4 2 0 Adolescents âgés de 15 à 19 ans vivant avec le VIH (%) Source : études démographiques et de santé réalisées dans 16 pays (Afrique subsaharienne, entre 2001 et 2007) Les jeunes femmes ont tendance à avoir des relations sexuelles avec des hommes plus âgés et plus expérimentés, qui risquent davantage d’être infectés par le VIH. Dans la plupart des pays d’Afrique pour lesquels des données sont disponibles, les adolescentes sont généralement davantage infectées que les garçons du même âge (voir le chapitre 4) (Figure 3). Même si beaucoup de jeunes filles ont entendu parler du VIH/sida, seules 38 % d’entre elles sont capables de décrire correctement les principaux moyens d’éviter de le contracter. Seule une minorité utilise des préservatifs lors de rapports à risque et un nombre encore plus faible connaît sa sérologie VIH7,12. Ces données n’ont sans doute rien de surprenant puisque, en matière de VIH, les programmes de prévention, d’information et de services destinés aux jeunes ne sont généralement pas mis en oeuvre de manière satisfaisante12. Consommation de substances Les rapports sexuels non protégés ne sont certainement pas le seul facteur de risque important chez les adolescentes. Entre 1993 et 2003, leur consommation d’alcool a augmenté dans de nombreux pays européens13. Parallèlement, les données provenant de 37 pays à revenu faible et intermédiaire indiquent que 14 % des filles âgées de 13 à 15 ans ont consommé de l’alcool au cours du dernier mois contre 18 % pour les garçons14. Du fait des différences de poids et de teneur corporelle en eau entre garçons et filles, ces dernières sont plus sensibles aux effets psychoactifs de l’alcool et donc, aux conséquences liées à sa consommation comme la violence et les traumatismes non intentionnels. Sous l’emprise de l’alcool, elles sont également plus vulnérables à la coercition sexuelle15. Comme les garçons, de nombreuses filles commencent à fumer au cours de l’adolescence et il semble que la publicité pour le tabac cible de plus en plus les filles et les femmes16. Les données provenant de 151 pays indiquent qu’environ 10 % des adolescents (12 % pour les garçons et 7 % pour les filles) fument des cigarettes et 10 % consomment d’autres produits à base de tabac (par exemple la pipe, la pipe à eau, le tabac sans fumée et les bidis)17. Les filles fument davantage dans les pays à revenu élevé que dans les pays à revenu faible18. Mauvaise alimentation et sédentarité La mauvaise alimentation et la sédentarité constituent d’importants facteurs de risque pour les maladies chroniques, entraînant décès prématurés et incapacités à l’âge adulte. C’est durant l’adolescence que les filles choisissent leurs types d’alimentation et d’activité physique futurs (néanmoins, L’adoLESCEnTE ce choix est limité dans les communautés pauvres). De mauvaises habitudes peuvent entraîner surpoids et obésité. Les adolescents obèses le resteront probablement à l’âge adulte et seront donc davantage exposés aux maladies, comme l’arthrose, le diabète et les maladies cardio-vasculaires, et ce plus tôt que les autres personnes19. Tandis que, dans de nombreux pays, les adolescentes continuent de souffrir de dénutrition, des données provenant de 20 pays à revenu faible et intermédiaire indiquent que, dans ces derniers, environ 12 % des filles scolarisées de 13 à 15 ans sont en surpoids20. Non seulement l’activité physique est déterminante pour éviter de grossir mais elle permet également aux adolescents de mieux maîtriser leur anxiété et leurs problèmes de dépression. Ceux qui pratiquent une activité physique se conduisent globalement de manière plus saine : par exemple, ils ne fument pas, ne boivent pas, ne consomment pas de drogues. Ils obtiennent également de meilleurs résultats scolaires20. Cependant, des données provenant de Figure 4 Étudiants âgés de 13 à 15 ans ne satisfaisant pas aux niveaux recommandés d’activité physique 100 dans certains pays (2003-2008) 90 80 70 60 50 Au-dessus de laencore plus réd diagonale : les fillesuite que les garçons. ont une activité physique AfriAmque MéAsiPacériques diterranée orientale e du Sud-Est ifique occidental Filles (%) 50 60 70 80 90100 Garçons (%) Chaque point correspond à un pays. Source : enquêtes sur la santé des écoliers réalisées dans 36 pays (2003-2008). 36 pays à revenu faible et intermédiaire montrent que, dans ces derniers, 86 % des filles n’atteignent pas les niveaux recommandés d’activité physique, un chiffre bien plus élevé que pour les garçons (Figure 4). La santé mentale pendant l’adolescence Puisque l’adolescence correspond à des changements sur les plans social, affectif et physique, il n’est pas surprenant que les jeunes femmes soient particulièrement exposées aux problèmes de santé men- tale comme la dépression unipolaire majeure, la schizophrénie et les troubles bipolaires2. Les facteurs de risque à l’origine de ces troubles ne se limitent pas à la crise d’identité ou à l’influence du groupe, mais englobent la violence (abus sexuel pendant l’enfance, violence entre les parents, châtiments corporels à l’école, brimades et coercition sexuelle), la dévalorisation ou la restriction des opportunités pour les filles, et la pauvreté (en particulier lorsqu’elle empêche la scolarisation)21. Ne pas se préoccuper de ces problèmes pendant l’adolescence peut avoir de sérieuses répercussions au cours de l’âge adulte et de la vieillesse. Ce problème est également abordé aux chapitres 5 et 6. Conclusion L’adolescence est une période cruciale pour les filles. Elle influence profondément le type de femme et de mère qu’elles deviendront. Les comportements adoptés durant l’adolescence sont souvent dictés par le contexte social et économique dans lequel les adolescents grandissent. Aujourd’hui, il se caractérise trop souvent par une absence de compréhension et de sécurité. Des actions sont nécessaires pour s’assurer que les sociétés et leurs systèmes de santé répondent de manière appropriée aux besoins de santé et de développement des adolescentes. LES fEmmES ET La SanTé Résumé des conclusions et implications Pour les filles, l’adolescence est généralement une période de bonne santé caractérisée par des opportunités ¦¦ de croissance et de développement. Néanmoins, les traumatismes, les accidents de la route et le VIH/sida représentent une part importante des décès et des incapacités de ce groupe d’âge. Dans les pays en développement, la mortalité maternelle constitue la principale cause de décès et d’incapacité chez les 15-19 ans. Au cours de l’adolescence, les problèmes de santé mentale contribuent largement à la morbidité et à la morta ¦¦ lité et, s’ils ne sont pas décelés, peuvent fragiliser le fonctionnement psychologique et social des individus, durant cette période mais également à long terme. Les adolescentes sont exposées à une activité sexuelle à risque, souvent non souhaitée, qui entraîne la contrac ¦¦ tion du VIH/sida et d’autres infections sexuellement transmissibles et des grossesses non désirées. Dans certaines parties d’Asie et d’Afrique, les taux de natalité restent élevés chez les adolescentes et ce sont les jeunes filles pauvres, vivant dans des zones rurales et les moins éduquées qui risquent le plus de tomber enceintes. La grossesse et la maternité précoces peuvent s’accompagner d’importants problèmes de santé dont l’avortement à risque. Les répercussions sanitaires concernent non seulement les adolescentes mais également leurs nourrissons. Le nombre de filles de moins de 20 ans infectées par le VIH est élevé dans presque tous les pays touchés par ¦¦ une épidémie généralisée à VIH, car les jeunes filles ont généralement des relations sexuelles avec des hommes plus âgés, qui possèdent une plus grande expérience sexuelle et risquent donc davantage d’être infectés. Les adolescentes consomment de plus en plus de tabac et d’alcool. Ces comportements, tout comme la mau ¦¦ vaise alimentation et la sédentarité, risquent d’altérer leur santé future. Par conséquent, il importe de s’assurer que les adolescentes puissent bénéficier d’un enseignement primaire ¦¦ et secondaire et notamment d’une éducation sexuelle complète basée sur les connaissances pratiques. Elles doivent également pouvoir pratiquer une activité physique et adopter une alimentation appropriée. Il faut les protéger contre le mariage précoce, l’exploitation et les abus, et notamment prévenir la violence infligée par les partenaires intimes et la violence sexuelle. Par ailleurs, elles doivent pouvoir accéder aux services de santé et les utiliser, en particulier s’agissant des soins de santé sexuelle, génésique et mentale. Les mesures destinées à limiter la consommation de tabac et d’alcool et à améliorer la sécurité routière sont importantes. Mieux ventiler les informations sanitaires et les recherches d’intervention selon l’âge et le sexe permettra de mettre en évidence les besoins spécifiques des adolescentes et de déterminer comment les satisfaire. Les sociétés dans leur ensemble doivent les accompagner pour affronter les changements physiques et affectifs de cette période et pour que le passage à l’âge adulte se fasse en bonne santé. L’adoLESCEnTE Références 1. World population prospects: the 2008 revision. New York, NY, Division de la population des Nations Unies, 2008 (http://www.un.org/esa/population/, consulté le 19 mars 2009). 2. The global burden of disease: 2004 update. Genève, Organisation mondiale de la Santé, 2008. 3. Levine R et al. Girls count. A global investment and action agenda. Washington, DC, Centre for Global Development, 2008. 4. Wellings K et al. Sexual behaviour in context: a global perspective. Lancet, 2006, 368:1706–1728. PMID:17098090 doi:10.1016/S0140-6736(06)69479-8 5. Garcia-Moreno C et al. WHO multi-country study on women’s health and domestic violence. Initial results on prevalence, health outcomes and women’s responses. Genève: Organisation mondiale de la Santé, 2005. 6. Lloyd CB, coordinateur. Growing up global. The changing transitions to adulthood. Washington, DC, National Academies Press, 2005. 7. Khan S, Mishra V. Youth reproductive and sexual health. DHS comparative reports, Numéro 19. Calverton, MD, Macro International Inc., 2008. 8. World fertility patterns 2008. New York, NY, Division de la population des Nations Unies, 2009. 9. Patton GC et al. Global patterns of mortality in young people. Lancet. Sous presse. 10. Why is giving special attention to adolescents important for achieving Millennium Development Goal 5? Note d’information sur la grossesse des adolescentes. Genève, Organisation mondiale de la Santé, 2008. 11. Unsafe abortion: global and regional estimates of the incidence of unsafe abortion and associated mortality in 2003. 5e édition. Genève, Organisation mondiale de la Santé, 2007. 12. Rapport sur l’épidémie mondiale de sida 2008. Genève, Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA), 2008. 13. Alcohol and other drug use among students in 35 European countries. Rapport du projet ESPAD (European School Survey Project on Alcohol and Other Drugs), 2003. Stockholm, Swedish Council for Information on Alcohol and Other Drugs, 2004. 14. Enquête mondiale réalisée en milieu scolaire sur la santé des élèves. Genève, Organisation mondiale de la Santé (http://www.who.int/chp/gshs/Core_Modules_FR.pdf, consulté le 18 juin 2009). 15. Global status report: alcohol and young people. Genève, Organisation mondiale de la Santé, 2001. 16. Sifting the evidence: gender and tobacco control. Genève, Organisation mondiale de la Santé, 2007. 17. Warren CW et al. Global Youth Tobacco Surveillance, 2000–2007. MMWR. Surveillance Summaries, 2008, 57:1–28. PMID:18219269 18. Enquête sur la santé dans le monde. Genève, Organisation mondiale de la Santé (http://www.who.int/ topics/health_surveys/fr/, consulté le 18 juin 2009). 19. Why does childhood overweight and obesity matter? Genève, Organisation mondiale de la Santé (http:// www.who.int/dietphysicalactivity/childhood_consequences/en/index.html, consulté le 18 juin 2009). 20. Physical activity. Genève, Organisation mondiale de la Santé (http://www.who.int/dietphysicalactivity/ pa/en/index.html, consulté le 18 juin 2009). 21. Adolescent mental health in resource constrained settings: the evidence. Genève, Organisation mondiale de la Santé (sous presse). 4 LA FEMME ADULTE : LES ANNÉES DE PROCRÉATION chapitre La fEmmE aduLTE : LES annéES dE proCréaTion Dans de nombreuses sociétés, le passage des femmes de l’adolescence à l’âge adulte a été symbolisé, et dans une certaine mesure défini, par le mariage et la maternité. Mais comme on a pu le voir au chapitre 3, de manière générale, les femmes se marient et ont des enfants plus tard et elles vivent plus longtemps. Les années de procréation peuvent être enrichissantes et gratifiantes pour elles, et avoir une très grande influence sur leur état général de santé et leur bien-être. Ce chapitre examine les principales questions posées par la santé sexuelle et génésique des femmes, de la puberté à la ménopause. Pour des raisons statistiques, la période étudiée ici va de 15 à 44 ansa. La santé des femmes au cours des années de procréation Pour beaucoup de femmes, la période allant de la puberté à la ménopause offre de nombreuses opportunités d’épanouissement et de développement personnels. Cependant, elle peut également présenter des risques sanitaires, liés en particulier à la sexualité et à la reproduction, qui peuvent entraîner des charges de mortalité et d’incapacité considérables. La charge de morbidité de ce groupe d’âge est particulièrement élevée en Afrique en raison de taux élevés de mortalité et d’incapacité liés au VIH/sida et aux affections maternelles (Figure 1). De plus, alors qu’il faut être deux pour donner la vie, seules les femmes sont confrontées aux problèmes de santé liés à la grossesse et à la maternité, qui sont responsables de 14 % des décès de ce groupe d’âge dans le monde. En outre, ce sont essentiellement elles qui assument la contraception. Durant les années de maternité, les tendances de la mortalité varient considérablement entre les pays à revenu faible et élevé. Dans ces derniers, les trois premières causes de mortalité féminine sont les accidents de la route, les suicides et les automutilations, et le cancer du sein. Prises ensemble, elles sont responsables de plus d’un décès sur quatre. En revanche, dans les pays à faible revenu, les trois premières causes sont le VIH/sida, les affections maternelles et la tuberculose, qui, ensemble, représentent un décès sur deux (Tableau 1). Globalement, dans les pays à revenu faible et intermédiaire, les pratiques sexuelles à risque (qui peuvent provoquer des infections sexuellement transmissibles dont le VIH) constituent le principal facteur de risque de mortalité et d’incapacité pour les femmes en âge de procréer (Tableau 2). Les sujets féminins qui ne savent pas comment se protéger de ces infections, ou qui sont dans l’incapacité de le faire, sont confrontés à un risque accru de mortalité ou de morbidité. Il en va de même pour celles qui, comme elles n’ont pas accès à la contraception, doivent assumer des grossesses non désirées ou ne peuvent maîtriser leur fécondité. Un faisceau croissant d’éléments indique que la Figure 1 Mortalité et charge de morbidité (AVCI) de la population féminine âgée de 15 à 44 ans par Régions et grandes causes (2004) VIH Tuberculose et paludisme Affections maternelles Affections périnatales Maladies diarrhétiques Maladies respiratoires Autres maladies transmissibles et carences nutritionnelles Pays à revenu élevé Amériques* Pacifique occidental* Europe* Méditerranée orientale* Asie du Sud-Est Afrique Maladies cardio-vasculaires et diabète Cancers Troubles mentaux Troubles sensoriels Autres maladies non transmissibles Traumatismes 400350300250200150100 50 0 0 2 4 6 8 10 AVCI pour 1 000 sujets féminins Nombre de décès pour 1 000 sujets féminins * Les pays à revenu élevé ne sont pas pris en compte dans les groupes régionaux. Source : Organisation mondiale de la Santé1. a Certaines données utilisent les fourchettes d’âge 15-49 ans ou 12-44/49 ans. LES fEmmES ET La SanTé violence à l’égard des femmes est un important facteur de risque pour leur santé, même si l’étendue du problème reste mal mesurée. La grossesse et la maternité sont particulièrement dangereuses pour les femmes qui souffrent de malnutrition, et en particulier d’anémie. Parmi les autres facteurs de risque en progression figurent l’hypertension artérielle, les taux de cholestérol élevés, le tabagisme, l’obésité et la violence. Ces derniers concourent à des issues malheureuses de la grossesse, pour la mère et pour le nourrisson, et causent directement d’autres problèmes de santé féminins (voir chapitre 5). La santé maternelle Tout au long de l’histoire humaine, la grossesse et la maternité ont fortement contribué à la mortalité et à l’incapacité au sein de la population féminine. La mortalité maternelle (c’est-à-dire le décès pendant la grossesse, l’accouchement ou la période post-partum) est un indicateur clé de la santé et du statut des femmes. Elle témoigne de manière tragique des disparités entre les riches et les pauvres, à l’intérieur des pays et entre eux. Plus de 500 000 décès maternels surviennent chaque année, dont 99 % dans des pays en développement (Figure 2). Ils n’ont toutefois rien d’inévitable : avec des soins appropriés, la mortalité maternelle devient très rare. Dans les pays industrialisés, on compte en moyenne neuf décès maternels pour 100 000 naissances vivantes, alors que ce chiffre peut atteindre Tableau 1 Dix principales causes de mortalité de la population féminine âgée de 15 à 44 ans selon le groupe de revenu du pays (2004) Monde Rang Cause Décès (milliers) % Pays à faible revenu Rang Cause Décès (milliers) % 1 VIH/sida 682 19.2 1 VIH/sida 494 22.3 2 Affections maternelles 516 14.6 2 Affections maternelles 434 19.5 3 Tuberculose 228 6.4 3 Tuberculose 161 7.3 4 Suicide et automutilations 168 4.7 4 Infections des voies respiratoires inférieures 94 4.3 5 Accidents de la route 132 3.7 5 Feux 89 4.0 6 Infections des voies respiratoires inférieures 121 3.4 6 Suicide et automutilations 80 3.6 7 Cardiopathies ischémiques 104 2.9 7 Cardiopathies ischémiques 64 2.9 8 Feux 101 2.9 8 Accidents de la route 40 1.8 9 Accidents vasculaires cérébraux 77 2.2 9 Accidents vasculaires cérébraux 32 1.5 10 Violence 61 1.7 10 Maladies diarrhéiques 30 1.3 Pays à revenu intermédiaire Rang Cause Décès (milliers) % Pays à revenu élevé Rang Cause Décès (milliers) % 1 VIH/sida 183 15.4 1 Accidents de la route 14 10.2 2 Affections maternelles 81 6.8 2 Suicide et automutilations 13 9.8 3 Accidents de la route 78 6.6 3 Cancer du sein 11 7.9 4 Suicide et automutilations 75 6.3 4 Intoxications 5 3.8 5 Tuberculose 66 5.6 5 Accidents vasculaires cérébraux 5 3.6 6 Accidents vasculaires cérébraux 40 3.4 6 Cardiopathies ischémiques 4 3.2 7 Cardiopathies ischémiques 36 3.0 7 Violence 4 2.9 8 Cancer du sein 31 2.6 8 VIH/sida 3 2.6 9 Violence 28 2.4 9 Cancers de la trachée, des bronches 3 2.5 et du poumon 10 Infections des voies respiratoires inférieures 25 2.1 10 Cirrhose du foie 3 2.4 Source : Organisation mondiale de la Santé1. La fEmmE aduLTE : LES annéES dE proCréaTion 1000 ou plus dans les pays les plus défavori-Tableau 2 Décès de femmes âgées de 15 à 44 ans imputables à six grands sés. Dans les régions où une fécondité élevée facteurs de risque, 2004 (%) est la norme, les femmes sont confrontées à ces risques à chaque grossesse. Ainsi, à la naissance, une femme sur 26 en Afrique risque de mourir durant la grossesse ou l’ac- Risque Monde Pays à faibrevenu le Pays à reveintermédiaire nu Pays à revenu élevé Pourcentage des décès Rapports sexuels non protégés 20 23 16 5 couchement, contre seulement une sur 7300 dans les pays développés3. Alors que la situation est d’une grande Carence en fer 4 Besoins contraceptifs non satisfaits 5 6 2 0 5 2 0 gravité, le manque de données fiables sur l’étendue du problème vient encore compliquer les efforts engagés pour y faire face. Les taux élevés de cholestérol 2 2 3 4 et de glucose rares informations disponibles indiquent que, depuis les années 1990, la mortalité maternelle a reculé dans certaines régions, Surcharge pondérale et obésité 1 Tabagisme 2 1 3 5 1 2 4 notamment en Afrique du Nord, en Asie Source : Organisation mondiale de la Santé2. de l’Est, en Asie du Sud-Est et en Amérique latine et aux Caraïbes. Ces baisses s’expliquent par des facteurs complexes qui varient selon la situation locale, mais il existe certaines constantes : hausse de l’utilisation de la contraception pour retarder et limiter la maternité, accès amélioré et recours plus fréquent à des services de soins de santé de qualité, mais aussi évolutions sociales plus générales (meilleur accès à l’éducation ou encore statut plus élevé des femmes). En revanche, les progrès ont été limités en Afrique subsaharienne et en Asie du Sud, où continuent de se produire la plupart des décès liés à la maternité. C’est dans les pays touchés par des conflits ou confrontés à d’autres formes d’instabilité que les taux de mortalité maternelle et néonatale sont les plus élevés4. Les périodes de conflit et d’instabilité sont à l’origine de nombreux autres problèmes pour les femmes : violences, traumatismes et blessures, désorganisation des services de santé primaires, ou encore difficultés d’accès aux soins de santé. Ces situations peuvent également les exposer à des facteurs environnementaux défavorables et engendrer une baisse du nombre d’agents de santé, qui sont tués, déplacés ou blessés. Figure 2 Taux de mortalité maternelle (2005) Consommation d’alcool 3 1 5 9 Hypertension artérielle, <100 100–299 300–599 600–999 >1000 Données non disponibles Décès maternels pour 100 000 naissances vivantes – Source : Organisation mondiale de la Santé3 . LES fEmmES ET La SanTé La grossesse et l’accouchement ne sont bien entendu pas des maladies. Néanmoins, ils comportent des risques qui peuvent être atténués par des interventions sanitaires telles que l’instauration de services de planification familiale et de soins maternels ou l’accès à des soins sûrs lors de l’avortement (voir plus bas). La plupart des décès liés à la maternité se produisent pendant l’accouchement ou juste après, et presque tous pourraient être évités si les femmes étaient aidées par un professionnel de santé disposant des qualifications, de l’équipement et des médicaments nécessaires pour empêcher les complications et les traiter. Comme noté au chapitre 1, les femmes les plus pauvres, les moins instruites et vivant en zone rurale ont bien moins de chances d’accoucher en présence d’un agent de santé qualifié que celles plus instruites qui vivent dans des ménages plus aisés ou en zone urbaine. Cette disparité peut s’expliquer par le coût prohibitif du service et par l’impossibilité pratique d’y accéder, mais également par des pratiques socioculturelles inappropriées. La disponibilité des services n’est pas un critère suffisant ; ils doivent également être de qualité, culturellement adaptés et tenir compte des besoins des femmes. Malgré des problèmes de fond, certaines tendances sont encourageantes. Depuis les années 1990, dans les pays pour lesquels des données sont disponibles, la présence de personnel soignant qualifié lors de l’accouchement a progressé dans toutes les régions, sauf en Afrique orientale et australe, avec une nette augmentation au Moyen-Orient et en Afrique du Nord5. L’intervention de personnel qualifié lors de l’accouchement n’est qu’un des éléments du continuum de soins nécessaire tout au long de la grossesse et après la naissance. Les soins prénatals sont l’occasion d’examens médicaux réguliers qui permettent d’évaluer les risques mais aussi de dépister et de traiter des affections qui pourraient toucher la mère et son bébé. Les soins lors de l’accouchement garantissent quant à eux une gestion efficace des urgences obstétricales. Enfin, les soins post-partum jouent un rôle de premier plan pour détecter et traiter les infections et les autres affections, y compris la dépression post-partum, et pour dispenser des conseils de planification familiale. Malheureusement, peu de femmes bénéficient actuellement de soins continus durant la grossesse, l’accouchement et la période post-partum. Des données provenant de plusieurs pays africains indiquent au contraire une chute spectaculaire de la couverture des soins durant ces périodes (Figure 3)6. Les soins anténatals sont particulièrement importants car de nombreuses femmes souffrent de carences nutritionnelles au début de leur gros- Figure 3 Recours au continuum de soins maternels sesse. Les carences en fer, en vitamine A et en dans certains pays d’Afrique subsaharienne iode et l’anémie sont courantes. On estime 100 90 que, dans le monde, près de la moitié des femmes enceintes et un tiers des autres femmes 80 (%) souffrent d’anémie, une carence qui accroît de 70nelstermanière significative les risques pour la santé 60mades mères et des nourrissons. Les carences 50oinsmaternelles en micronutriments peuvent éga40 lement affecter le poids de naissance et réduire 30Utilisation des sles chances de survie du nourrisson, et des 20 apports insuffisants en vitamine A augmen0 10 2003 Burkina Faso 2003 Ghana 2003 Mozambique 2004 République-Unie de Tanzanie tent les risques d’héméralopie de la mère. Les violences sont courantes pendant la grossesse. Un nombre significatif de femmes indiquent ainsi être maltraitées au cours de cette période, où elles sont par- Ont reçu au moins une visite pour des soins anténatals (%)* ticulièrement vulnérables3. Ces violences Présence d’un agent de santé qualifié au moment de l’accouchement (%)** augmentent les risques de fausse couche, de Ont reçu des soins postnatals, au maximum deux jours après l’accouchement (%)* mortinaissance, d’avortement et de faible *Femmes ayant bénéficié de soins anténatals/postnatals pour leur dernier enfant vivant. **Accouchements ayant eu lieu en présence d’un agent de santé qualifié dans les cinq ans précédant l’enquête. poids de naissance4–7. Source : études démographiques et de santé dans certains pays (2003-2004). La fEmmE aduLTE : LES annéES dE proCréaTion Les avortements à risque sont responsables d’une grande partie des décès maternels. Près de 70 000 femmes meurent chaque année des suites de complications en résultant. On a pu constater que les femmes désireuses de se faire avorter le feront, quelle que soit la loi en vigueur. Or, les avortements clandestins sont généralement dangereux et pratiqués par des personnes non qualifiées dans de mauvaises conditions d’hygiène7. Les femmes pauvres et celles touchées par les crises et les conflits sont particulièrement exposées à ces risques. Lorsqu’il existe peu de restrictions à l’avortement médicalisé, les décès et les affections se trouvent considérablement réduits (Figure 4). Les moyens de contraception modernes ont réduit le nombre d’avortements provoqués7,9. Pourtant, les jeunes femmes, surtout lorsqu’elles ne sont pas mariées, ont souvent du mal à se les procurer et peuvent recourir à l’avortement à risque. Dans le monde, des femmes de tous âges interrompent leur grossesse. Toutefois, la charge de morbidité et de mortalité imputable aux avortements non médicalisés est la plus élevée en Afrique subsaharienne, où, de surcroît, un de ces actes sur quatre est pratiqué sur des adolescentes âgées de 15 à 19 ans. La possibilité pour les femmes de prévoir le nombre d’enfants qu’elles porteront et de choisir quand elles accoucheront a beaucoup réduit les risques liés à la grossesse et représente une grande avancée. Le taux d’utilisation des moyens de contraception dans les pays en développement est passé de 8 % dans les années 1960 à 62 % en 200710. Pourtant, il reste dans toutes les régions de nombreux besoins non satisfaits (Figure 5). En Afrique subsaharienne, par exemple, une femme sur quatre qui souhaite différer le moment de la maternité ou cesser de procréer n’utilise aucune méthode de planning familial. Les raisons en sont notamment la mauvaise qualité des services disponibles, un choix limité de méthodes, la peur des effets secondaires ou une mauvaise expérience de ces derniers, ainsi que l’opposition d’ordre culturel ou religieux. La barrière entre les sexes intervient également, tout comme le manque d’accès aux Figure 4 Répartition des pays selon le nombre de décès imputables à des avortements non médicalisés pour 100 000 naissances vivantes, et fondements juridiques de l’interruption de grossesse >200 200 150 100 50 0 Seulement pour Egalement Egalement Egalement Egalement pour Egalement à la demande sauver la vie pour préserver en cas en cas des raisons des femmes, la santé de viol d’anomalie économiques ou aucune ou d’inceste du foetus ou sociales autorisation Chaque point représente un pays. Source : Organisation mondiale de la Santé8. Figure 5 Besoins non satisfaits en matière de planification familiale chez les femmes mariées âgées de 15 à 49 ans par Région Afrique 24 subsaharienne 26 Pays en transition 15 d’Europe du Sud-Est 15 15 Asie du Sud 19 14 CEI* 15 12 Asie occidentale 16 11 Asie du Sud-Est 13 Amérique 11 latine et 12 Caraïbes Amérique 10 du Nord 16 2005 1995 0 5 10152025 Proportion de femmes mariées âgées de 15 à 49 ans dont les besoins ne sont pas satisfaits en matière de planification familiale (%) *Communauté des États indépendants (données les plus récentes autour de 2000). Note : pas de données disponibles pour l’Asie de l’Est. Source : Nations Unies11. LES fEmmES ET La SanTé Figure 6 Prévalence du VIH chez les femmes âgées de 15 à services, en particulier pour les jeunes, les 49 ans par Région (1990-2007) couches les plus pauvres de la population et les personnes non mariées. Prévalence du VIH (%) 6 5 4 3 2 1 0 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 Année Afrique Amériques Méditerranée orientale Europe Asie du Sud-Est Pacifique occidental OCDE (pays à revenu élevé) Monde * Les pays de l’OCDE ne sont pas pris en compte dans le calcul des totaux régionaux. Les femmes et le VIH/sida Au niveau mondial, le VIH constitue la première cause de mortalité et de morbidité chez les femmes en âge de procréer12. Sur 30,8 millions d’adultes vivant avec le VIH en 2007a, 15,5 millions étaient de sexe féminin. La prévalence de l’infection à VIH chez les femmes a augmenté depuis le début des années 1990 et c’est en Afrique subsaharienne qu’elle est la plus marquée (Figure 6). L’Afrique australe est la plus touchée : en Source : Base de données de l’ONUSIDA et de l’OMS, 2009. 2005-2006, la prévalence médiane du VIH chez les femmes enceintes recevant des soins anténatals était supérieure à 15 % dans huit pays de cette régionb, l’infection ayant principalement été contractée lors de rapports hétérosexuels. Dans toutes les régions, le VIH touche de manière disproportionnée les professionnelles du sexe, les toxicomanes par voie intraveineuse et les partenaires féminins d’hommes infectés. La vulnérabilité particulière des femmes à l’infection à VIH s’explique par une combinaison de facteurs biologiques et d’inégalités liées à l’appartenance sexuelle. Certaines études montrent qu’au cours d’un rapport hétérosexuel non protégé avec un partenaire infecté, les femmes risquent davantage que les hommes de contracter le virus13. Le risque posé par cette différence biologique est aggravé dans les sociétés qui limitent les connaissances des femmes en matière de VIH et leur capacité à faire accepter des rapports à moindre risque. L’ostracisme, la violence des partenaires intimes et la violence sexuelle augmentent encore la vulnérabilité des femmes. Parmi les jeunes, elles sont moins nombreuses que les individus masculins à savoir que les préservatifs protègent du VIH14. De plus, même si elles font généralement part d’une augmentation de l’utilisation du préservatif durant des rapports sexuels à haut risque, elles ont Figure 7 Prévalence du VIH chez les femmes et les hommes généralement moins tendance à se protéger par groupe d’âge dans certains pays que les hommes15. Les femmes les plus jeunes sont les plus vulnérables (Figure 7)17. Non seulement il leur est plus difficile d’accéder aux informa tions sur le VIH – concernant en particulier les moyens pour elles de se protéger – mais, souvent, elles ont des rapports sexuels avec des hommes plus âgés qui possèdent une plus grande expérience sexuelle et risquent davantage d’être infectés18. Les toxicomanes de sexe féminin et les professionnelles du sexe sont particulière ment vulnérables, ce qu’accentuent encore 15–19 20–24 25–29 30–34 35–39 40–44 45–49 l’ostracisme, la discrimination et le caractère Groupe d’âge (en années) punitif des politiques19. Chez les profession- Source : études démographiques et de santé dans certains pays (2005-2007)16. nelles du sexe, le taux d’infection à VIH est a 33 millions de personnes au total vivaient avec le VIH/sida en 2007, dont 2 millions d’enfants de moins de 15 ans. b Afrique du Sud, Botswana, Lesotho, Malawi, Namibie, Swaziland, Zambie, Zimbabwe. 50 Rrévalence du VIH (%) 0 Hommes Femmes 40 30 20 10 Swaziland 2006–07 Zimbabwe 2005–06 Zambie 2007 La fEmmE aduLTE : LES annéES dE proCréaTion élevé dans de nombreuses régions du monde, et une forte proportion de toxicomanes se livre également au commerce du sexe20. Dans les prisons, la proportion de toxicomanes est plus élevée chez les femmes que chez les hommes. L’utilisation de matériel d’injection contaminé est particulièrement répandue parmi elles, d’où des taux d’infection à VIH plus élevés21-24. La vulnérabilité économique est un autre facteur clé de la propagation de l’infection au sein de la population féminine. Elle est parfois associée aux migrations, qui accentuent les comportements à haut risque chez les femmes, la nécessité économique pouvant les pousser au commerce du sexe25. Il est encourageant de noter toutefois que, ces dernières années, les individus féminins ont profité d’un meilleur accès aux services de prévention, de traitement et de soins liés au VIH15. Des données provenant de 90 pays à faible revenu et intermédiaire suggèrent que, dans l’ensemble, les femmes y sont légèrement plus avantagées en matière d’accès aux traitements antirétroviraux : à la fin de l’année 2008, 45 % des femmes dans le besoin en ont bénéficié, contre seulement 37 % des hommes de cette catégorie. En 2008, 45 % des femmes enceintes vivant avec le VIH ont reçu un tel traitement pour empêcher la transmission mère-enfant, contre 10 % en 2004. Mais des problèmes demeurent : seules 21 % des femmes enceintes ont fait l’objet de tests et reçu des conseils, et seul un tiers de celles dépistées séropositives au cours de soins anténatals ont pu savoir si elles étaient aptes à un traitement antirétroviral. Infections sexuellement transmissibles La combinaison de facteurs biologiques et sociaux (crises humanitaires notamment) qui rend les femmes plus vulnérables à une infection à VIH fait également qu’elles sont beaucoup plus susceptibles que les hommes de contracter des infections sexuellement transmissibles – en particulier la chlamydia et la trichomonase. Comme les symptômes ont tendance à être moins visibles chez elles, et comme elles ont moins facilement accès aux services de diagnostic et de traitement, leurs infections sont détectées plus tard et restent donc plus longtemps sans traitement. Du fait de ces retards et de leur plus grande vulnérabilité biologique aux complications des infections non traitées, la morbidité imputable aux infections sexuellement transmissibles est bien plus élevée chez les femmes. Les infections qui peuvent être soignées, comme la gonococcie, la chlamydia, la syphilis et la trichomonase, non seulement entraînent des symptômes aigus mais provoquent également des infections chroniques. Parmi les conséquences à plus long terme des infections sexuellement transmissibles figurent la stérilité, la grossesse extra-utérine et les cancers, et l’augmentation de la vulnérabilité à l’infection à VIH. Les infections sexuellement transmissibles augmentent le risque d’issues défavorables de la grossesse (notamment mortinaissances, faible poids de naissance des nourrissons, décès néonatals et syphilis congénitale). En outre, ce sont surtout les femmes qui subissent l’opprobre qui leur est associée26. Les femmes d’Amérique latine et d’Afrique subsaharienne sont les plus à risque : environ une sur quatre contracte à un moment donné l’une des quatre infections soignables. En général, les infections sexuellement transmissibles sont courantes chez les jeunes et, dans le monde, presque la moitié des personnes infectées ont entre 15 et 24 ans27. Les femmes risquent davantage de contracter l’herpès génital28, et les plus jeunes sont les plus menacées. Une autre infection sexuellement transmissible, le papillomavirus humain (HPV), influe beau- coup sur la santé des femmes, principalement en raison de sa relation au cancer du col de l’utérus et à d’autres cancers de l’appareil génital (voir ci-dessous). L’infection à HPV est très répandue et 10 % des femmes qui ont une cytologie normale du col utérin sont à un moment donné dépistées positives au HPV du col de l’utérus. Le HPV est plus courant dans les pays les moins développés (13 %) que dans les régions plus développées (8 %). C’est en Afrique que la prévalence est la plus élevée (une femme sur cinq). Le HPV est hautement transmissible et la plupart des hommes et des femmes sexuellement actifs contracteront une infection à HPV au cours de leur vie. Alors que la plupart des infections à HPV sont bénignes et de courte durée, les infections génitales persistantes qui possèdent certains génotypes du virus peuvent entraîner le développement de lésions précancéreuses ano-génitales, de cancers et de condylomes acuminés. LA SAN Té ET Les femmes 46 Cancer du col de l’utérus Le cancer du col de l’utérus constitue le deuxième cancer le plus courant chez les femmes et il est presque toujours associé à l’infection génitale à HPV. En 2005, plus de 500 000 nouveaux cas de cancer du col de l’utérus ont été dénombrés dans le monde et 250 000 décès ont résulté de cette maladie1. Aujourd’hui, presque 80 % des cas sont recensés dans des pays à faible revenu, où l’accès aux services de dépistage et de prévention du col de l’utérus est quasiment inexistant (Figure 8). Un vaccin très efficace contre le HPV est maintenant disponible mais son coût et les difficultés pour y avoir accès restreignent son emploi dans les pays les moins développés. On peut également prévenir le cancer du col de l’utérus à travers des dépistages réguliers alliés à un traitement, mais ces mesures sont rarement disponibles dans la plupart des pays en développement. Stérilité Bien que les hommes soient tout aussi susceptibles d’être stériles que les femmes, ce sont elles qui sont le plus souvent montrées du doigt lorsque les couples ne parviennent pas à avoir d’enfant29. Dans les pays à revenu élevé, la stérilité est souvent associée aux maternités tardives, mais peut être soignée grâce à un accès facilité à des traitements abordables. Dans les pays à faible revenu, elle est la plupart du temps causée par des infections, notamment des infections sexuellement transmissibles, ainsi que par les complications provoquées par les avortements à risque. Dans les pays pauvres, la stérilité primaire (c’est-à-dire l’incapacité de porter un enfant) est souvent moins répandue que la stérilité secondaire (c’est-à-dire l’incapacité de donner à nouveau naissance après avoir eu au moins un enfant). Selon des données provenant de 47 pays en développement (à l’exclusion de la Chine), ces derniers comptaient 187 millions de couples touchés par la stérilité en 2004 (environ 18 millions pour la stérilité primaire et 169 millions pour la stérilité secondaire). Le pourcentage de couples touchés par la stérilité primaire ou secondaire était plus élevé dans les pays d’Afrique subsaharienne (30 %) que dans ceux d’Asie du Sud et du Centre (28 %), d’Asie du Sud-Est (24 %) et d’Amérique latine et des Caraïbes (16 %)29. <10 10 to <20 20 to <30 30 to <50 50 to <100 Données non disponibles Taux pour 100 000 femmes Figure 8 Taux d’incidence du cancer du col de l’utérus (standardisé sur l’âge, pour 100 000 femmes, tous âges confondus), 2004 Source : Organisation mondiale de la Santé1. La fEmmE aduLTE : LES annéES dE proCréaTion Conclusion Ce chapitre s’est intéressé à de nombreux problèmes cruciaux relatifs à la santé sexuelle et reproductive des femmes. Le chapitre 5 montre comment les replacer dans un débat plus large sur la santé des femmes adultes, qui sont confrontées à beaucoup d’autres risques et problèmes sanitaires. Il est donc étroitement lié à celui-ci. Résumé des conclusions et implications Les problèmes de santé maternelle, notamment ceux résultant des avortements à risque, sont des causes ¦¦ importantes de morbidité et d’incapacité chez les femmes, en particulier dans les pays à faible revenu. Pourtant, les interventions nécessaires pour les empêcher sont bien connues et d’un bon rapport coût/efficacité. Dans les pays à revenu faible et intermédiaire, la première cause de mortalité chez les femmes en âge de pro ¦¦ créer est le VIH/sida. Les femmes sont particulièrement vulnérables aux infections pour des raisons biologiques mais aussi sociales : il leur est parfois impossible d’obtenir les connaissances nécessaires pour se protéger ou les utiliser. La tuberculose représente également une cause majeure de mortalité chez les femmes de ce groupe d’âge. Partout dans le monde, les femmes supportent une lourde charge de morbidité liée aux infections sexuellement ¦¦ transmissibles, y compris le cancer du col de l’utérus. Même si beaucoup de ces infections peuvent être empêchées et soignées, les femmes n’ont, dans de nombreuses parties du monde, aucun accès à des informations concrètes ni à des services compétents. Parmi les actions prioritaires figurent : augmenter le nombre d’accouchements pratiqués par du personnel ¦¦ qualifié dans tous les pays où le taux de mortalité maternelle est élevé ; garantir la disponibilité et l’accès au continuum des soins avant, pendant et après l’accouchement, pour toutes les femmes ; et garantir l’accès de toutes les femmes à des moyens de contraception modernes et à des services d’avortement sûrs (dans la mesure de ce que permet la loi), notamment des soins consécutifs à l’avortement, ainsi qu’au dépistage et au traitement des infections sexuellement transmissibles, y compris le VIH et le HPV. Tout aussi importantes sont les stratégies pour empêcher les violences infligées par les partenaires intimes et la violence sexuelle, et y répondre, et celles visant à donner plus de pouvoir aux femmes et à améliorer leurs perspectives de participation à l’activité économique. De surcroît, il est primordial de leur garantir un accès aux soins et aux services essentiels de santé reproductive durant les crises humanitaires. Références 1. The global burden of disease, 2004 update. Genève, Organisation mondiale de la Santé, 2008. 2. Global health risks: mortality and burden of disease attributable to selected major risks. Genève, Organisation mondiale de la Santé (sous presse). 3. Mortalité maternelle en 2005. Estimations de l’OMS, l’UNICEF, le FNUAP et la Banque mondiale. Genève, Organisation mondiale de la Santé, 2007. 4. Tracking progress in maternal, newborn, and child survival. The 2008 report. New York, NY, Fonds des Nations Unies pour l’Enfance (UNICEF), 2008. 5. 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Étendre les interventions prioritaires liées au VIH/sida dans le secteur de la santé – Rapport de situation 2008. Genève, Organisation mondiale de la Santé, 2008 (http://www.who.int/hiv/ pub/2008progressreport/fr/index.html, consulté le 26 juin 2009) 16. Analysis of data from Demographic and Health Surveys in selected countries, 2005–2007. Calverton, US-MD, Macro International Inc. 17. HIV prevalence estimates from the Demographic and Health Surveys. Calverton, US-MD, MacroInternational Inc., 2008. 18. Stratégies pour la prise en charge des besoins relatifs au VIH des réfugiés et populations hôtes. Publication conjointe du Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) et du Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR), 2006 (http://data.unaids.org/pub/ Report/2006/jc1157-refugees_fr.pdf, consulté le 25 juin 2005). 19. Progress on implementing the Dublin Declaration on Partnership to Fight HIV/AIDS in Europe and Central Asia. Copenhague, Bureau régional OMS de l’Europe et Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA), 2008. 20. Rapport sur l’épidémie mondiale de sida 2008. Genève, Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA), 2008. 21. HIV/AIDS prevention and care for female injecting drug users. Vienne, Office des Nations Unies contre la Drogue et le Crime (ONUDC), 2006 (http://www.unodc.org/pdf/HIV-AIDS_femaleIDUs_Aug06.pdf, consulté le 18 juillet 2009). 22. The global state of harm reduction 2008: mapping the response to drug-related HIV and Hepatitis C epidemics. Londres, Association internationale pour la Réduction des Risques, 2008 (http://www.ihra. net/GlobalState2008, consulté le 18 juillet 2009). 23. At what cost? HIV and human rights consequences of the global “war on drugs”. New York, NY, Open Society Institute, 2008. 24. Interventions to address HIV in prisons: HIV care, treatment and support. Evidence for Action Technical Papers. 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Infecundity, infertility, and childlessness in developing countries. DHS Comparative Reports, no 9. Calverton, US-MD, ORC Macro et Organisation mondiale de la Santé, 2004. 5 la femme Adulte chapitre La fEmmE aduLTE Le chapitre 4 a montré que les questions de santé sexuelle et génésique revêtent une importance centrale pour les femmes à travers le monde. Ce nouveau chapitre explique que les femmes sont confrontées à de nombreux autres problèmes majeurs, notamment maladies chroniques, maladies mentales, traumatismes et violence. Il examine la santé des femmes âgées de 20 à 59 ans, auxquelles nous nous référons ici sous le terme « femmes adultes ». Le chapitre 6 s’intéressera aux femmes âgées de 60 ans et plus, dites « femmes âgées ». Mortalité et charge de morbidité Les femmes des pays développés connaissent généralement entre 20 et 60 ans une période de bonne santé. Le risque de mort prématurée est faible pour cette tranche d’âge : 6 % seulement dans les pays à revenu élevé. Tout comme les hommes de cette catégorie, les femmes adultes vivent généralement mieux que leurs parents et leurs grands-parents. Malheureusement, la situation est très différente pour des centaines de millions de femmes du même âge dans d’autres parties du monde. En ce qui concerne les risques de mort prématurée, les différences sont frappantes. Dans la Région de l’Asie du Sud-Est, par exemple, les femmes sont confrontées à un risque de décès de 21 % et il atteint 42 % dans la Région africaine. Le VIH/sida constitue de loin la première cause de mortalité chez les femmes adultes en Afrique (Figure 1), mais la tuberculose, souvent liée à l’infection à VIH, est également très meurtrière. Cette dernière représente également la deuxième cause de mortalité dans les Régions de la Méditerranée orientale et de l’Asie du Sud-Est et elle est, dans le monde, la cinquième cause de mortalité des femmes de ce groupe d’âge (Tableau 1). En 2004, la tuberculose a été responsable d’environ 313 000 décès parmi les sujets féminins âgés de 20 à 59 ans. Bien que les maladies infectieuses fassent beaucoup de victimes, surtout en Afrique, il faut noter qu’à l’échelle mondiale, la moitié des décès chez les femmes adultes sont causés par des maladies non transmissibles, en particulier les maladies cardio-vasculaires, les cancers et les maladies respiratoires. Tandis que s’opérait la transition sanitaire décrite au chapitre 1, les maladies non transmissibles ont gagné en importance. Elles sont aujourd’hui responsables de 80 % des décès chez les femmes adultes dans les pays à revenu élevé contre seulement 25 % dans les pays à faible revenu. Les traumatismes sont responsables de 15 % des décès chez les femmes adultes dans le monde, même si on observe des variations régionales considérables. Les suicides et les accidents de la route comptent parmi les dix premières causes de décès de femmes adultes à l’échelle mondiale (Tableau 1). Figure 1 Mortalité et charge de morbidité (AVCI) de la population féminine âgée de 20 à 59 ans par Régions et grandes causes, 2004 VIH Maladies cardio-vasculaires et diabète Tuberculose et paludisme Pays à Cancers Affections maternelles revenu élevé Troubles mentaux Affections périnatales Amériques* Troubles sensoriels Maladies diarrhétiques Autres maladies Maladies respiratoires Pacifique occidental* non transmissibles Autres maladies transmissibles Traumatismes et carences nutritionnelles Europe* 0 1050100150200250300350400450 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 Méditerranée orientale* Asie du Sud-Est Afrique AVCI pour 1 000 sujets féminins Nombre de décès pour 1 000 sujets féminins * Les pays à revenu élevé ne sont pas pris en compte dans les groupes régionaux. Source : Organisation mondiale de la Santé1. LES fEmmES ET La SanTé Les statistiques de mortalité ne peuvent à elles seules rendre compte de la perte de santé due, chez la femme adulte, aux maladies chroniques, aux traumatismes et aux troubles mentaux, en particulier dans les pays développés. Les AVCI (voir encadré 1 du chapitre 1) permettent de mieux appréhender la charge totale de morbidité et les traumatismes dont souffrent les femmes de ce groupe d’âge. Cette méthode modifie l’importance relative des différentes maladies, comme on peut le voir à la figure 1. Par exemple, les maladies cardio-vasculaires, principalement les coronaropathies et les congestions cérébrales (accidents vasculaires cérébraux) ont tué 1,2 million de femmes âgées de 20 à 59 ans en 2004, mais également entraîné morbidité et souffrances chez des millions d’autres femmes. Bien que ces maladies soient parfois considérées comme caractéristiques des pays riches, plus de 90 % des cas touchent les pays à revenu faible et intermédiaire, soit, dans le monde, 85 % des femmes du groupe d’âge. Les maladies cardio-vasculaires et les accidents vasculaires cérébraux sont les troisième et sixième causes de mortalité dans les pays à revenu faible . En 2004, les cancers ont tué presque un million de femmes âgées de 20 à 59 ans. Quatre-vingt pour cent de ces décès sont survenus dans les pays à revenu faible et intermédiaire, où le taux de survie des femmes est systématiquement inférieur en raison d’un accès limité au dépistage, d’un diagnostic tardif et des difficultés d’accès à des traitements efficaces2,3. À l’échelle mondiale, le type de cancer le plus courant chez les femmes de moins de 60 ans est celui du sein, suivi par ceux du col de l’utérus, Tableau 1 Dix principales causes de mortalité de la population féminine âgée de 20 à 59 ans selon le groupe de revenu du pays (2004) Monde Rang Cause Décès (milliers) % Pays à faible revenu Rang Cause Décès (milliers) % 1 VIH/sida 835 13.3 1 VIH/sida 603 18.2 2 Affections maternelles 453 7.2 2 Affections maternelles 378 11.4 3 Cardiopathies ischémiques 429 6.8 3 Cardiopathies ischémiques 224 6.8 4 Accidents vasculaires cérébraux 360 5.7 4 Tuberculose 213 6.4 5 Tuberculose 313 5.0 5 Infections des voies respiratoires inférieures 138 4.2 6 Cancer du sein 223 3.5 6 Accidents vasculaires cérébraux 128 3.9 7 Suicide et automutilations 204 3.2 7 BPCO* 90 2.7 8 Infections des voies respiratoires inférieures 190 3.0 8 Feux 88 2.7 9 Accidents de la route 172 2.7 9 Suicide et automutilations 77 2.3 10 BPCO* 149 2.4 10 Cancer du col de l’utérus 60 1.8 Pays à revenu intermédiaire Rang Cause Décès (milliers) % Pays à revenu élevé Rang Cause Décès (milliers) % 1 VIH/sida 226 8.9 1 Cancer du sein 49 11.5 2 Accidents vasculaires cérébraux 211 8.3 2 Cancers de la trachée, des bronches 28 6.7 et du poumon 3 Cardiopathies ischémiques 177 6.9 3 Cardiopathies ischémiques 28 6.7 4 Cancer du sein 116 4.6 4 Suicide et automutilations 22 5.1 5 Suicide et automutilations 104 4.1 5 Accidents vasculaires cérébraux 20 4.8 6 Accidents de la route 102 4.0 6 Cancer du côlon et du rectum 16 3.8 7 Tuberculose 99 3.9 7 Accidents de la route 16 3.8 8 Affections maternelles 74 2.9 8 Cirrhose du foie 13 3.1 9 Diabète sucré 65 2.5 9 Cancer des ovaires 12 2.8 10 Cirrhose du foie 57 2.2 10 Cancer du col de l’utérus 10 2.4 *Bronchopneumopathie chronique obstructive Source : Organisation mondiale de la Santé1. La fEmmE aduLTE des poumons et de l’estomac. Il constitue la Figure 2 Taux de mortalité due à des traumatismes chez première cause de mortalité chez les femmes les femmes âgées 20-59 ans par Région âgées de 20 à 59 ans dans les pays à revenu et par cause extérieure, 2004 Pays à Accidents de la route élevé, où il explique un décès sur 10. Les can revenu élevé Intoxications cers et les autres maladies chroniques seront Feux Amériques* examinés au chapitre suivant dans la mesure Autres traumatismes accidentels Pacific Suicide où ils touchent les femmes plus âgées. occidental* Violence et guerre Les traumatismes représentent l’une des Afrique causes majeures de mortalité et d’incapacité Méditerranée pour les femmes de tous les pays. Le taux de orientale* décès liés au feu est disproportionné dans Europe* la Région de l’Asie du Sud-Est, tandis que le Asie du nombre d’automutilations est particulière Sud-est ment élevé dans les pays en développement 0 de la Région du Pacifique occidental (Figure 2). Les accidents de la route sont relativement * Les pays à revenu élevé ne sont pas pris en compte dans les groupes régionaux. courants dans toutes les Régions et en 2004 Source: Organisation mondiale de la Santé1. ils étaient responsables d’environ 275 000 décès de femmes âgées de 20 à 59 ans. Les traumatismes liés au feu sont particulièrement inquiétants pour les femmes, qui en souffrent beaucoup plus que les hommes. 168 000 adultes âgés de 20 à 59 ans meurent chaque année à travers le monde des suites de traumatismes liés à des feux involontaires. 62 % de ces victimes sont des femmes et 80 % de ces décès se produisent en Asie du Sud-Est. Des millions de femmes souffrent en outre d’incapacités et de défigurements dus à des brûlures, qui sont pour la plupart permanents. Ces traumatismes peuvent déclencher une série de problèmes personnels et économiques, pour la victime comme pour sa famille. De nombreux décès dus au feu sont imputables à des accidents de cuisine, mais pas tous. En Inde, on estime que le feu intervient dans 16 % des suicides de femmes, et dans un nombre inconnu d’homicides4. L’état de santé des femmes qui vivent dans le dénuement dans des pays eux-mêmes pauvres est gravement touché par des affections inconnues des femmes au niveau de vie plus élevé. Parmi ces dernières figurent 14 maladies tropicales négligées que l’on retrouve dans plus de 100 pays parmi les plus pauvres, particulièrement en Afrique mais également en Asie et en Amérique latine. La plupart de ces maladies peuvent être évitées ou complètement éliminées, mais nombre d’entre elles restent courantes et affectent au total quelque 100 millions de personnes. Environ 56 millions de femmes adultes souffrent de schistosomiase. De surcroît, 28 millions sont infectées par des nématodes intestinaux. Environ 12 millions souffrent d’obstruction lymphatique causée par la filariose lymphatique. Les femmes adultes sont trois fois plus susceptibles que les hommes de souffrir de cécité suite aux complications du trachome car elles risquent davantage d’être infectées par leurs contacts étroits avec leurs enfants. Bien qu’elle soit totalement évitable et soignable, cette maladie très infectieuse entraîne la cécité d’environ un million des femmes parmi les plus pauvres du monde et détruit chaque année la vue de 4 à 5 millions de femmes. 10203040 50607080 90100 Décès pour 100 000 femmes Les femmes, la dépression et le suicide Alors que les femmes sont moins susceptibles que les hommes de souffrir d’alcoolisme ou de toxicomanie, elles sont plus vulnérables à la dépression et à l’anxiété. Environ 73 millions de femmes adultes à travers le monde souffrent d’un épisode dépressif majeur chaque année. Les troubles mentaux consécutifs à l’accouchement, y compris la dépression post-partum, touchent environ 13 % des femmes un an après qu’elles aient donné la vie. Personnes qui déclarent souffrir de troublesmentaux modérés/aigus et qui ontbénéficié d’un traitement (%) LES fEmmES ET La SanTé Figure 3 Pourcentage de personnes âgées 20-59 ans qui déclarent Dans les pays à revenu élevéa, presque souffrir de troubles mentaux modérés/aigus et qui ont bénéficié 40 % des femmes qui indiquent souffrir d’un traitement, par sexe et par groupe de revenu du pays, de troubles mentaux modérés ou aigus ont dans 21 pays (2001-2007) suivi un traitement au cours des 12 derniers 40 mois, contre seulement 14 % dans les pays Femmes Hommes 35 à revenu faibleb (Figure 3). Dans les pays à revenu faible comme élevé, les femmes des ménages les plus pauvres sont plus nombreu 30 25 ses à faire part de troubles mentaux que cel 20 les des ménages les plus aisés. Pourtant, elles 15 bénéficient moins souvent d’un traitement5. 10 Dans les pays à revenu élevé, les femmes ayant un faible niveau d’instruction suivent moins souvent un traitement que celles plus 5 0 Pays à revenu élevé** Pays à revenu faible*** éduquées, à l’inverse de ce que l’on observe dans les pays à faible revenu. Parallèlement *Cas rapportés identifiés grâce à un algorithme standardisé prédéfini, basé sur le DSM IV. Le traitement a été administré au cours des 12 mois précédant l’enquête. au niveau généralement plus bas des traite** Pays à revenu élevé et intermédiaire supérieur. ments dans les pays à faible revenu, le fait *** Pays à revenu faible et intermédiaire inférieur. . que les femmes ayant un niveau d’instruc- Source : études de l’OMS sur la santé mentale dans le monde dans 21 pays (2001-2007)5 tion élevé y soient encore moins susceptibles que celles moins instruites de bénéficier de soins suggère la présence d’autres obstacles. Outre la disponibilité limitée des services, il est possible qu’intervienne le caractère honteux associé à ces troubles, couplé à des connaissances imparfaites et à une attitude négative. Le suicide, probablement l’expression la plus grave de la maladie mentale, représente la septième cause de mortalité chez les femmes de 20 à 59 ans à l’échelle planétaire et la seconde cause de mortalité dans les pays à revenu faible et intermédiaire de la région du Pacifique occidental. Au niveau mondial, un suicide de femme sur trois concerne le groupe des 25–44 ans. Le suicide est la cinquième cause de mortalité dans le monde au sein de ce groupe d’âge, devant les accidents de la route. Les femmes sont plus nombreuses que les hommes à tenter de se suicider et les comportements suicidaires représentent un problème de santé publique majeur pour les filles et les femmes à travers le monde. Parmi les facteurs qui augmentent les risques de suicide chez les femmes figurent les violences sexuelles durant l’enfance et les violences infligées par les partenaires intimes (voir plus bas). La consommation abusive d’alcool représente un autre facteur de risque, qui mène à la dépression et ouvre la voie aux violences auto-infligées délibérées6. La différence entre les rôles sociaux des hommes et des femmes pourrait également expliquer en partie les comportements suicidaires. Dans certaines cultures, les inégalités sociales et l’appartenance à des unités sociales fortement structurées, en particulier familles patriarcales, sont des facteurs de risque du comportement suicidaire féminin. En Chine, où le suicide est la première cause de décès chez les femmes adultes dans les zones rurales et où les taux de suicide des femmes sont supérieurs à ceux des hommes7, les facteurs les plus influents seraient le stress aigu découlant des évènements graves de la vie et la disponibilité de pesticides potentiellement mortels. Facteurs de risque et maladies chroniques La charge de morbidité à laquelle sont confrontées les femmes adultes pourrait être en grande partie évitée si on s’attelait aux facteurs de risque déterminants. Il est important de comprendre qu’à chaque risque correspond des causes précises. a Pays à revenu élevé et à revenu intermédiaire de la tranche supérieure, d’après la classification de la Banque mondiale b Pays à revenu faible et à revenu intermédiaire de la tranche inférieure, d’après la classification de la Banque mondiale. La fEmmE aduLTE Pris ensemble, six facteurs de risque de Tableau 2 Mortalité imputable, chez les femmes âgées de 20 ans et plus, maladies chroniques expliquent 37 % des Risque Monde Pays à faible revenu Pays à revenu intermédiaire Pays à revenu élevéPourcentage de décès à six facteurs de risque principaux de maladies chroniques, 2004 (%) décès de femmes âgées de 30 ans et plus dans le monde8. Ils représentent 63 % des décès dus aux maladies cardio vasculaires et au diabète et plus des trois quarts des décès dus Hypertension artérielle 18 13 22 19 aux cardiopathies ischémiques. Ils sont également responsables d’un nombre important de décès féminins imputables au cancer Tabagisme 7 2 8 14 Sédentarité 8 Taux élevé de glucose 8 8 8 7 6 8 8 et aux maladies respiratoires. Bien que la plupart des décès provoqués par ces facteurs Surcharge pondérale et obésité 7 4 9 9 de risque concernent des femmes plus âgées, l’exposition débute pour l’essentiel plus tôt Taux de cholestérol élevé 6 5 6 6 Source : Organisation mondiale de la Santé8. dans la vie, souvent pendant l’adolescence, comme il a été dit au chapitre 3. Les interventions préventives doivent cibler les femmes plus jeunes autant, sinon plus, que les femmes plus âgées. L’hypertension artérielle constitue le premier facteur de risque chez les femmes adultes partout dans le monde et explique 18 % des décès des femmes de plus de 20 ans (Tableau 2). L’hypertension artérielle, les taux élevés de glucose et de cholestérol sérique et la sédentarité sont à l’origine des mêmes proportions de décès, quel que soit le niveau de revenu. Le tabagisme, la surcharge pondérale et l’obésité sont actuellement plus répandus dans les pays à revenu intermédiaire et élevé. Cela étant dit, ces problèmes sont de plus en plus fréquents dans ceux à revenu faible et intermédiaire. Il est important de noter que des interventions d’un bon rapport coût/efficacité existent pour traiter ces facteurs de risque chez les femmes adultes, au niveau de la population comme des individus9. Le tabagisme constitue l’un des principaux facteurs de risque évitables des décès prématurés et des maladies chez la femme adulte. Il est responsable de 6 % des décès féminins à l’échelle planétaire8. Dans le monde, il explique 71 % des décès dus à un cancer du poumon. Si l’on ne poursuit pas l’action entreprise pour faire reculer le tabagisme, les décès chez les femmes âgées de 20 ans et plus passeront de 1,5 million en 2004 à 2,5 millions en 2030, presque 75 % d’entre eux survenant dans les pays à revenu faible et intermédiaire8. Le tabagisme et les autres facteurs de risque environnementaux et comportementaux sont responsables de 35 % des décès dus au cancer. Avec des agents infectieux connus, tels le HPV et l’hépatite B et C, ces facteurs de risque modifiables expliquent 42 % des décès dus au cancer dans le monde chez les femmes âgées de 30 ans et plus. Le tabagisme est également impliqué dans environ 42 % des maladies respiratoires chroniques et près de 10 % des maladies cardio-vasculaires chez les femmes. La surcharge pondérale et l’obésité sont des facteurs de risque majeurs des maladies cardio-vasculaires, du diabète, des troubles musculo-articulaires et de certains cancers. Ensemble, ils étaient responsables en 2004 d’environ 1,5 million de décès chez les femmes de 30 ans et plus, dont 77 % dans les pays à revenu faible et intermédiaire. Beaucoup de ces pays connaissent une forte augmentation des facteurs de risque des maladies chroniques, en particulier en zone urbaine. Les dernières projections de l’OMS indiquent qu’en 2015, le nombre de femmes adultes en surpoids et obèses atteindra 1,5 milliard. Violences La violence à l’égard des femmes est une réalité courante dans le monde entier qui a de sérieuses implications pour la santé publique. Elle peut entraîner directement des traumatismes graves, une incapacité, voire la mort. Elle peut également engendrer indirectement divers problèmes sanitaires, tels que des changements physiologiques dus au stress, de la consommation de substances, ou encore l’impossibilité de maîtriser sa fertilité et l’absence d’autonomie personnelle, fréquents dans les relations abusives. Les femmes qui sont maltraitées présentent, par rapport aux autres, des taux LES fEmmES ET La SanTé plus élevés de grossesses non désirées, d’avortements, de complications obstétricales, néonatales et du nourrisson, d’infections sexuellement transmissibles (y compris à VIH) ainsi que de troubles mentaux (notamment dépression, troubles anxieux, troubles du sommeil et troubles alimentaires)10–17. La violence à l’égard des femmes est le plus souvent le fait de leurs partenaires intimes masculins. Une étude de l’OMS menée dans 11 pays a révélé qu’au cours de leur vie, entre 15 % et 17 % des femmes ont, selon les pays, subi des violences physiques ou sexuelles de leur mari ou partenaire, et que de 4 % à 54 % d’entre elles en ont souffert au cours de l’année précédente (Figure 4)19. La violence perpétrée par les partenaires peut également être mortelle. Des études réalisées en Afrique du Sud, en Australie, au Canada, aux États-Unis et en Israël montrent qu’entre 40 % et 70 % des meurtres commis sur des femmes le sont par un partenaire intime20. La violence sexuelle, qu’elle soit le fait d’un partenaire, d’une connaissance ou d’un étranger, touche elle aussi principalement les femmes et les filles. Il est de plus en plus reconnu que la violence sexuelle est employée comme une tactique de guerre durant les conflits et les périodes leur succédant. Les autres formes de violence à l’égard des femmes incluent le harcèlement sexuel et les abus sexuels par des figures d’autorité (tels que les professeurs, les agents de police et les employeurs), la traite des femmes (travail forcé ou prostitution), et des pratiques traditionnelles comme les mariages d’enfants ou forcés et la violence liée à la dot. La violence à l’égard des femmes s’explique souvent par des préjugés sociaux et sexistes et, poussée à son extrême, peut entraîner une mort violente ou l’infanticide des filles. Malgré l’ampleur du problème, de nombreuses femmes ne signalent pas les actes dont elles sont victimes et ne cherchent pas à obtenir d’aide. Ainsi, la violence à l’égard des femmes reste un problème caché qui a un coût élevé sur le plan humain et en matière de santé publique. Figure 4 Prévalence des violences physiques ou sexuelles, ou les deux, par un partenaire intime chez les femmes âgées de 15 à 49 ans* dans certains pays thiopiePrévalence de la violence par un partenaire intime (%) Source : Organisation mondiale de la Santé18 . *Au Japon et en Nouvelle Zélande, le groupe d’âge allait de 18 à 49 ans. Note : données provenant de provinces et régions spécifiques, sauf pour les Maldives et le Samoa. Prévalence sur une vie entière 12 derniers mois 80 0 70 60 50 40 30 20 10 PerouBangladeshRépublique-Uniede Tanzanie ThaïlandeSamoaNouvelle Zélande BrésilNamibieMaldives Japon Figure 5 Utilisation des services de santé par les personnes âgées de 20 à 59 ans, selon le sexe et le groupe de revenu du pays dans 59 pays (2002-2004) Pays à 70Nombre de personnes utilisant un servicede santé, au moins une fois* (%) 0 Femmes Hommes Pays à Pays àPays à 60 50 40 30 20 10 revenu élevé** faible revenu*** revenu élevé** faible revenu*** Soins ambulatoires au cours Soins en hospitalisation au cours des 12 mois précédant l’enquête. des 5 années précédant l’enquête. * L’utilisation par les femmes des services de planning familial, de soins anténatals et de soins pendant l’accouchement n’est pas prise en compte. ** Pays à revenu élevé et intermédiaire supérieur. *** Pays à faible revenu et intermédiaire inférieur. Source : enquête sur la santé dans le monde dans 59 pays (2002-2004). Maladies et utilisation des services de santé Les affections chroniques qui nécessitent des soins médicaux constants, comme l’asthme, les maladies cardiovasculaires, l’arthrite, la dépression et le diabète, sont courantes chez les femmes qui prennent de l’âge, particulièrement chez celles qui sont les plus pauvres et vivent en zone rurale21. La plupart de ces affections peuvent être prévenues ou prises en charge efficacement. Les interventions nécessaires comprennent l’éducation pour la santé, le contrôle des facteurs de risque, les La fEmmE aduLTE programmes de dépistage et l’accès à des traitements rentables1,22. Pourtant, beaucoup de femmes ne peuvent en bénéficier. Bien que les informations disponibles soient fragmentaires, il semble que de nombreux besoins de soins médicaux ne soient pas satisfaits dans les pays à faible revenu. Alors que les taux d’utilisation de soins ambulatoires sont globalement similaires dans le monde, ceux relatifs aux soins en hospitalisation sont très différents selon que les femmes vivent dans des pays à revenu faible ou élevé (Figure 5). Ainsi, les taux d’utilisation des femmes les plus pauvres des pays à revenu faible sont inférieurs de 50 % à ceux des femmes les plus aisées des pays à revenu élevé22. Conclusion Les femmes adultes sont confrontées à une série de problèmes sanitaires, notamment à des risques croissants de maladies chroniques non transmissibles, de traumatismes et de violence. Le suicide figure parmi les premières causes de mortalité chez les sujets féminins de 20 à 59 ans au niveau mondial et constitue la seconde cause de mortalité dans les pays à revenu faible et intermédiaire de la Région du Pacifique occidental. Les problèmes de santé mentale, en particulier la dépression, représentent des causes majeures d’incapacité pour les sujets féminins de tous âges. Le faible statut des femmes dans la société, leur charge de travail et la violence dont elles sont victimes sont autant de facteurs qui y contribuent. Des interventions efficaces existent pour nombre de ces problèmes, mais les avancées réalisées pour améliorer l’accès aux services susceptibles d’influencer réellement la santé des femmes sont inégales. Tout au long de leur vie d’adulte, les femmes pauvres des régions rurales ne peuvent satisfaire leurs besoins liés à la santé mentale et aux affections chroniques tels que l’asthme, les maladies cardio-vasculaires, l’arthrite et le diabète, qui nécessitent des soins médicaux continus. Résumé des conclusions et implications À l’échelle mondiale, les taux de mortalité prématurée sont faibles chez les femmes âgées de 20 à 59 ans. La ¦¦ Région africaine fait toutefois figure d’exception : plus de deux femmes sur cinq y décèdent durant cette période de leur vie, principalement de maladies infectieuses, y compris du VIH/sida. Alors que la transition sanitaire se poursuit, les décès et les incapacités des femmes adultes sont de plus en ¦¦ plus souvent causés par des maladies non transmissibles, telles que les maladies cardio vasculaires, les cancers, les traumatismes et les troubles mentaux, y compris le suicide. Les traumatismes liés au feu sont particulièrement préoccupants pour les femmes d’Asie du Sud-Est, tandis que le suicide est la première cause de décès et d’incapacité dans la Région du Pacifique occidental. L’hypertension artérielle, souvent liée à la surcharge pondérale et à la sédentarité, est le principal facteur de ¦¦ risque chez les femmes adultes. La violence représente également un facteur de risque important, bien que mal mesuré, à l’origine d’une série de problèmes de santé. Elle constitue de surcroît une cause directe de décès et d’incapacité chez les femmes. Les services de santé doivent être organisés de manière à s’atteler aux besoins des femmes adultes, en ¦¦ constante évolution. Actuellement, certains services, comme les soins anténatals, sont plus courants que d’autres, notamment ceux relatifs aux maladies mentales, aux affections chroniques non transmissibles et à la violence. Les interventions efficaces comprennent l’éducation pour la santé, la maîtrise des facteurs de risque, la mise en place de programmes de dépistage et l’accès à des traitements d’un bon rapport coût/efficacité. LES fEmmES ET La SanTé Références 1. The global burden of disease: 2004 update. Genève, Organisation mondiale de la Santé, 2008. 2. Kamangar F, Dores GM, Anderson WF. Patterns of cancer incidence, mortality, and prevalence across five continents: defining priorities to reduce cancer disparities in different geographic regions of the world. Journal of Clinical Oncology, 2006, 24:2137–2150.doi:10.1200/ JCO.2005.05.2308 PMID 16682732 3. Parkin DM, Bray F, Ferlay J, Pisani P. CA Global cancer statistics, 2002. 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New York, Oxford University Press, 2006. 6 LA FEMME ÂGÉE chapitre La fEmmE ÂgéE Les taux de mortalité et d’incapacité augmentent inévitablement aux âges plus avancés, mais avec une ampleur et une rapidité différentes selon les régions. Bien que les maladies transmissibles continuent de prélever un lourd tribut dans les pays à faible revenu, particulièrement en Afrique, l’évolution générale de la mortalité et de l’incapacité chez les femmes se caractérise par la prédominance des maladies non transmissibles, notamment les maladies cardio-vasculaires (cardiopathies et accidents vasculaires cérébraux), le diabète et les cancers (Figure 1). Les femmes et le vieillissement Parce qu’elles vivent généralement plus longtemps que les hommes, les femmes représentent une proportion croissante des personnes âgées. En 2007, dans le monde, 55 % des personnes âgées de 60 ans et plus étaient des femmes, une proportion qui passe à 58 % pour les personnes âgées de 70 ans et plus2. On pense parfois que la vieillesse préoccupe essentiellement les pays où les taux de natalité sont bas, les salaires élevés et les soins de santé gériatriques efficaces. Mais en réalité, c’est dans les pays en développement que se trouvent la majorité des femmes âgées. En 2007, 270 millions de femmes âgées de 60 ans et plus vivaient dans les pays à revenu faible et intermédiaire contre 115 millions dans les pays à revenu élevé. La proportion de personnes âgées dans la population totale augmente au fil du temps (Figure 2). En 2050, on estime que 84 % de la population de plus de 60 ans vivra dans les pays actuellement classés comme ayant des revenus faible et intermédiaire. Loin d’être une charge économique ou sociale, ce groupe croissant de femmes âgées devrait être considéré comme une ressource potentielle pour la société. Par exemple, ces femmes jouent au sein de leur famille et de leur communauté un rôle central de prestataire de soins – y compris lors des crises humanitaires3. Dans les pays touchés par de graves épidémies de VIH, elles occupent une fonction cruciale en prenant soin du nombre élevé d’enfants orphelins. D’après 18 enquêtes nationales menées en Afrique subsaharienne, la moitié des orphelins qui ne vivaient pas avec un parent survivant étaient pris en charge par les grands-parents, principalement par la grand-mère4. Il faut trouver les moyens de prolonger et d’améliorer la vie de ces femmes âgées. Le défi est double. Il implique de prendre des mesures à un stade précoce pour empêcher le développement des maladies chroniques et de fournir des services sanitaires conçus spécifiquement pour traiter les problèmes de santé rencontrés par les femmes lorsqu’elles vieillissent. Veiller à ce que les femmes âgées restent actives, en forme et en bonne santé est non seulement bénéfique à la personne Figure 1 Mortalité et charge de morbidité (AVCI) de la population féminine âgée de 60 ans et plus par Régions et grandes causes, 2004 00100600 60200300400500 10 20 30 40 50 VIH Tuberculose et paludisme Affections maternelles Affections périnatales Maladies diarrhétiques Maladies respiratoires Autres maladies transmissibles et carences nutritionnelles Maladies cardio-vasculaires et diabète Cancers Troubles mentaux Troubles sensoriels Autres maladies non transmissibles Traumatismes Pays à revenu élevé Amériques* Pacifique occidental* Europe* Méditerranée orientale* Asie du Sud-Est Afrique AVCI pour 1 000 sujets féminins Nombre de décès pour 1 000 sujets féminins * Les pays à revenu élevé ne sont pas pris en compte dans les groupes régionaux. Source : Organisation mondiale de la Santé1. LES fEmmES ET La SanTé Figure 2 Pourcentage des personnes âgées de 60 ans et plus par rapport à la population totale selon le sexe et le groupe de revenu du pays (1950-2050) 35 30 25 20 15 10 5 0 Estimations historiques 1950-2005 et prévisions jusqu’en 2050 Femmes, pays à revenu élevé Hommes, pays à faible revenu et intermédiaire Hommes, pays à revenu élevé Femmes, pays à faible revenu et intermédiaire Pourcentage 1950 1970 1990 2010 2030 2050 Source : Division de la population des Nations Unies2. elle-même, mais également judicieux d’un point de vue économique et social ; les actions préventives peuvent aider à réduire les coûts des soins de longue durée associés aux affections chroniques. Cependant, relever ce défi nécessite une planification à long terme et des actions de santé publique d’une ampleur considérable. Les problèmes qui se posent pour les systèmes de santé sont particulièrement sérieux dans les pays à revenu élevé où les taux de natalité sont faibles et la proportion de personnes âgées augmente au sein de la population. Mais ils prennent de plus en plus d’importance dans les actuels pays à revenu faible et intermédiaire, où les tendances évoquées ci-dessus ne sont apparues que récemment et où les systèmes de santé se concentrent essentiellement sur les besoins des femmes plus jeunes, particulièrement celles en âge de procréer, et la prise en charge des maladies transmissibles. L’influence des facteurs socio-économiques sur la santé de la femme âgée La santé des femmes âgées varie de manière significative d’une culture à l’autre et d’un pays à l’autre. Dans de nombreuses sociétés dites « traditionnelles », par exemple, où la famille élargie est prédominante, les femmes âgées acquièrent souvent un statut social plus élevé lorsque leurs enfants se marient et ont eux-mêmes des enfants. Cependant, l’urbanisation et l’augmentation du nombre de structures familiales nucléaires entraînent fréquemment l’isolement des personnes âgées des deux sexes. Comme les femmes ont tendance à épouser des hommes plus vieux et qu’elles vivent souvent plus longtemps, de nombreuses femmes âgées deviendront veuves. Dans la plupart des cas, elles s’adaptent émotionnellement et financièrement à leur nouvelle situation. Cependant, dans certaines régions, les pratiques traditionnelles relatives au veuvage peuvent se traduire par de la violence et de la maltraitance envers les femmes âgées, ce qui représente une grave menace pour leur santé et leur bien-être5. Dans les rares pays disposant de données fiables sur les niveaux de pauvreté par âge et par sexe (principalement les pays développés), il apparaît que, chez les personnes âgées, les femmes sont plus susceptibles d’être pauvres que les hommes6,7. On sait peu de choses sur l’ampleur du problème pour les femmes des pays en développement. À quels problèmes de santé la femme âgée est-elle confrontée ? À l’échelle mondiale, les principales causes de mortalité et d’incapacité chez les femmes de plus de 60 ans sont les cardiopathies ischémiques, les accidents vasculaires cérébraux et les bronchopneumopathies obstructives chroniques (Tableau 1). Ensemble, ces affections sont responsables de 45 % des décès de femmes de plus de 60 ans dans le monde. En outre, 15 % des décès sont dus à des cancers – principalement ceux du sein, des poumons et du côlon. Comme pour les hommes, de nombreux problèmes de santé que rencontrent les femmes âgées sont dus à des facteurs de risque auxquels elles ont été exposées durant leur jeunesse ou leur vie La fEmmE ÂgéE d’adulte. Le tabagisme, les modes de vie sédentaires et les régimes riches en cholestérol, en graisses saturées et en sel, mais pauvres en fruits et en légumes frais, contribuent ainsi aux problèmes de santé qu’elles connaissent plus tard dans la vie. Les maladies cardio-vasculaires, souvent considérées comme un problème « masculin », constituent la principale cause de décès chez les personnes âgées des deux sexes, presque partout dans le monde. En réalité, chaque année, les maladies cardio-vasculaires sont responsables d’un plus grand nombre de décès chez les femmes âgées que chez les hommes de ce groupe : en 2004, elles ont emporté 7,4 millions de sujets féminins de plus de 60 ans contre 6,3 millions de sujets masculins1. Les maladies cardio-vasculaires sont souvent considérées comme des « maladies de l’abondance ». Toutefois, chez les femmes de 60 ans et plus, les taux de mortalité qui leur sont associés sont deux fois plus élevés dans les pays à revenu faible et intermédiaire que dans les pays à revenu élevé. Ils sont particulièrement hauts dans les pays européens à revenu intermédiaire, suivis par les pays de la Région de la Méditerranée orientale et de la Région africaine1. Cette configuration s’explique en partie par la baisse significative des taux de mortalité des maladies cardio-vasculaires qui a été enregistrée au cours des 50 dernières années chez les femmes des pays à revenu élevé (Figure 3). Les facteurs à l’origine de cette baisse sont la réduction des comportements Tableau 1 Dix principales causes de mortalité de la population féminine âgée de 60 ans et plus selon le groupe de revenu du pays (2004) Monde Rang Cause Décès (milliers) % Pays à faible revenu Rang Cause Décès (milliers) % 1 Cardiopathies ischémiques 2933 19.2 1 Cardiopathies ischémiques 829 19.9 2 Accidents vasculaires cérébraux 2677 17.5 2 Accidents vasculaires cérébraux 613 14.7 3 BPCO* 1254 8.2 3 Infections des voies respiratoires inférieures 403 9.7 4 Infections des voies respiratoires inférieures 818 5.3 4 BPCO* 313 7.5 5 Diabète sucré 499 3.3 5 Diabète sucré 143 3.4 6 Cardiopathies hypertensive 453 3.0 6 Cardiopathies hypertensive 89 2.1 7 Maladie d’Alzheimer et autres démences 305 2.0 7 Cancer du col de l’utérus 78 1.9 8 Cancer du sein 294 1.9 8 Néphrites et néphroses 73 1.8 9 Cancers de la trachée, des bronches 287 1.9 9 Maladies diarrhéiques 71 1.7 et du poumon 10 Cancer du côlon et du rectum 241 1.6 10 Cancer du sein 64 1.5 Pays à revenu intermédiaire Rang Cause Décès (milliers) % Pays à revenu élevé Rang Cause Décès (milliers) % 1 Accidents vasculaires cérébraux 1625 21.7 1 Cardiopathies ischémiques 622 17.1 2 Cardiopathies ischémiques 1481 19.8 2 Accidents vasculaires cérébraux 438 12.1 3 BPCO* 821 11.0 3 Maladie d’Alzheimer et autres démences 194 5.3 4 Cardiopathies hypertensive 278 3.7 4 Infections des voies respiratoires inférieures 158 4.4 5 Infections des voies respiratoires inférieures 256 3.4 5 Cancers de la trachée, des bronches 130 3.6 et du poumon 6 Diabète sucré 242 3.2 6 BPCO* 120 3.3 7 Cancer de l’estomac 145 1.9 7 Cancer du sein 114 3.1 8 Cancers de la trachée, des bronches 136 1.8 8 Cancer du côlon et du rectum 114 3.1 et du poumon 9 Cancer du sein 115 1.5 9 Diabète sucré 113 3.1 10 Cancer du côlon et du rectum 106 1.4 10 Cardiopathies hypertensive 86 2.4 *Bronchopneumopathie chronique obstructive. Source : Organisation mondiale de la Santé1. LES fEmmES ET La SanTé Figure 3 Taux de la mortalité due aux maladies cardio-vasculaires chez les femmes âgées de 30 ans et plus (standardisé sur l’âge pour 100 000 femmes) dans certains pays (1950-2006) 22 20 à risque tels que le tabagisme et la sédentarité, l’amélioration de la prise en charge et du traitement des facteurs de risque métabolique tels que l’hypertension artérielle et l’hypercholestérolémie, et l’amélioration des 1950 Canada États-Unis France Suède traitements des affections cardio vasculaires Taux pour 100 000 femmes existantes8 . Rien n’empêche aujourd’hui d’obtenir 12 10 8 les mêmes résultats dans les pays à revenu intermédiaire, mais les actions de santé publique nécessaires doivent encore y être 6 mises en oeuvre à grande échelle. Dans le 4 même temps, ces pays n’ont pas accès à des 2 interventions pharmaceutiques d’un bon 0 1955 1960 1965 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005 rapport coût/efficacité et ne bénéficient pas, pour améliorer les chances de survie, d’un Sources : base de données sur la mortalité de l’OMS, mars 2009 (http://www.who.int/healthinfo/morttables/en/index.html) et Division de la population des Nations Unies2. traitement rapide des affections cardiovasculaires. Pour un certain nombre de raisons, les maladies cardio-vasculaires passent fréquemment inaperçues chez les sujets féminins, en particulier dans les pays à revenu faible et intermédiaire. Les femmes qui présentent des syndromes coronaires aigus restent souvent non diagnostiquées, notamment parce que leurs symptômes sont différents de ceux des hommes9-12. Les sujets féminins sollicitent également moins souvent une aide médicale et, partant, ne reçoivent les soins appropriés que tardivement, lorsque devient nécessaire une intervention urgente qui sera probablement moins efficace13. Des données provenant des enquêtes mondiales sur la santé indiquent que près de la moitié des femmes des pays à revenu élevé et intermédiaire supérieur suivaient un traitement pour des symptômes de maladies cardio-vasculaires chroniques, contre seulement une sur quatre dans les pays à revenu faible et intermédiaire inférieur14. Les femmes ont également tendance à développer des maladies cardio-vasculaires plus tard que les hommes, ce qui rend le diagnostic encore plus difficile car elles risquent davantage de souffrir déjà d’autres maladies comme le diabète et l’hypertension artérielle13. Malheureusement, elles sont généralement sous-représentées dans les essais cliniques mixtes conduits sur les traitements contre les maladies cardio-vasculaires15, ce qui a ralenti l’élaboration de directives thérapeutiques tenant compte du sexe. La bronchopneumopathie obstructive chronique (BPCO) constitue une autre grande cause de morbidité et de mortalité chez les femmes âgées. Au niveau mondial, l’une des principales causes de cette maladie est la consommation de Figure 4 Taux d’incidence et de mortalité du cancer du sein tabac, un produit dont on devient généra et du cancer du col de l’utérus selon le groupe de revenu du pays (standardisés sur l’âge pour lement dépendant au cours de la jeunesse. 100 000 femmes, tous âges confondus), 2004 Cependant, comme noté au chapitre 1, l’ex 80 position à la pollution de l’air à l’intérieur Taux pour 100 000 femmes 70 Incidence Mortalité Cancer du sein Cancer du col de l’utérus des foyers, du fait de l’usage de combustibles solides pour le chauffage et la cuisine, repré sente le principal facteur de risque de BPCO chez les femmes. Ces expositions concourent 60 50 40 30 à ce que les taux de mortalité dus aux BPCO 20 soient plus élevés chez les femmes âgées des 10 pays à revenu faible et intermédiaire, où ils 0 sont plus de cinq fois supérieurs à ceux des Revenu élevé Revenu faible Revenu élevé Revenu faible pays à revenu élevé1,16. et intermédiaire et intermédiaire Source : Organisation mondiale de la Santé1. La fEmmE ÂgéE Les formes de cancer dont les femmes souffrent le plus sont les cancers du sein, du col de l’utérus et du côlon1. Du point de vue de la mortalité, les cancers du sein, des poumons, du côlon et de l’estomac prélèvent le plus lourd tribut. Bien que ces cancers puissent se déclarer avant l’âge de 60 ans, la plupart des décès (68 %) se produisent à des âges plus avancés. Comme on peut s’y attendre, l’incidence et les types de cancer varient beaucoup selon les pays, tout comme les taux de diagnostic et de survie. Pour certains cancers, tels ceux du poumon et le cancer colorectal, l’incidence (nombre de cas nouveaux) et la mortalité sont plus élevées dans les pays à revenu élevé. On observe le phénomène inverse pour le cancer du col de l’utérus : l’incidence et la mortalité sont plus fortes dans les pays à faible revenu (Figure 4)1. Cela s’explique principalement par le fait que l’incidence de l’infection à PVH est plus élevée chez les populations plus jeunes. En outre, la plupart des femmes des pays à revenu élevé effectuent un dépistage du cancer du col de l’utérus, améliorant les chances d’un diagnostic précoce et, par conséquent, la probabilité d’un traitement efficace. En revanche, dans les pays à revenu faible et intermédiaire, les femmes risquent davantage de décéder à cause d’un dépistage tardif et de difficultés d’accès aux traitements17. L’incidence du cancer du sein est bien plus forte dans les pays à revenu élevé que dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, mais la mortalité imputable à cette maladie y est similaire (Figure 4), ce qui s’explique par la disponibilité de meilleurs traitements dans les premiers. Un dépistage précoce est essentiel à un traitement efficace du cancer. Cependant, des données provenant de plusieurs pays à revenu faible tendent à indiquer que les taux de mammographie y seraient d’à peine 5 %, voire moins18. Le dépistage doit être suivi d’un traitement approprié des cas décelés. Malheureusement, la plupart des femmes des pays à revenu faible et intermédiaire ne peuvent bénéficier des traitements efficaces car ils sont indisponibles, inaccessibles ou trop chers. Prise en charge des incapacités : une question de prévention et de soins Pour vivre sa vieillesse en bonne santé, l’un des facteurs clés est d’adopter, de préférence tôt dans la vie, un comportement sain, notamment de faire des choix alimentaires favorables à la santé et de pratiquer une activité physique régulière. Ce comportement peut améliorer l’espérance de vie et retarder l’apparition d’affections et d’incapacités chroniques, le temps passé en mauvaise santé se trouvant concentré dans une période plus courte en fin de vie19. Malgré tout, le vieillissement s’accompagne souvent d’une santé déclinante, et notamment de la perte des fonctions musculaires et cognitives, qui peut avoir de lourdes conséquences. Vieillir est également associé à des taux croissants de comorbidité (la personne souffre de plusieurs maladies ou incapacités en même temps), ce qui complique sérieusement le traitement. Les données sur la prévalence des affections invalidantes sont généralement recueillies sans prendre en considération ce phénomène. Les principaux problèmes de santé chroniques et débilitants auxquels sont confrontées les femmes âgées sont la mauvaise vue (dont la cataracte), la perte auditive, l’arthrite, la dépression et la démence (Tableau 2). Tableau 2 Années vécues avec une incapacité (AVI) chez les femmes âgées de 60 ans et plus par principales causes (2004) Incapacité Pays à faibrevenu le Pays à revenintermédiaire u Pays à revenu élevé En millions d’AVI Maladie d’Alzheimer et autres démences 0.6 2.1 2.3 Vices de réfraction 2.0 0.5 1.6 Déficit auditif, apparu à l’âge adulte 1.0 1.6 1.0 Cataractes 1.3 0.1 1.9 Ostéoarthrite 0.5 1.2 0.9 Troubles dépressifs unipolaires 0.6 0.5 1.1 Dégénérescence maculaire 0.6 1.0 0.4 Cardiopathie ischémique 0.4 0.3 0.7 Diabète sucré 0.1 0.6 0.4 Accident vasculaire cérébral 0.2 0.7 0.3 Source : Organisation mondiale de la Santé1. LES fEmmES ET La SanTé Des études récentes ont révélé que, dans certains pays développés, la prévalence de l’incapacité autodéclarée semble baisser chez les personnes âgées, quel que soit son degré de gravité20-24. La modification des attitudes et une acceptation accrue de l’incapacité peuvent avoir joué un rôle dans ce recul. Néanmoins, la prévalence et la gravité globales des incapacités chez les femmes âgées continueront de s’accentuer en raison du vieillissement de la population et car le nombre de femmes âgées se trouvant dans les groupes d’âges les plus avancés, où les niveaux d’incapacité sont les plus élevés, augmentera. La perte de vision est responsable de 32 % du total des années perdues du fait d’une incapacitéa chez les femmes de plus de 60 ans. Les femmes âgées sont non seulement plus susceptibles que les hommes de devenir aveugles, mais elles éprouvent également davantage de difficultés à recevoir l’aide dont elles ont besoin1. Tous âges confondus, 57 % des aveugles dans le monde sont des femmes et cette proportion s’accroît avec l’âge. Pourquoi ? La raison est en partie car les femmes n’ont pas accès aux traitements. Les femmes de plus de 60 ans des pays à revenu faible ont neuf fois plus de risques d’être aveugles que celles des pays à revenu élevé, principalement à cause de la cataracte et des vices de réfraction non corrigés1. À l’échelle mondiale, 44 % des cas de cécité chez les femmes de plus de 60 ans sont dus à la cataracte, que l’on peut soigner par une intervention chirurgicale simple et relativement peu onéreuse1. Pourtant, les femmes souffrant de cette affection ont moins de chances que les hommes d’être opérées du fait des obstacles les empêchant d’accéder aux soins, aux niveaux communautaire comme familial, et du caractère inadapté de l’offre de services25. Dans les pays à faible revenu, le trachome explique 5 % des cas de cécité ; pourtant, il peut être entièrement évité. Il est plus courant chez les femmes car il s’agit d’une maladie très infectieuse qui se transmet fréquemment d’enfant à enfant puis d’enfant à mère, surtout dans les endroits surpeuplés où l’eau est rare et les mouches sont nombreuses1. L’arthrite constitue une autre cause majeure d’incapacité, les personnes âgées étant notamment particulièrement exposées à l’ostéoarthrite et à la polyarthrite rhumatoïde1. La surcharge pondérale, qui est devenue plus courante chez les femmes que chez les hommes, constitue un facteur de risque important de l’ostéoarthrite et explique environ 19 % des cas chez les femmes de plus de 60 ans16. Cependant, il semblerait que la prévalence varie peu entre les catégories de revenu, entre les zones rurales et urbaines et entre les pays à revenu faible et intermédiaire14. Bien que des traitements existent pour soulager l’arthrite, les données disponibles indiquent que seule une minorité de femmes et d’hommes en bénéficient. L’ostéoporose est trois fois plus fréquente chez les femmes que chez les hommes26. Elle représente un facteur de risque majeur des fractures de la hanche, dont on a dénombré en 2000 environ 1,6 million de cas dans le monde27. Près de 70 % de ces fractures concernaient des femmes. Elles entraînent des incapacités sérieuses et se traduisent souvent par un placement de longue durée en établissement spécialisé. Aux États-Unis, par exemple, environ 20 % des patients qui souffrent de fracture de la hanche ont besoin de soins de longue durée dans une maison de repos28. Chaque année, dans les pays développés, plus d’un tiers des personnes de plus de 70 ans signalent qu’elles sont tombées29. Les femmes ont alors plus de risques de se blesser, en partie car la prévalence de l’ostéoporose est plus élevée parmi elles. Continuer à mener une vie active est l’une des manières les moins onéreuses d’empêcher les chutes et leurs conséquences30. La désagrégation de la personnalité qui apparaît avec la démence représente peut-être l’un des plus grands défis auquel sont confrontés la femme qui vieillit et la société qui l’entoure. a Les API, ou années perdues du fait d’une incapacité, sont calculées comme suit : nombre des cas (incidence) × durée moyenne de la maladie × coefficient de pondération pour tenir compte de la gravité (http://www.who.int/healthinfo/global_burden_disease/ GBD_report_2004update_part1.pdf). La fEmmE ÂgéE La démence est responsable de 13 % des pertes d’années de vie en bonne santé chez les sujets féminins de plus de 60 ans. Les femmes touchées par ce problème sont également confrontées à un risque accru de dépression et ont besoin d’importantes ressources en soins. Après 65 ans, il semble que la prévalence de la démence double tous les cinq ans environ. Les personnes âgées dont l’affection clinique principale est la démence risquent davantage de ne pouvoir pratiquer qu’une activité très limitée. Dans l’hypothèse où les taux de prévalence de la démence par âge restent constants, le vieillissement de la population anticipé dans de nombreux pays développés entraînera un doublement de la prévalence de la démence d’ici à 2030, parallèlement au recul des taux de mortalité. Prise en charge de la femme âgée Avec des soins de santé satisfaisants et un environnement favorable, les femmes peuvent rester actives et en bonne santé jusqu’à un âge avancé. Cependant, les services de santé, surtout dans les pays à revenu faible et intermédiaire et en temps de crise humanitaire, peuvent défavoriser les personnes âgées et sont rarement adaptés aux besoins spécifiques des femmes de cette catégorie. Dans de nombreux pays, l’accès aux soins de santé est tributaire des systèmes de sécurité sociale et d’assurancemaladie, qui sont eux-mêmes fonction de l’emploi précédemment occupé dans le secteur formel de l’économie. De nombreuses femmes âgées des pays en développement ayant travaillé durant toute leur vie dans le secteur informel ou exercé des activités non rémunérées, les soins de santé sont pour elles inaccessibles ou trop onéreux, voire les deux. Dans beaucoup d’endroits, en particulier dans les pays en développement, ce sont souvent la famille et les amis qui s’occupent des personnes âgées, essentiellement les membres de la famille de sexe féminin31. Cette prise en charge implique pour les soignants31 un lourd fardeau économique, social et sanitaire, y compris un risque accru de dépression. Dans les pays à revenu élevé, les systèmes de sécurité sociale peuvent prendre en charge les personnes âgées, mais l’augmentation du coût des soins oblige souvent les membres de la famille à une participation financière significative. Par exemple, des études réalisées en Estonie, en Lettonie et en Ouganda ont montré que les ménages ayant des membres de plus de 65 ans risquent davantage de devoir assumer des dépenses médicales catastrophiques que ceux sans personnes âgées32–34. À mesure que le nombre de personnes âgées augmente par rapport au groupe de soignants disponibles et que les structures sociales traditionnelles s’effondrent, les familles et les responsables politiques devront de plus en plus se tourner vers d’autres solutions. Cette situation se trouve encore aggravée dans beaucoup de zones rurales des pays en développement, où la migration des jeunes vers les villes a laissé de nombreuses femmes âgées sans soutien familial. La solution peut consister pour partie à renforcer les services de soutien à domicile et de proximité, mais, vraisemblablement, le nombre de femmes très âgées qui passent les dernières années de leur vie dans des structures spécialisées augmentera également35. Malheureusement, les difficultés qui accompagnent les soins de longue durée, que ce soit à domicile ou dans des établissements spécialisés, peuvent être associées à de la négligence et des mauvais traitements. Jusqu’à très récemment, les mauvais traitements infligés aux personnes âgées étaient un problème social dissimulé au public. Cependant, un nombre croissant de données indique que ces maltraitances (notamment comportements dommageables et non-assistance) représentent un grave problème de santé publique et de société qui se manifeste dans les pays en développement comme dans les pays développés36. LES fEmmES ET La SanTé Conclusion À l’échelle mondiale, les affections chroniques (cardiopathies ischémiques, accidents vasculaires cérébraux et bronchopneumopathies obstructives chroniques) sont responsables de 45 % des décès de femmes de plus de 60 ans. En outre, 15 % des décès sont dus à des cancers – principalement du sein, des poumons et du colon. Beaucoup de problèmes de santé auxquels les femmes sont confrontées avec la vieillesse sont dus à des facteurs de risque auxquels elles ont été exposées durant leur jeunesse ou leur vie d’adulte, comme le tabagisme, la sédentarité et une mauvaise alimentation. Les sociétés doivent se préparer dès aujourd’hui à prévenir et à prendre en charge les problèmes de santé chroniques associés à l’âge. L’adoption d’habitudes favorables à la santé pendant la jeunesse peut aider les femmes à vivre de façon active et saine, même quand elles ont atteint un certain âge. La société doit d’autre part se préparer à assumer les coûts de la prise en charge sanitaire des femmes âgées. De nombreux pays à revenu élevé consacrent actuellement un pourcentage important de leur budget sanitaire et social à la prise en charge des personnes âgées. Dans les pays plus démunis, c’est souvent la famille et généralement les femmes de la famille qui s’acquittent de cette responsabilité. Il faut élaborer des politiques concernant le financement de la santé, la réforme des retraites et des impôts, l’accès à l’emploi structuré ainsi que les prestations de retraite et la protection sociale qui lui est associée et, enfin, la prestation de soins en établissement et dans la communauté. Résumé des conclusions et implications Les principales causes de mortalité et d’incapacité chez les femmes de plus de 60 ans sont les cardiopathies ¦¦ ischémiques, les accidents vasculaires cérébraux, les bronchopneumopathies obstructives chroniques et les cancers. Beaucoup de problèmes de santé auxquels les femmes sont confrontées avec l’âge sont dus à des comportements adoptés durant leur jeunesse ou leur vie d’adulte, comme le tabagisme, la sédentarité et des régimes alimentaires riches en cholestérol, en graisses saturées et en sel, mais pauvres en fruits et légumes frais. Une des principales causes d’incapacité chez les femmes âgées est la perte de vision ; chaque année, plus de ¦¦ 2,5 millions d’entre elles perdent la vue. Une grande partie de cette charge d’incapacité pourrait être évitée si ces femmes avaient accès aux soins nécessaires, en particulier à la chirurgie de la cataracte. Cependant, elles éprouvent des difficultés à en bénéficier. Dans les pays à faible revenu, le trachome est une cause de cécité importante mais évitable et touche principalement les femmes. Avec des soins de santé satisfaisants et un environnement favorable, notamment des occasions plus nom ¦¦ breuses de contribuer de manière productive à la société, les femmes peuvent rester actives et en bonne santé jusqu’à un âge avancé. Cependant, dans les pays à revenu faible et intermédiaire, les soins de santé peuvent être inaccessibles en raison de leur coût et ils sont rarement adaptés aux besoins spécifiques des femmes âgées. Les interventions devraient veiller d’abord à encourager les changements de comportements et de style de vie, ¦¦ par exemple l’adoption de bonnes habitudes alimentaires et une vie active. Cela peut contribuer à empêcher ou à retarder certains problèmes de santé. Pour assurer l’accès aux soins, il est nécessaire de mettre en place des programmes de dépistage et de traitement pour le diabète, le cancer, l’hypertension artérielle et les cardiopathies, ainsi que des services d’opération de la cataracte pour les femmes disposant de faibles revenus. Il est essentiel de construire des « environnements favorables » aux femmes âgées. Il faut les soutenir dans ¦¦ leur rôle de prestataire de soins et dans les autres fonctions qu’elles assument, lorsque nécessaire. Une vie plus longue et passée en meilleure santé est un objectif social qui offrira aux femmes des opportunités qui leur profiteront ainsi qu’à leurs communautés et qui, en même temps, conduira à des changements sociaux majeurs dans l’organisation du travail, de la famille et du soutien social. La fEmmE ÂgéE Références 1. The global burden of disease: 2004 update. Genève, Organisation mondiale de la Santé, 2008. 2. World population prospects. The 2006 revision. New York, NY, Division de la population des Nations Unies, 2007. 3. Action humanitaire et personnes âgées. Informations indispensables à l’attention des acteurs humanitaires. Genève, Comité permanent interorganisations (IASC), 2008. 4. Monasch R, Boerma JT. Orphanhood and childcare patterns : an analysis of national surveys from 40 countries. AIDS (London, England), 2004, 18 suppl 2;S55-S65.doi:10.1097/00002030-200406002-00007 PMID:15319744 5. Chen MA. Perpetual mourning : widowhood in rural India. 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Il identifie des opportunités pour parvenir à des progrès plus rapides, et énumère les domaines pour lesquels des informations plus nombreuses et des concertations nationales, régionales et internationales renforceraient l’efficacité des approches et aboutiraient à de meilleurs résultats pour la santé des femmes. En dépit des grandes avancées sanitaires réalisées ces dernières années, les femmes de nombreuses régions du monde sont toujours confrontées à des problèmes de santé auxquels il aurait fallu s’atteler depuis longtemps. Ailleurs, elles ont bénéficié du progrès, mais pour se retrouver face à de nouveaux problèmes qui, souvent, sont chroniques et apparaissent à un âge avancé. Ces derniers pourraient être réduits grâce à la promotion de la santé et des interventions sanitaires plus précoces. Les femmes et les hommes partagent le même droit à jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible1. Cependant, les femmes sont défavorisées par des facteurs sociaux, culturels, politiques et économiques qui influent directement sur leur santé et entravent leur accès aux informations sanitaires et aux soins. Les stratégies pour améliorer la santé des femmes doivent prendre en compte tous les déterminants de la santé, en particulier les inégalités entre les sexes, et s’attaquer aux obstacles socio-économiques et culturels qui empêchent la population féminine de préserver et d’améliorer sa santé. Il convient de replacer ces stratégies dans le contexte plus large du renforcement des soins de santé primaires, une démarche qui s’attaque aux besoins de santé prioritaires comme aux déterminants de la santé2. Les soins de santé primaires peuvent faire avancer les choses en prenant des mesures pour renforcer le leadership, bâtir des services de santé réactifs, assurer une couverture universelle et tirer profit de l’évolution des politiques publiques. Leadership Bâtir un leadership solide Un leadership est nécessaire pour s’assurer que les femmes jouissent du meilleur état de santé possible. Les grandes avancées réalisées dans certains pays en matière de santé féminine montrent que ce potentiel peut être réalisé. Le type d’intervention à mener est connu et les ressources sont disponibles. Les contraintes socio-économiques, l’instabilité politique, les troubles civils et les autres crises peuvent en partie expliquer l’absence de progrès de certains pays. Cependant, les différences d’état de santé sont également liées aux décisions des pouvoirs publics et aux investissements dans les grands domaines d’activité. Il importe de prendre conscience que les systèmes de santé peuvent ne pas atteindre un équilibre satisfaisant entre ces différents domaines. Ils ne mènent pas non plus naturellement à des résultats sanitaires plus équitables. En réalité, en matière de santé des femmes, les résultats tendent à être de plus en plus disparates, entre les pays comme à l’intérieur de ceux-ci. Les objectifs du Millénaire pour le développement ont joué un rôle vital pour stimuler les actions ciblant les objectifs sanitaires, dans le contexte du développement, face aux nombreuses revendications concurrentes susceptibles de retenir l’attention de la communauté internationale. Le fait qu’il existe un objectif distinct pour la santé maternelle attire l’attention sur l’absence de progrès dans ce domaine et a permis d’attirer un appui à la fois politique et financier en faveur de l’accélération des changements. L’adjonction de la cible sur l’accès universel à la santé génésique, en cohérence avec des engagements précédents sur la santé des femmesa, a contribué à en élargir la portée. Cependant, le centre de l’attention reste limité à un seul aspect de la vie des femmes, même si celui-ci est crucial. Il faut maintenant s’intéresser aux nombreux autres défis et déterminants de la santé des femmes a S’agissant des engagements internationaux sur la santé de la femme, voir le Programme d’action adopté à la Conférence internationale sur la population et le développement (CIPD), Le Caire, 5-13 septembre 1994 (http://www.un.org/popin/icpd/conference/offeng/ poa.html) ainsi que la Déclaration et le Programme d’action de la Quatrième Conférence mondiale sur les femmes de Beijing, 15 septembre 1995. LES fEmmES ET La SanTé exposés dans le présent rapport. Ce faisant, il faudra veiller à promouvoir l’égalité entre les sexes et l’autonomisation des femmes (OMD3). Les différentes manières d’aborder la santé des femmes entre les organisations internationales et en leur sein viennent encore compliquer la situation, de nombreuses initiatives concurrentes cherchant à capter l’attention et les ressources. Les réponses nationales apportées à ces problématiques sont souvent fragmentées et de portée limitée. Il apparaît nécessaire de s’engager durablement à atteindre des résultats et de s’accorder sur une approche cohérente et unifiée. Un leadership audacieux et participatif, assorti d’un programme d’action clair et cohérent, est essentiel pour aller de l’avant. Cette impulsion doit tenir compte de l’étendue des problèmes qui touchent la vie des femmes et permettre de prendre des mesures résolues là où les progrès sont insuffisants et les injustices s’accentuent. La participation de la société civile, en particulier des porte-parole et des militants de la santé des femmes, est essentielle. Il faut défendre leur engagement constructif à tous les niveaux des processus d’évaluation, d’établissement des priorités et d’exécution, et renforcer leur capacité à amener les décideurs à rendre compte de leur action. Le rôle de l’intégration des questions de parité hommes-femmes Depuis quelques années, l’ « intégration des questions de parité hommes-femmes » est devenue la démarche privilégiée pour garantir la santé des femmesa. Elle procède de la prise de conscience que, même si des stratégies techniques sont nécessaires, elles sont insuffisantes si l’on ne s’attaque pas aux discriminations, aux partis pris et aux inégalités fondés sur le sexe qui imprègnent les structures organisationnelles des gouvernements et des organisations, y compris les systèmes de santé, et si l’on ne change pas le fonctionnement de ces structures (« parité institutionnelle »). L’intégration des questions de parité implique également d’aborder la dimension hommes-femmes à tous les niveaux de l’élaboration des politiques et des programmes, par des analyses par sexe systématiques et par la mise en oeuvre d’actions qui s’attellent à corriger l’équilibre des pouvoirs et la distribution des ressources entre les hommes et les femmes (« parité opérationnelle »)3. Sur le plan de la santé, cette démarche vise à promouvoir l’égalité entre les femmes et les hommes tout au long de leur vie et à atteindre l’équité sanitaire. Le réseau Femmes et équité entre les sexes de la Commission de l’OMS sur les Déterminants sociaux de la Santé propose des approches concrètes pour que les organisations gouvernementales et non gouvernementales intègrent la question de la parité hommes-femmes en matière de santé, et décrit les efforts de collaboration menés pour protéger les droits et la santé des femmes4,5. De nombreuses initiatives visant à traiter les problèmes négligés et à améliorer l’état de santé des femmes ont été conduites, allant d’efforts menés au Ghana pour exhorter au dépistage des cancers du sein et du col de l’utérus et à la mise en place de services de traitement, à l’élaboration, en Afrique du Sud, de politiques sur l’avortement et la violence à l’encontre des femmes. Celles qui occupent des postes à responsabilité, y compris dans les ministères de la santé, ont une influence palpable sur ces évolutions. En outre, des actions ont été menées pour intégrer la dimension hommes-femmes aux programmes de formation des professionnels de la santé6,7. Pour vaincre l’immobilisme et accélérer le rythme des réformes, certains pays ont pris des mesures résolues pour intégrer à leurs politiques de santé publique des analyses par sexe et des actions en matière de parité. Par exemple, la politique de santé publique de la Suède s’engage spécifiquement à réduire les inégalités de santé liées au sexe, tout en s’employant à diminuer les inégalités socio-économiques, ethniques et régionales8. a Le Conseil économique et social des Nations Unies parle d’« intégration du genre ». En 1997, il définissait cette notion comme suit : « L’intégration des questions de genre consiste à évaluer les implications des femmes et des hommes dans toute action planifiée comprenant la législation, les procédures ou les programmes dans tous les domaines et à tous les niveaux. Cette stratégie permet d’intégrer les préoccupations et les expériences des femmes et des hommes à la conception, à la mise en oeuvre, au contrôle et à l’évaluation des procédures et des programmes dans toutes les sphères politiques, économiques et sociétales pour qu’ils en bénéficient de manière égale et que l’inégalité actuelle ne soit pas perpétuée. Le but ultime est d’atteindre l’égalité entre les sexes. ». impLiCaTionS En maTiÈrE dE poLiTiQuES Mieux rendre compte de l’action menée L’importance de la gouvernance et de l’environnement politique rend nécessaire de mieux comprendre et suivre les évolutions dans ces domaines. L’Initiative Compte à rebours vers 2015 fournit à ce titre un exemple instructif. Elle promeut l’utilisation d’indicateurs sur les politiques de santé et les systèmes sanitaires, considérés comme des compléments essentiels du suivi de la couverture des interventions visant à améliorer la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants. Elle propose une série d’indicateurs pour évaluer certaines politiques sur le plan des données factuelles et des informations produites, de la gouvernance et du leadership, de la qualité et de l’efficacité des soins, du financement des services de santé et de la disponibilité du personnel sanitaire. Des données sont disponibles pour 68 pays prioritaires9. Mettre en oeuvre davantage d’initiatives de ce type aiderait les responsables de la santé et les gouvernements à cerner les mesures requises pour surmonter les obstacles au progrès dans les politiques et les systèmes de santé, et pour appuyer l’élaboration de systèmes de contrôle plus efficaces. Certains pays ont pris des mesures visant à institutionnaliser ces systèmes de contrôle. L’Afrique du Sud, par exemple, exige non seulement que tous les décès maternels soient signalés mais vérifie également ces déclarations dans le cadre du système « every death counts » (« chaque mort compte ») qui recouvre aussi les mortinaissances, les décès néonatals et les décès d’enfants10. Murthy a mis en évidence plusieurs mécanismes utilisés par les gouvernements pour rendre compte auprès des citoyens de leur action sanitaire, notamment en matière de santé féminine11. Les observatoires de la santé peuvent remplir cette fonction dans la mesure où ils font participer différentes parties prenantes du système de santé au suivi et à l’interprétation des données, des liens directs étant établis avec l’élaboration des politiques et le partage des meilleures pratiques. En Amérique latine et ailleurs, divers observatoires de ce type ont été créés pour recueillir des données de meilleure qualité et renforcer le système de justification de l’action menée, de manière à réduire les inégalités de santé entre les sexes. Certains sont dirigés par des membres de la société civile et d’autres par les ministères des affaires féminines (comme au Chili et en Colombie) ou de la santé (comme en Espagne)12. Certains observatoires sont dirigés par plusieurs ministères comme, dans de nombreux pays, ceux consacrés à la violence à l’encontre des femmes. Des services de santé réactifs Les systèmes de santé sont à l’image des sociétés qui les créent. Pour éviter qu’ils ne contribuent à perpétuer des inégalités sanitaires, ils doivent mieux répondre aux besoins et aux attentes des femmes en tant qu’utilisatrices et prestataires de soins de santé. Ce dont les femmes ont besoin Un des axiomes des soins de santé primaires est de faire passer « l’être humain d’abord »2. Il convient dès lors de s’intéresser aux caractéristiques qui, dans dans les systèmes de santé, sont essentielles pour améliorer les résultats sanitaires et sociaux pour les femmes. Le premier ensemble de caractéristiques concerne la réactivité des services de santé aux besoins des femmes. Bien qu’elles soient les principales utilisatrices des soins de santé, on ne porte pas une attention suffisante à leurs besoins et à leurs points de vue, tout au long de la vie, ainsi qu’aux contraintes qu’elles rencontrent pour protéger leur santé et pour accéder aux services disponibles ou en tirer le meilleur parti. Les préoccupations premières des femmes qui se font soigner sont le respect, la confiance, le respect de la vie privée et la confidentialité, des valeurs qui sont souvent compromises dans les établissements très fréquentés, en particulier chez certains groupes d’âge et groupes sociaux13. LES fEmmES ET La SanTé Les personnes chargées des soins de santé ont également la responsabilité de protéger l’autonomie des femmes en matière sanitaire. Il s’agit notamment d’éliminer les partis pris sexistes et les discriminations dont elles font l’objet au sein des services de santé et de s’assurer qu’elles n’en sont pas exclues. Par exemple, les filles non mariées souhaitant bénéficier de soins contre les maladies sexuellement transmissibles devraient les recevoir. Pourtant, elles sont souvent discriminées tandis que les hommes non mariés ont accès aux traitements. Elles ne devraient pas se voir refuser l’accès à la contraception ou à d’autres services sous prétexte qu’elles n’ont pas l’accord de leur partenaire7. En outre, les prestataires de soins doivent prendre des mesures fermes et dénoncer les pratiques qui violent les droits des femmes et des filles et portent atteinte à leur santé, comme les violences infligées par les partenaires intimes, les violences sexuelles, les mutilations sexuelles féminines, le mariage précoce et d’autres pratiques dommageables. Par ailleurs, les systèmes de santé doivent renforcer les capacités à répondre aux problèmes de santé de plus en plus nombreux qui touchent les femmes en tenant compte de la charge de morbidité locale et des tendances, et de manière à mettre fin à la fragmentation des soins qui s’est créée autour des programmes prioritaires. Améliorer la santé des femmes exige de prêter attention aux affections de santé sexuelle et génésique qui touchent essentiellement la population féminine. Mais il importe également de prendre en charge d’autres affections courantes qui restent non décelées et non traitées chez les femmes. Par exemple, les sujets féminins présentant des syndromes coronaires aigus ne sont souvent pas diagnostiqués, en partie car leurs symptômes sont différents de ceux des hommes. En particulier, on néglige dans de nombreuses régions la menace croissante que représentent pour les femmes les maladies non transmissibles et les problèmes de santé mentale. Chez les femmes âgées, la perte de vision est responsable de 32 % des années perdues du fait d’une incapacité ; pourtant, elles éprouvent des difficultés à se faire soigner. Enfin, la continuité des soins est essentielle pour s’attaquer aux nombreux problèmes de santé interdépendants, aigus comme chroniques, qui touchent les femmes tout au long de leur vie. Chez la femme adulte, le tabagisme est l’un des facteurs de risque évitable les plus graves pour les décès prématurés et les maladies. La prévalence croissante du tabagisme chez les jeunes femmes appelle des mesures urgentes. Il convient d’employer une approche exhaustive à long terme pour investir dans la santé des femmes, en commençant par la petite enfance et en poursuivant au fil des années, jusqu’à la promotion d’un vieillissement actif et sain. Les services de santé sexuelle et génésique ont souvent été les premiers à chercher à promouvoir des soins centrés sur les femmes. Ils ont eu toutefois tendance à concentrer leurs efforts de façon trop restrictive et n’ont pas saisi certaines occasions de proposer un plus large choix d’interventions ou ont négligé certains groupes de femmes. Par exemple, les soins anténatals devraient être considérés comme le point de départ potentiel d’un ensemble de services de santé tenant compte des besoins sanitaires globaux des femmes14. Celles vivant avec le VIH devraient avoir accès à des évaluations et des traitements recherchant leur bien-être propre et pas uniquement à des interventions visant à réduire les risques de transmission à leur enfant15. Il faudrait également que les services de santé sexuelle et génésique ne s’intéressent pas qu’aux femmes mariées et tiennent compte des besoins des adolescentes non mariées et des femmes marginalisées telles que les professionnelles du sexe. Permettre aux femmes de se faire entendre Les attentes sont de plus en plus pressantes s’agissant de la participation des femmes à la conception et à la mise en oeuvre des services sanitaires qui visent à influer sur leur santé16. La demande pour des services de santé répondant aux besoins des femmes vient souvent d’organisations qui travaillent avec des femmes ou avec des groupes de femmes au niveau communautaire. Il est important de collaborer avec ces organisations et de soutenir la participation de la communauté à la planification des changements. Au Népal, une intervention communautaire participative a été menée où des groupes féminins ont contribué à cerner les problèmes locaux en matière impLiCaTionS En maTiÈrE dE poLiTiQuES d’accouchement et à formuler des stratégies pour y remédier. Elle a démontré son efficacité pour réduire la mortalité maternelle et néonatale dans la population rurale17. La participation de la communauté a également permis d’organiser le transport des femmes pour qu’elles accouchent dans des établissements de santé18. Ces avancées en matière de soins de santé maternelle peuvent entraîner des changements profonds. Des données venant de Malaisie et du Sri Lanka montrent que les contacts entre la communauté et les sages-femmes qualifiées, qui assument alors un rôle d’agents de santé de première ligne, peuvent servir d’assise pour instituer un système de santé complet dans les zones rurales19. Il est également essentiel de favoriser l’autonomie les femmes qui travaillent au sein du système de santé, à tous les niveaux. Comme on l’a vu au chapitre 1, les femmes représentent la majorité du personnel de santé dans la plupart des régions, mais sont souvent exclues des postes à responsabilité, reflétant ainsi des inégalités plus générales au sein de la société20. Un véritable engagement, soutenu par des mesures concrètes, est nécessaire pour améliorer la participation des femmes à tous les niveaux de la gouvernance sanitaire, s’agissant en particulier des postes à responsabilité21. Dans le même ordre d’idées, les problèmes spécifiques aux femmes doivent être pris en compte par des mesures telles que la reconnaissance des professions à dominante féminine (comme celle d’infirmier), des normes et des codes de conduite pour les professionnels de la santé, des systèmes de supervision (avec amélioration de la qualité), des formations initiales et continues et des programmes de mentorat. Lorsque les professionnels de la santé se sentent utiles, appréciés et respectés, ils fournissent plus facilement un service centré sur le client et de meilleure qualité22. Enfin, des mesures sont indispensables pour prévenir les risques sanitaires auxquels les professionnelles de la santé sont confrontées, notamment la violence sur le lieu de travail, et pour pourvoir à leurs besoins en matière de santé et de sécurité. Les approches visant à renforcer les ressources humaines dans le secteur de santé doivent tenir compte du rôle central des femmes en tant que prestataires de soins informels à la maison ou au sein de la communauté. On estime que jusqu’à 80 % de l’ensemble des soins de santé (90 % pour ceux liés aux maladies imputables au VIH/sida) sont dispensés à la maison23. Dans le contexte de l’épidémie du VIH/sida, on admet généralement que ce sont principalement les femmes et les filles qui soignent les malades et qui assument la plus grande responsabilité des soins physiques et psychosociaux des membres de la famille et de la communauté24. Il est primordial qu’elles soient reconnues à leur juste valeur et soutenues par les secteurs professionnel et formel – y compris en matière de formation et de supervision et en mettant à leur disposition des systèmes d’orientation efficaces donnant accès aux médicaments, aux équipements et aux compétences de personnel qualifié25. Couverture universelle Une réforme centrale des soins de santé primaires consiste à assurer un accès équitable aux soins grâce à la couverture universelle, c’est-à-dire l’accès à une gamme complète de services de santé, avec une protection sociale de santé pour tous. Améliorer l’accès aux soins Renforcer les services pour parvenir à l’accès universel représente un défi de taille. Pour la plupart des interventions susceptibles d’avoir des effets réels sur les problèmes de santé courants des femmes, les progrès sont disparates et inégaux. Certains services, comme les soins anténatals, sont plus courants que, par exemple, ceux liés aux maladies mentales, à la violence sexuelle et au dépistage et à la prise en charge du cancer du col de l’utérus. La plupart des avancées sont réalisées par des pays qui étaient déjà en relativement bonne position au début des années 1990, tandis que ceux qui étaient moins bien classés, surtout en Afrique subsaharienne, ont été distancés. Ce sont principalement les pays les plus pauvres (souvent les plus LES fEmmES ET La SanTé fragiles sur le plan institutionnel), et en particulier ceux touchés par des conflits ou des catastrophes, qui stagnent, régressent ou enregistrent les progrès les plus lents. La désorganisation des services de santé primaires et la pénurie de prestataires de soins figurent parmi les facteurs d’aggravation spécifiques aux conflits et aux autres formes d’instabilité26. Dans ces contextes, les niveaux de couverture sont très faibles pour les interventions de base telles que la vaccination et le recours à des accoucheuses qualifiées. Pour de nombreuses filles et femmes, ces services n’existent tout simplement pas ou se trouvent trop éloignés. Par exemple, beaucoup de femmes vivant en zone rurale ne peuvent bénéficier de soins salvateurs au moment de l’accouchement simplement car elles n’ont pas accès aux hôpitaux, où les soins obstétricaux d’urgence peuvent être dispensés. Seule une faible minorité de la population peut accéder à une gamme de services convenable, d’où une situation de carence massive. À l’autre extrémité se trouvent les pays où une grande partie de la population a accès à un large éventail de services mais où une minorité en est exclue : c’est la marginalisation27. Les obstacles qui empêchent d’accéder aux soins sont multiples ; le pouvoir de décision insuffisant accordé aux femmes ou le peu de valeur donnée à leur santé entravent souvent leur utilisation des soins de santé. Établir de manière documentée les schémas d’exclusion des différents services essentiels peut être utile à la planification et permettre également de disposer d’une référence pour mesurer les progrès réalisés en matière de couverture. Dans de nombreux pays, en particulier ceux où l’on observe une stagnation ou une régression, le principal défi consiste à élargir le réseau de services de santé et à accroître la gamme d’interventions. Dans d’autres, il faut s’attaquer aux déterminants des modalités particulières d’exclusion. Protection sociale de santé Pour assurer une couverture universelle, il ne suffit pas de renforcer l’offre de services, mais il convient également d’éliminer les obstacles financiers à leur utilisation. La couverture universelle revêt une signification particulière pour les femmes. Elles supportent des coûts de santé plus élevés que les hommes puisqu’elles ont davantage recours aux soins. De plus, elles risquent davantage d’être pauvres, sans emploi, de travailler à temps partiel ou dans le secteur informel, qui ne propose aucune couverture maladie. Les approches visant à élargir la couverture de santé doivent prendre en compte le contenu des programmes de prestation et s’assurer qu’ils proposent davantage de services aux filles et aux femmes de tous âges. Certains pays, comme la Thaïlande, ont mis en place une couverture universelle pour un ensemble complet de services de santé, qui incluent des interventions de santé sexuelle et génésique28. Il faut aussi aborder la question de la protection financière, en abandonnant le paiement par l’usager au profit de systèmes de paiement préalable et de mutualisation. Ainsi, là où les services de santé maternelle sont payants, les ménages supportent une part importante du coût des services dispensés en établissement, et les accouchements suivis de complications entraînent souvent des dépenses catastrophiques. La gratuité des services de santé maternelle pour les usagers, en particulier pour les accouchements, peut stimuler la demande, comme on a pu le voir au Ghana, où le Gouvernement a introduit pour toutes les femmes une nouvelle mesure de prise en charge des soins liés à l’accouchement. En dépit des problèmes de financement et de trésorerie, on a constaté une hausse des accouchements pratiqués dans les structures de soins29. Des transferts de fonds pour les femmes, notamment assortis de conditions, ont également été envisagés dans le cadre d’un ensemble plus large de mesures visant à empêcher que les ménages pauvres ne soient contraints à faire des économies sur leurs dépenses de santé essentielles lors de périodes de ralentissement économique30–32. impLiCaTionS En maTiÈrE dE poLiTiQuES Politiques publiques Les politiques et les pratiques de santé publique doivent tenir compte du contexte social qui détermine la santé des femmes comme celle des hommes, et s’employer à supprimer les disparités liées au sexe qui empêchent d’accéder aux services sanitaires et de parvenir à des résultats de santé positifs. Le secteur de la santé a un rôle important à jouer : attirer l’attention sur la manière dont les politiques des autres secteurs peuvent influer sur la santé des femmes et encourager la collaboration intersectorielle pour accentuer les effets positifs sur la santé féminine et atténuer ceux négatifs. Compte tenu des questions de droits de l’homme en jeu et des engagements internationaux, une action résolue apparaît nécessaire pour résorber les inégalitésa. Les femmes ne pourront réaliser pleinement leur potentiel de santé que si les politiques publiques évoluent de manière à assurer leur autonomie. « La santé dans toutes les politiques » est un appel lancé par le nouveau mouvement en faveur des soins de santé primaires qui reconnaît que la santé de la population peut être améliorée par des politiques qui sont principalement contrôlées par des secteurs autres que celui de la santé33,34. La santé des femmes dans toutes les politiques Le document d’information du réseau Femmes et équité entre les sexes de la Commission de l’OMS sur les Déterminants sociaux de la Santé examine une série de politiques publiques ayant une incidence sur les déterminants de l’exposition aux risques, de la vulnérabilité à la maladie, de l’accès aux soins et des conséquences de la mauvaise santé chez les femmes. Parmi celles susceptibles de contribuer au progrès figurent : 16,35 ; ¦¦ des mesures légales et sociales qui protègent les droits de propriété des femmes ¦¦ des mesures qui soutiennent l’égalité d’accès à l’emploi formel ainsi que l’équité entre les sexes sur le lieu de travail et visent à empêcher que les femmes ne passent à côté d’une promotion, ne perdent leur travail ou subissent une baisse de salaire suite à une grossesse ou parce qu’elles s’occupent d’enfants ou de membres de leur familleb; ¦¦ des actions ciblées pour encourager les filles à se rendre à l’école et y rester inscrites, en fournissant des repas scolaires, en construisant des installations sanitaires séparées, en garantissant un environnement scolaire sans risque et en favorisant des mariages plus tardifs36 ; ¦¦ la promotion de la santé ainsi que d’autres mesures pour améliorer l’accès de toutes les adolescentes à l’instruction, y compris à une éducation sexuelle complète ainsi qu’à des formations et des mesures sur tabac et l’alcool, les régimes alimentaires, l’activité physique et la sécurité routière ; ¦¦ des mesures offrant spécifiquement des opportunités économiques aux femmes, surtout dans les pays qui sont les plus vulnérables aux effets des crises économique et alimentaire mondiales37 ; ¦¦ des mesures qui améliorent l’accès à l’eau, aux combustibles et aux techniques entraînant un gain de temps ; a S’agissant des engagements internationaux sur les droits des femmes, voir le Programme d’action adopté à la Conférence internationale sur la population et le développement, Le Caire, 5-13 septembre 1994 (http://www.un.org/popin/icpd/conference/offeng/poa. html) ; la Déclaration et le Programme d’action de la Quatrième Conférence mondiale sur les femmes de Beijing, 15 septembre 1995 (http://www.unesco.org/education/information/nfsunesco/pdf/BEIJIN_F.PDF) ; le Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels adopté par l’Assemblée générale des Nations Unies le 16 décembre 1966 et entré en vigueur le 3 janvier 1976 (http://www2. ohchr.org/french/law/cescr.htm) ; la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 18 décembre 1979 et entrée en vigueur le 3 septembre 1981 (http://www.un.org/ womenwatch/daw/cedaw/text/fconvention.htm) ; et la Convention relative aux droits de l’enfant adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 20 novembre 1989 et entrée en vigueur le 2 septembre 1990 (http://www2.ohchr.org/french/law/crc.htm). b Pour des exemples de conventions internationales du travail intéressant cette question, voir : Convention concernant la discrimination (emploi et profession) (1958) ; Convention concernant l’égalité de rémunération (1951), Convention sur les travailleurs ayant des responsabilités familiales (1981), et Convention sur la protection de la maternité (2000). Publiées par l’Organisation internationale du travail, elles peuvent être consultées à l’adresse : http://www.ilo.org/public/french/gender.htm. LES fEmmES ET La SanTé ¦¦ des stratégies pour s’attaquer aux stéréotypes féminins et pour changer les normes, les pratiques et les comportements discriminatoires38 ; ¦¦ des interventions pour faire cesser toute forme de violence à l’égard des femmes, y compris dans des situations de conflit39 ; ¦¦ la mise en place d’environnements « adaptés à l’âge » et la multiplication des occasions pour les femmes âgées de contribuer efficacement à la société en les soutenant parallèlement dans leur rôle de prestataire de soins et, si nécessaire, leurs autres fonctions. Il est possible de dégager des leçons des initiatives nationales audacieuses lancées pour s’attaquer aux inégalités sociales et à l’exclusion tout en favorisant parallèlement l’égalité entre les sexes et la santé des femmes. Par exemple, l’approche multisectorielle et intégrée de la protection sociale adoptée pour les pauvres au Chili comprend un programme universel pour le développement du jeune enfant. Chile Crece Contigo (« Le Chili grandit avec toi ») englobe ainsi l’accès aux soins, à l’instruction et aux services de santé aux enfants pour contribuer au développement physique, social et émotionnel optimal des jeunes enfants tout en faisant respecter le droit des mères qui travaillent à allaiter leur bébé et en encourageant l’emploi des femmes40. Les femmes peuvent retirer des avantages substantiels des politiques sociales qui n’intègrent pas à première vue la dimension hommes-femmes, par exemple les investissements dans les systèmes de communication, les infrastructures en zone rurale et les routes, ou la rénovation des taudis. Des enseignements peuvent être tirés des menaces qui, même dans les pays à revenu élevé disposant de programmes de santé publique d’envergure, continuent de peser sur leur santé (forte incidence d’infections sexuellement transmissibles, consommation de substances et problèmes de santé mentale, y compris le suicide). Le fait est qu’une analyse par sexe est un élément essentiel de toute politique publique qui a une forte incidence sur l’amélioration et la protection de la santé des femmes. Opportunités économiques pour les femmes La crise financière et le ralentissement économique mondiaux exacerbent les difficultés de nombreux pays qui s’efforcent de parvenir à une couverture universelle des soins de santé. Les pays où la croissance s’essouffle fortement, en particulier ceux qui souffrent déjà de niveaux élevés de pauvreté, éprouveront encore plus de difficultés à financer les soins de santé destinés aux personnes dans le besoin. Paradoxalement, cette situation permet de souligner l’urgence que revêtent les problèmes de santé des femmes et de préconiser des mesures économiques et sociales qui protégeront les plus vulnérables de chocs économiques à venir. La crise a déjà mis en exergue l’importance de l’autonomisation économique des femmes en tant que composante de toute politique. La Banque mondiale a proposé que les pays industrialisés affectent un pourcentage de leurs mesures de relance économique au financement de projets d’infrastructure et de filets de protection sociale, ainsi qu’aux institutions de microfinancement et aux petites entreprises41. Elle a également demandé instamment que ces efforts fournissent de l’argent aux femmes des ménages les plus pauvres, car cela aura sur le développement des répercussions importantes qui atténueront les difficultés actuelles et futures. Les projets de microfinancement ont déjà beaucoup contribué à réduire la pauvreté dans certains pays à revenu faible (principalement en Asie du Sud), où les femmes représentent 85 % des 93 millions de bénéficiaires les plus pauvres des institutions de microfinancement37. Bien que l’on se soit interrogé sur la capacité du microfinancement à soutenir les plus démunis, il semblerait qu’il aide les femmes à surmonter des obstacles financiers aux soins de santé42. Et d’aucuns souhaiteraient examiner plus avant sa capacité à réduire les inégalités de santé et à fournir un filet de sécurité aux femmes pauvres dans les régions qui ne bénéficient pas encore d’une couverture universelle. Différentes approches ont été expérimentées. Le microcrédit permet aux bénéficiaires d’emprunter à des faibles taux d’intérêt pour générer des revenus ou payer des services. Les services de impLiCaTionS En maTiÈrE dE poLiTiQuES microcrédit destinés aux femmes sont de plus en plus souvent associés à des opportunités de formation dans des domaines susceptibles d’engendrer un éventail plus large de bénéfices (création d’entreprise, alphabétisation, santé et capacités de renforcement communautaire). Une étude menée en Afrique du Sud a montré, par exemple, qu’un programme alliant le microcrédit à une éducation pour la santé intégrant la dimension hommes-femmes avait divisé par deux, chez les participantes, le risque de violence infligée par un partenaire intime43. Au Bangladesh, on a observé des bénéfices en matière de santé et de nutrition chez les femmes participant au programme de microcrédit du BRAC (Bangladesh Rural Advancement Committee), ainsi que chez leurs jeunes enfants44. Les systèmes de microassurance et de microépargne visent à fournir un certain niveau de couverture d’assurance-maladie, ou encore à encourager les femmes à économiser pour des besoins sanitaires futurs ou à rembourser progressivement des frais de santé. Une expérience de financement de la santé à petite échelle a été menée dans l’État indien du Karnataka. Elle comprenait l’ouverture d’un compte d’épargne pour couvrir les coûts des soins ambulatoires de chaque femme inscrite et une assurance pour soins hospitaliers. Plus de la moitié des besoins de santé des femmes étaient couverts et le programme a été étendu aux femmes qui n’avaient pas encore utilisé le système de santé classique45. Des travaux complémentaires sont nécessaires pour réunir davantage d’informations sur les divers mécanismes financiers innovants en vigueur à l’échelle communautaire et pour mieux les comprendre, compte tenu de leur potentiel pour favoriser l’autonomisation économique des femmes et encourager les personnes à se faire soigner. Le contexte qui permet à ces systèmes de prospérer, leurs écueils possibles et leur capacité à être reproduits et à s’inscrire dans la durée méritent une plus grande attention. Il en va de même de la manière dont ils influent sur la santé, en particulier celle des femmes pauvres, lors des récessions économiques. Suivre les progrès L’amélioration de la planification et de la mise en oeuvre des politiques sur la santé des femmes et du suivi des résultats est tributaire d’investissements dans les systèmes d’information stratégiques de collecte et d’utilisation de données par âge et par sexe, ainsi que du suivi de la réalisation des objectifs mondiaux et d’autres indicateurs intéressant la santé et la survie des femmes. Actuellement, il n’existe pas de données fiables sur certains aspects essentiels de la santé des femmes, en raison des insuffisances des systèmes nationaux d’information et de statistiques sanitaires. Par exemple, la mortalité maternelle, un formidable indicateur de la santé des femmes et de l’état général d’un système de santé, est mal mesurée dans la plupart des régions à faible revenu. Afin de remédier à cette insuffisance et de générer en temps opportun des données plus fiables sur les grandes tendances de la mortalité, chez les femmes comme chez les hommes, il convient de renforcer le soutien pour la mise en place des systèmes d’état civil qui identifient et comptabilisent les naissances, les décès et les causes de décès. Bien que ces mesures ne se concentrent pas sur les besoins des femmes proprement dits, elles serviront de base pour suivre plus précisément la santé des femmes tout au long de la vie46. Les femmes sont « plus que des mères ». Les responsables politiques assument toute une série d’autres problèmes sérieux qui les touchent47. Un effort concerté est nécessaire pour recueillir des éléments plus complets sur ces problèmes, dont beaucoup sont aujourd’hui invisibles ou négligés, comme on l’a souligné dans ce rapport. Il faut également disposer de meilleures données pour suivre les performances du système de santé lorsque l’on augmente la couverture des interventions essentielles, en particulier là où les inégalités sont les plus criantes. Ce travail est crucial pour cerner les différentes modalités selon lesquelles les femmes et leur santé se trouvent délaissées, que ce soit en raison des progrès insuffisants réalisés pour améliorer la santé, parce que les inégalités se creusent, ou encore, pour certaines affections de santé et dans certaines situations, car de nouveaux problèmes apparaissent ou d’anciens s’aggravent. LES fEmmES ET La SanTé Compte tenu des lacunes majeures dans notre connaissance et notre compréhension du problème, mises en évidence dans les chapitres précédents, des investissements importants sont requis dans les recherches consacrées aux problèmes de santé des femmes. Priorité devrait être donnée à celles qui orienteront, évalueront et suivront l’action menée. Les femmes ne devraient pas constituer seulement un sujet d’étude, mais prendre part activement à ces travaux. Elles continuent d’être exclues de nombreuses études d’observation et cliniques, et il faut mettre un terme à cette situation. Leur participation et celle des représentants des organisations féminines, tout au long du processus, sont essentielles pour mettre au point un programme de recherche mieux adapté, jeter une lumière nouvelle sur l’interprétation des résultats des travaux et faciliter les changements de politique nécessaires. Références 1. Rapport de la quatrième conférence mondiale sur les femmes. Beijing, 4-15 septembre 1995. Nations Unies, New York, NY. Paragraphe 89. (http://www.un.org/womenwatch/daw/beijing/pdf/Beijing%20 full%20report%20F.pdf, consulté le 8 avril 2009) 2. Rapport sur la santé dans le monde, 2008. Les soins de santé primaires – Maintenant plus que jamais. Genève, Organisation mondiale de la Santé, 2008. 3. Ravindran TKS, Kelkar-Khambete A. 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Ce rapport met en exergue les points communs entre les problèmes de santé auxquels sont confrontées les femmes à travers le monde, mais il souligne également les différences résultant de la diversité des conditions dans lesquelles elles vivent. Il démontre que se préoccuper de la santé des femmes est une approche nécessaire et efficace pour renforcer les systèmes de santé dans leur ensemble, des efforts qui profiteront à tous. Les soins de santé primaires, qui privilégient l’équité, la solidarité et la justice sociale, offrent la possibilité de changer les choses. Ce rapport fait ressortir une étonnante absence de données fiables. Même la mortalité maternelle, pourtant l’une des plus graves menaces pesant sur la santé des femmes dans les pays en développement, reste mal mesurée. Nos connaissances des différences entre l’incidence des risques sanitaires sur les hommes et sur les femmes demeurent fragmentaires, tout comme celles des effets des interventions et des soins de santé sur les filles et les femmes. Elles comportent également de graves lacunes quant à la façon de structurer et d’administrer les systèmes de santé pour répondre plus efficacement aux besoins particuliers des filles et des femmes, notamment les plus pauvres et plus vulnérables d’entre elles. Ainsi, ce rapport préconise également d’améliorer la qualité des données et de renforcer la recherche, d’assurer un suivi plus systématique de la moitié féminine de la population mondiale, et de s’attaquer aux obstacles auxquels se heurtent les filles et les femmes pour protéger leur santé et accéder aux soins et aux informations sanitaires. En faisant un bilan des données factuelles et en esquissant un programme d’action pour l’avenir, le présent rapport donne une idée des mesures nécessaires pour améliorer la santé des filles et des femmes dans le monde entier. Il a pour but de livrer les informations nécessaires au dialogue politique et d’encourager les pays, les institutions et les partenaires du développement à agir. L’amélioration de la santé des femmes est importante pour les femmes, pour leur famille, pour leur communauté et pour l’ensemble de la société. Améliorer la santé des femmes, c’est rendre le monde meilleur. Le présent rapport, Les femmes et la santé: la réalité d’aujourd’hui, le programme de demain, utilise les données actuellement disponibles pour faire le bilan de la santé des filles et des femmes dans le monde entier et pour attirer l’attention sur les conséquences à attendre et ce qu’il en coûte si les problèmes de santé des femmes ne sont pas pris en charge au bon moment. Il montre que bien que la santé des filles et des femmes se soit beaucoup améliorée au cours des 60 dernières années, les progrès sont très inégalement répartis. Dans de nombreuses parties du monde, la vie des femmes – de l’enfance à la vieillesse – est amputée par les maladies évitables et les décès prématurés. Le rapport met en lumière les points communs entre les problèmes de santé auxquels doivent faire face les femmes dans le monde entier mais attire aussi l’attention sur les différences qui découlent de modes de vie très variés. Le rapport donne une idée des mesures à prendre pour améliorer la santé des filles et des femmes et il a pour but de livrer les informations nécessaires au dialogue politique et d’encourager les pays, les institutions et les partenaires du développement à agir. Il met en particulier l’accent sur le besoin urgent d’un leadership politique et institutionnel plus cohérent et sur la nécessité de parler davantage de la santé des femmes et de mobiliser des ressources suffisantes pour sauver plus de vies et améliorer la santé des fil lettes et des femmes. Comme l’indique le rapport, s’occuper de la santé des femmes est une approche nécessaire et utile pour renforcer les systèmes de santé d’une façon générale, dans l’intérêt de tous.